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Source : SLATE

Le discours de peur véhiculé dans les années 1980 sur la maladie a laissé des traces, mais certains souhaitent désormais déconstruire les préjugés.

C’est un jour qui restera à jamais gravé dans son esprit. Yassin n’a alors que 23 ans quand il affronte l’un des moments les plus douloureux de sa vie. De retour d’un voyage en Thaïlande, le jeune homme réalise un dépistage pour le VIH. Le résultat tombe, le test se révèle positif. «J’ai cru qu’on m’annonçait ma peine de mort, raconte-t-il aujourd’hui. J’ignorais tout de cette maladie, j’étais naïf et un peu stupide, je pensais que j’allais perdre mes cheveux, mincir drastiquement, et périr à ma trentaine.»

Yassin est alors très peu éduqué sur la question. «Je ne faisais pas la distinction VIH/SIDA et je baignais toujours dans les clichés et les images horribles des films que j’ai pu voir plus jeune.» Le jeune homme broie du noir pendant quelques semaines, puis il commence alors à prendre particulièrement soin de santé: des séances de sport, une alimentation équilibrée. Et surtout, Yassin commence à balayer certains de ses propres préjugés. «J’ai vite compris que ma santé n’était, et ne sera jamais, altérée à cause du virus.» Le VIH est un virus, se savoir positif au VIH permet de le contrôler et d’éviter que ne se développe le SIDA.

Yassin a donc commencé à prendre un traitement, la trithérapie. De son propre aveu, sa vie a à peine changé. «Il suffisait d’une pilule à prendre tous les soirs pour vivre une vie tout à fait normale.» Ce qui changera du tout au tout, en revanche, c’est le regard que la société portera sur lui. «Il m’était totalement inconcevable de m’imaginer les violences auxquelles j’allais faire face durant mon parcours. Je ne savais rien de la sérophobie et du self-stigma lié au VIH. Cela peut se manifester de plein de façons différentes. La peur qu’un ami panique si t’utilises sa brosse à dent ou bois dans son verre. La peur que ton boss ou un collègue au taff découvre ton statut et te traite différemment. La peur de finir seul et de ne pas mériter l’amour qu’on mérite tous. La peur et le dégoût de soi-même, en fait.»

Faire évoluer les mentalités

Yassin décide donc de révéler publiquement sa situation auprès de ses 20.000 abonnés sur Instagram. Une manière pour lui de se protéger. «Cinq années après l’annonce de ma séroconversion, je vivais toujours avec cette angoisse permanente qu’on utilise mon statut pour me nuire, me faire chanter, ou m’insulter par rapport à ça. Cinq années plus tard, je me trouvais toujours dans la même position d’extrême vulnérabilité et je ne pouvais plus supporter cela. Je devais reprendre le contrôle d’une situation qui m’avait dépassé, j’ai réalisé que la seule façon de ne plus vivre avec ce “secret” était d’être le plus transparent possible et de le rendre public. Car ça n’en était pas un.»

Environ 173.000 personnes vivent avec le VIH en France. Mais comment expliquer que pour beaucoup d’entre elles, leur séropositivité soit encore vécue dans le secret? «L’expression de la sérophobie a explosé», insiste Fred Bladou, chargé de mission Nouvelles stratégies de Santé chez Aides. Il rappelle que le rejet s’exprime de manière décomplexée aujourd’hui, évoquant notamment les nombreux commentaires violents, devenus monnaie courante sur certaines applications de rencontre comme Grindr.

Le compte Instagram Seropos vs Grindr répertorie plusieurs de ces commentaires. Au-delà du manque de bienveillance qu’on y trouve, c’est aussi la méconnaissance qui est frappante. «On assiste à des formes de rejet extrêmement violentes. Dans la lutte contre le VIH, la prévention doit être incarnée.» D’après lui, il faudrait s’inspirer de certaines figures qui, dans les années 1980/1990, ont permis de faire évoluer les mentalités. «En 1991, l’annonce de la séropositivité de Magic Johnson, ce grand basketteur noir-américain, a vraiment changé quelque chose par exemple.» En France, ces années-là ont été notamment marquées par des moments de télévision, comme le baiser de Clémentine Célarié à un homme séropositif. Ou les actions coups de poing d’Act Up.

Mais à l’heure du numérique et des réseaux sociaux, quelles voix incarnent cette parole si nécessaire dans la lutte contre les préjugés? Plusieurs –hétérosexuelles– ont tenté d’incarner cette lutte, avec un discours visant à déconstruire des préjugés parfois bien ancrés dans les esprits. Dans son livre Positif, Camille Genton raconte la découverte de sa séropositivité. Lucie Hovhannessian est une autre figure, très jeune, qui a investi les plateaux de télévision et les réseaux sociaux.

Fred Bladou souligne justement l’importance d’axer la prévention sur internet: «Ouvrir la discussion sur les réseaux sociaux, c’est une excellente idée. Il faut absolument investir ces champs pour parler aux jeunes.» C’est ce qu’a fait Yassin, en révélant sa séropositivité. «Le problème avec ce virus, c’est qu’il manque cruellement de visibilité, de modèles. J’ai pris conscience que cette prise de parole, sur un réseau comme Instagram pouvait aider plein de gens qui n’ont pas encore trouvé la force en eux de faire leur coming out. Ce qui au départ était personnel et intime a finalement le pouvoir d’impacter positivement d’autres vies… J’avais sous-estimé la force d’une confession et d’un témoignage.»

Un combat contre les préjugés

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Un sondage IFOP-BILENDI pour le Sidaction révèle qu’en France, en 2020, 29% des jeunes considèrent qu’il existe des médicaments pour guérir du SIDA (contre 13% en 2009). Dans le même temps, 15% pensent que le virus du SIDA peut se transmettre en embrassant une personne séropositive. Cette méconnaissance de la maladie serait aussi le résultat de méthodes de prévention qui manquent encore cruellement de nouveauté. «Tout ça est verrouillé par des vieux cons, s’emporte Fred Bladou. Si on veut que ça change, il faut absolument que toutes ces grandes questions qui concernent les jeunes soient présentes à l’école. On a besoin de pédagogie. C’est pas en se donnant bonne conscience en faisant deux flyers par an que ça va changer.»

Jesco, homosexuel de 27 ans, rejoint cet avis: «On ne m’a jamais appris à faire l’amour avec un mec. Et quand toute ta sexualité a été cachée, brimée, il peut se passer ce genre de choses, on peut prendre des risques. Ce qu’il faut questionner, c’est notre capacité à faire communauté et à s’entraider.» Depuis peu, il a commencé un nouveau traitement préventif, la Prep. Celui-ci n’a pas la même fonction que la trithérapie: il s’adresse aux personnes n’ayant pas contracté le virus. Ce médicament, remboursé en totalité par la Sécurité sociale, permet d’éviter la contamination dans quasiment 100% des cas. Sauf que là encore, les préjugés refont surface.

«J’ai publié une story sur Instagram pour annoncer que je prenais la Prep. Je pensais que les gens allaient me féliciter. Et, en fait, j’ai eu des discours anti-médicaments et des discours m’expliquant que j’avais une sexualité débridée.» Une fois de plus, c’est un combat contre les préjugés qui doit être mené dans la lutte contre le VIH. «Si demain, tu te fais vacciner du Covid, on dira de toi que tu es un citoyen responsable, explique Fred Bladou. Alors qu’avec le VIH, il y a toujours cette approche extrêmement morale.» Pour autant, Jesco est bien conscient de l’intérêt sanitaire de son geste: «Prendre la Prep, c’est tout simplement prendre soin de soi. J’ai rendez-vous dans un centre tous les trois mois pour un bilan de santé. On vérifie notamment toutes les IST à ce moment-là. Je n’ai jamais autant pris soin de ma santé sexuelle.»

Au Royaume-Uni, la Prep a donné des résultats spectaculaires. Les contaminations au VIH ont chuté de 71% chez les hommes gays et bisexuels entre 2012 et 2018, d’après les autorités sanitaires. Certaines villes françaises se sont inspirées de cet exemple. En matière de lutte contre le SIDA, la mairie de Paris fait partie des villes modèles. L’objectif annoncé d’Anne Hidalgo est de faire de Paris une ville sans SIDA. Concrètement, cela signifie qu’à partir de 2030, la ville espère ne plus devoir enregistrer de nouvelle contamination par le VIH. Paris a notamment mis en place des tests de dépistage du VIH, sans frais et sans ordonnance.

Des messages qui ont du mal à passer

Malgré la volonté politique de certains pays ou de certaines villes, la sexualité ou la situation de certains hommes gays –considérés comme un «public vunérable»– reste encore encore sujette à de multiples incompréhensions. Même au sein du corps médical. «Il m’est déjà arrivé de faire face à des paroles inappropriées et discriminatoires lors de rendez-vous chez le dentiste, explique Yassin. On pouvait s’offusquer au moment où je devais justifier mon ALD (affection longue durée) à la fin de la consultation. Je me rappelle d’une dentiste extrêmement contrariée de ne pas avoir été prévenue de mon statut avant la consultation. Comme si elle n’avait jamais entendu parler des traitements, alors qu’elle faisait elle-même partie du corps médical.»

Jesco confie lui aussi avoir déjà dû faire face à des remarques déplacées, lors de tests notamment. Et plus surprenant encore, il a dû affronter la méconnaissance du corps médical sur ces problématiques. «Ma médecin du travail ne savait pas ce qu’était la Prep. J’ai dû tout lui expliquer, carrément lui faire un cours…» La professeure Christine Katlama, spécialiste du VIH et médecin chercheuse à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, rappelle que «ce sont des sujets sur lesquels il faut faire preuve d’empathie. On est dans de l’humain, là.»

Pour cette médecin, qui a connu les premières heures du VIH, certains messages ont encore malheureusement du mal à passer, notamment auprès des jeunes. «Il y a un élément qui n’est pas assez connu du public, c’est que le fait de contrôler l’infection –et on le peut chez tout le monde– libère de la contagiosité.» En clair, une personne dont la charge virale est indétectable ne peut pas transmettre le virus. «Tous les vingt ans, il faut recommencer les messages. Alors, il faut utiliser les moyens qu’on a, pour les populations qu’on a. Et les réseaux sociaux, ça en fait partie.»

 «Il faut déconstruire la peur»

Si les préjugés perdurent, c’est aussi parce que la méconnaissance au sujet du VIH est intrinsèquement liée à la peur qui s’était emparée de la société dans les années 1980/1990. À l’époque, le virus était alors inconnu. Certain·es l’appelaient même le «cancer gay». Les traces de cette époque sont encore présentes aujourd’hui dans les comportements et les mentalités. «Il faut déconstruire la peur, notamment en expliquant qu’elle ne vient pas de nulle part, qu’elle a des fondements historiques, explique Jesco. Dans un souci sanitaire, une forme de sérophobie a été entretenue. On a vu énormément de personnes mourir d’un virus qu’on ne connaissait pas, et on nous a donc expliqué pendant des années qu’il fallait combattre ce virus, en avoir peur. Ces réflexes de peur demeurent encore aujourd’hui. Mais cette peur est démesurée.»

Les conséquences psychologiques sur les personnes séropositives sont nombreuses: rejet, exclusion, moqueries. «Il est évident que le vrai fléau avec le VIH n’est plus médical mais sociétal, insiste Yassin. La vraie maladie c’est la sérophobie dont les personnes séropo sont victimes beaucoup trop fréquemment. Les symptômes sont les gens qui la perpétuent.» En quarante ans, le monde médical a pourtant fait d’importants progrès sur cette question. «Il faut débobiner la peur, assure Catherine Katlama. La peur, c’est par rapport à quelque chose qu’on ne connaît pas. Alors que le VIH, on le connaît et on sait comment le maîtriser.»

Changer l’image du VIH passe sûrement par des initiatives telles que celle de Yassin. En prenant la parole publiquement, il a souhaité donné un visage réaliste de la maladie: «Il est temps de dépoussiérer toutes ces idées reçues et ces stéréotypes selon lesquels une personne séropositive serait dangereuse ou en mauvaise santé. Car oui, il est tout à fait possible de vivre avec le VIH. Et de vivre sa meilleure vie.»

Sofian Aissaoui

Source : Seronet

On le sait, le Tasp (traitement comme prévention), ça marche ! Une personne vivant avec le VIH sous traitement avec une charge virale indétectable ne transmet pas le VIH, c’est un consensus scientifique depuis les résultats de l’étude Partner et c’est même devenu un slogan U=U (undetectable = untransmittable) dans les pays anglo-saxons et I=I (indétectable = intransmissible) dans les pays francophones. Mais quel impact a ce message sur une des communautés les plus touchées par le VIH, les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) ? Une étude récente répond à cette question.

L’étude en question a été publiée dans le journal of Aids Patient Care et reprise dans un article du site d’infos VIH Aidsmap. Une équipe de chercheurs-es, menée par le Dr Jonathon Rendina de l’Université de New York, a voulu savoir comment le message « U=U » impactait l’estime de soi des hommes gays et bisexuels vivant avec le VIH et leur perception de la stigmatisation liée au VIH dans la société.

Pour répondre à ces questions, ils-elles ont conçu un questionnaire en ligne destiné aux HSH séropositifs. Le questionnaire a été largement diffusé, à travers les réseaux sociaux et les applications de rencontres pour hommes qui cherchent des hommes, à partir du début de l’année 2018 et jusqu’à fin 2019. Au final, les chercheurs-es ont récolté les données de 30 361 participants avec un âge moyen de 38 ans.

Se sentir mieux par rapport à son statut sérologique

Ce sont 85 % des participants qui ont déclaré avoir une charge virale indétectable, 10 % ont dit qu’elle était détectable et 5 % n’étaient pas certains de leur niveau de charge virale au moment de remplir le questionnaire. Les données récoltées montrent, sans ambiguïté, l’aspect bénéfique du message U=U chez les participants. Presque 82 % des répondants ont déclaré que le message U=U leur permettait de se sentir mieux par rapport à leur statut sérologique, y compris 59 % qui ont déclaré se sentir beaucoup mieux depuis qu’ils savaient qu’ils ne pouvaient pas transmettre le VIH.

En ce qui concerne la stigmatisation liée au VIH et la sérophobie, 79 % des répondants pensent que faire connaitre ce message au plus grand nombre permettrait de réduire la stigmatisation, tandis que 18 % pense que ça n’aurait pas d’impact. Les résultats de cette étude montrent que les participants avec une charge virale indétectable sont ceux qui sont le plus réceptifs au message U=U et ceux qui considèrent le plus leur observance au traitement comme « excellente ». D’autres facteurs associés à une bonne adhésion au message U=U sont le fait d’être en couple séro-différent, d’avoir des partenaires multiples ou des relations sexuelles sans préservatif.

Préconiser une large diffusion du message U=U par les professionnels de santé

La majorité des participants, 71 %, a déclaré qu’elle connaissait le slogan « U=U » tandis que 24 % n’en avaient jamais entendu parler. Les sources d’informations principales du message « U=U » étaient des sites d’informations spécialisés dans le VIH (55 %) et des profils d’utilisateurs d’applications de rencontres (51 %). Deux tiers des répondants ont déclaré qu’ils avaient déjà discuté de la charge virale et du risque de transmission avec un-e professionnel-le de santé.

Les auteurs-es de l’étude préconisent une large diffusion du message « U=U » par les professionnels-les de santé, que ce soit auprès des personnes séronégatives pour lutter contre la sérophobie, mais aussi et surtout chez les personnes vivant avec le VIH pour renforcer leur estime de soi, leur confiance en soi et leur motivation à bien prendre leur traitement pour atteindre une charge virale indétectable et maintenir ce seuil.

Source et références : Rendina HJ et al. Treatment is more than prevention: perceived personal and social benefits of Undetectable = Untransmissable messaging among sexual minority men living with HIV. Aids Patient Care and STDs, 34: 444-51, 2020 (open access).

Source : Info VIH

Contexte : Le choix du premier traitement antirétroviral est crucial, notamment en Afrique où les options alternatives peuvent être limitées et la surveillance biologique difficile. Dans une publication antérieure des résultats à S48, l’essai ADVANCE1 avait montré de bons résultats virologiques mais des interrogations concernant des prises de poids importantes.

Méthodes et Résultats :

Cet essai été mené au sein de 11 structures de prise en charge des personnes vivant avec le VIH (PVVIH) à Johannesburg, Afrique du Sud. Les critères d’inclusion étaient très larges : PVVIH avec charge virale > 500 cp/ml, de plus de 12 ans et de poids > 40 kg, n’ayant pas reçu d’antirétroviraux au cours des 6 derniers mois et ayant une clearance de la créatinine > 60 ml/min (> 80ml/min pour les < 19 ans).

La comparaison se fait entre trois associations antirétrovirale : dolutégravir/emtricitabine/ténofovir-alafénamide (DTG-FTC-TAF) versus  dolutégravir/emtricitabine/ ténofovir-disoproxyl (DTG-FTC-TDF) versus éfavirenz 600 mg/emtricitabine/ténofovir-disoproxyl (EFV-FTC-TDF).

Un peu plus de 1000 patients ont été inclus (351 dans chaque groupe) entre janvier 2017 et mai 2018. À S96, en intention de traiter, 79% des patients du groupe DTG-FTC-TAF ont une charge virale < 50 cp/ml, contre 78% dans le groupe DTG-FTC-TDF et 74% dans le groups EFV-FTC-TDF, permettant d’attester de la non-infériorité des régimes de traitement les uns par rapport aux autres.

Le nombre d’échecs virologiques prouvés est faible (11, 14 et 15 patients respectivement). La tolérance de l’ensemble des 3 régimes de traitement est proche, avec néanmoins un peu plus d’arrêt pour effets secondaire (3% )dans le groupe EFV que dans les deux groupes DTG (1%).

On trouve une augmentation moyenne de poids de 7,1 kg dans le groupe DTG-FTC-TAF, 4,3 Kg dans le groupe DTG-FTC-TDF et 2,3 dans le groupe avec EFV (figure), avec une gain de poids plus important chez les femmes (+8,1, +4,8 et +3,2 kg respectivement) et une obésité chez les femmes apparaissant dans les mêmes proportions (28%, 18% et 12% respectivement).

Une analyse de sensibilité excluant les femmes ayant eu une grossesse en cours d’essai n’affecte pas les résultats. Le gain de poids reste important chez les participants ayant des CD4 élevés à l’inclusion. Le petit gain de densité osseuse apparaissant sous DTG-FTC-TAF par rapport aux autres groupes semble plus en relation avec la prise de poids et le remodelage osseux qu’avec un effet propre du TAF.

Conclusions et commentaires :

Les résultats à 96 semaines viennent conforter la bonne efficacité de tous les régimes utilisés et un faible nombre d’échecs virologique, une bonne tolérance globale en dehors de la prise de poids, particulièrement préoccupante chez les femmes recevant dolutégravir et ténofovir alafénamide. Le fait que la courbe de poids continue à progresser à S 96, même si la pente est moindre qu’à S 48, parait particulièrement préoccupant !

Dr Cédric Arvieux

  1. Venter WDF, Moorhouse M, Sokhela S, et al. Dolutegravir plus two different prodrugs of tenofovir to treat HIV. N Engl J Med 2019; 381: 803–15.

Références

  • Dolutegravir with emtricitabine and tenofovir alafenamide or tenofovir disoproxil fumarate versus efavirenz, emtricitabine, and tenofovir disoproxil fumarate for initial treatment of HIV-1 infection (ADVANCE): Week 96 results from a randomised, phase 3, non-inferiority trial | Lancet HIV . 2020 Oct;7(10):e666-e676
    Willem D F Venter, et al.

Source : Seronet

Les cancers sont une cause de décès importante chez les personnes vivant avec le VIH et depuis longtemps un niveau élevé de cancers liés au tabagisme a été observé. Une nouvelle étude américaine importante vient confirmer que le VIH est un risque, indépendant et supplémentaire, de contracter ce type de cancers chez les personnes vivant avec le VIH, et en particulier chez les femmes vivant avec le VIH.

L’étude reprise par le site d’infos Aidsmap est importante car, pour la première fois, les chercheurs-ses ont comparé de larges groupes de personnes qui ont les mêmes facteurs de risques (âge, sexe, poids, comorbidités, consommation d’alcool, drogues) en distinguant celles qui sont séropositives au VIH et celles qui sont séronégatives.

L’étude menée par la professeure Nancy Hessol de l’université de Californie à San Francisco et son équipe est fondée sur les données de 4 423 femmes entre 1984 et 2018 qui avaient participé à l’étude Women’s Interagency HIV Study (WIHS) (1) et 6 789 hommes entre 1984 à 2018 qui avaient participé à l’étude Multicenter Aids Cohort Study (MACS) (2). Environ trois quarts des participantes de l’étude WIHS et 44 % des participants de l’étude MACS étaient séropositifs-ves au VIH. La consommation de tabac était élevée dans les deux groupes : 65 % de personnes fumeuses dans le groupe WIHS et 60 % dans le groupe MACS. Au total, 406 cancers liés au tabagisme ont été diagnostiqués, en majorité des cancers du poumon/ bronche (117), du colon/rectum (52), de l’anus (52) et du foie (39).

Le taux d’incidence de ces cancers était bien plus élevé chez les femmes que chez les hommes et en particulier chez les femmes vivant avec le VIH : hommes séronégatifs : 139 sur 100 000 personnes par an ; hommes séropositifs : 270 sur 100 000 personnes par an ; femmes séronégatives : 276 sur 100 000 personnes par an ; femmes séropositives : 434 sur 100 000 personnes par an. Les taux d’incidence sont restés élevés chez les personnes vivant avec le VIH y compris après que les chercheurs-ses ont pris en compte d’autres facteurs de risques connus dans les cancers liés au tabagisme comme la durée et l’intensité de la consommation de tabac. Par ailleurs, l’incidence restait élevée y compris quand l’analyse des données s’est concentrée sur les personnes vivant avec le VIH qui ont eu accès aux nouvelles générations de traitements ARV. L’étude précise que le risque de cancer chez les personnes vivant avec le VIH était associé à un nombre de CD4 en dessous de 200/mm3 et une charge virale au-dessus de 500/ml. Les chercheurs-es n’étaient pas certains-es des causes d’incidences plus élevées chez les femmes. Les participantes avaient tendance à fumer moins que les hommes, mais des études antérieures ont montré que les femmes étaient plus sujettes à des cancers du poumon que les hommes.

« C’est une des études avec le plus grand nombre de participants-es pour examiner l’impact des cancers liés au tabagisme chez les personnes vivant avec le VIH en comparaison avec des personnes séronégatives qui ont les mêmes caractéristiques en dehors du VIH », écrit la Professeure Nancy Hessol. « Ces données appuient fortement la nécessité d’intégrer le sevrage tabagique dans la prise en charge des personnes vivant avec le VIH afin de réduire les risques de cancers liés au tabagisme mais aussi les risques exacerbés de comorbidités dont les maladies cardio-vasculaires (MCV), les infections pulmonaires et les pneumonies » concluent les auteurs-es de l’étude.

Références : Hessol NA et al. Risk of smoking-related cancers among women and men living with and without HIV. Aids, online ahead of print, 8 October 2020.

(1) : L’étude inter-agences sur le VIH des femmes a été créée en août 1993 pour étudier l’impact et la progression de l’infection à VIH chez les femmes. Le WIHS recrute des femmes séropositives et séronégatives.
(2) : L’étude de cohorte multicentrique sur le VIH est une étude de cohorte en cours impliquant plus de 6 000 hommes, y compris ceux infectés par le VIH, ainsi que les hommes séronégatifs. Le MACS possède quatre sites principaux : Baltimore, Pittsburgh, Los Angeles et Chicago.

 

Source :  Libération

Contestable en matière de sécurité, le projet de centralisation des données de santé des Français est inconciliable avec le respect des droits à la protection des informations personnelles, alertent des associations, personnalités publiques, syndicats des secteurs de la santé et de la défense des libertés.

Tribune.Voté fin mars 2019 dans le cadre de la loi santé et faisant suite aux annonces présidentielles, il a été décidé de mettre en œuvre un Big Brother médical : le Health Data Hub. Cette plateforme visant à centraliser l’ensemble des données de santé de plus de 67 millions de personnes veut faire avancer la recherche en santé. Déjà contestable au regard des risques en matière de sécurité, cette centralisation de l’ensemble des données de santé de la population française est inconciliable avec le respect des droits à la protection des données personnelles. En effet, l’hébergement des données du Health Data Hub repose sur le géant du numérique Microsoft, une société soumise au droit américain. Dans un courrier du 19 novembre dernier, le ministre de la Santé lui-même a reconnu que cette solution n’était pas viable. Et pour cause !

Petit rappel des faits. Dans une affaire récente portée devant la Cour de justice de l’Union européenne contre Facebook, le juge a reconnu que le droit américain ne protégeait pas les données personnelles des Européens. Risque d’accès massif aux données par les services de renseignement américains, absence d’autorité indépendante pour contrôler ces accès, défaut de droits opposables pour les citoyens, cette décision rend illicite les transferts de données vers les Etats-Unis. Suite à cette décision, Facebook a même fait pression sur l’Union européenne en menaçant d’arrêter ses services d’ici la fin de l’année.

Intérêts commerciaux et politiques

Les implications de cette décision pour les données de santé hébergées sur des clouds américains, comme le Health Data Hub, sont colossales ! Pour rappel, les données de santé constituent les informations les plus sensibles et intimes, protégées par le secret médical. Dans ce cadre, plusieurs associations et organisations voulaient obtenir l’arrêt immédiat du stockage et du traitement des données de plus de 67 millions de personnes au sein du Health Data Hub. Le 13 octobre, après plusieurs recours en urgence et un avis historique de la Cnil considérant cette solution comme néfaste, le Conseil d’Etat a considéré que le Health Data Hub ne protégeait pas les données de santé contre les intrusions du gouvernement américain. De façon critiquable, il a cependant admis que le projet pouvait prospérer dans le cadre de la lutte contre le Covid-19.

En réaction, le 19 novembre, le ministre de la Santé, Olivier Véran, a lui aussi reconnu ces risques, tout en promettant le retrait de Microsoft mais dans un délai de deux ans ! Deux ans. Le temps pour les données, pourtant couvertes par le secret médical, d’être bradées ou accaparées par des intérêts commerciaux ou politiques. Le temps pour des accords transnationaux de permettre une régularisation des transferts des données vers les Etats-Unis, alors que les droits opposables sont d’ores et déjà ineffectifs au Health Data Hub. Le temps d’oublier les enjeux de sécurité autour des données de santé et de perdre la confiance des patients. Le temps que la réversibilité de la solution soit techniquement impossible ou financièrement trop coûteuse. La réversibilité en informatique désigne la possibilité, pour un client ayant sous-traité son exploitation à un infogérant, de récupérer ses données à l’issue d’un contrat. Le temps de faire croire que, face à l’urgence liée au Covid-19, d’autres alternatives à Microsoft n’étaient pas possibles.

Autonomie numérique

Cela serait un affront à la recherche médicale que de penser qu’elle a attendu le Health Data Hub pour lutter contre le Covid-19. Des plateformes techniques efficaces existent. Les acteurs institutionnels de la santé développent déjà des plateformes d’analyse sécurisées répondant aux besoins des chercheurs. En leur sein, des centaines de projets de recherche sont en cours, y compris sur le Covid-19. Ils développent des approches décentralisatrices qui garantissent localement le lien de confiance avec les patients.

D’autres, comme le Centre d’accès sécurisé aux données (CASD), conçoivent des solutions matérielles (hardware) pour renforcer la sécurité de bout en bout. Ces plateformes, pour la plupart centrées sur le logiciel libre et loin des intérêts extra-européens, sont protectrices des données hébergées. Leur développement est la troisième voie européenne pour l’autonomie numérique de la prochaine décennie. Nous sommes pour le développement de la recherche, et pour garder la confiance des patients, ayons foi en notre capacité à inventer et à créer.

Deux ans. Le temps pourtant opportun et nécessaire pour repenser la gouvernance du projet du Health Data Hub avec la société civile. La gouvernance doit être séparée des problématiques d’hébergement des données. Le Health Data Hub doit se limiter à sa mission historique : être un organe de régulation de l’accès aux données. Pour l’ensemble de ces raisons, nous demandons une refonte structurelle du projet Health Data Hub ainsi que le retrait immédiat de Microsoft Azure.

Signataires : Syndicat de la médecine générale (SMG) ; Syndicat national des jeunes médecins généralistes (SNJMG) ; Union française pour une médecine libre (UFML) ; Fédération des médecins de France (FMF) ; Intersyndicale nationale des internes (Isni) ; Association Constances ; Actions Traitements ; Les ActupienNEs ; Collectif Bas les masques ; Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament (OTMeds) ; Fédération SUD santé sociaux ; Union fédérale médecins, ingénieurs, cadres, techniciens (UFMICT) CGT ; Syndicat national des journalistes (SNJ) ; Maison des lanceurs d’alerte ; Nothing2Hide ; Sciences citoyennes ; April, promouvoir et défendre le logiciel libre ; la Quadrature du Net (LQDN) ; le Mouton numérique ; le Mouvement ; Marie Citrini, représentante des usagers de l’AP-HP ; Didier Sicard, professeur émérite de médecine à l’université Paris-Descartes, ancien président du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) ; Israël Nisand, professeur émérite à l’Université de Strasbourg ; Jean-Paul Hamon, président d’honneur de la Fédération des médecins de France (FMF) ; Anne Gervais, hépatologue, membre du Collectif inter-hôpitaux ; Sophie Crozier, neurologue, membre du Comité consultatif national d’éthique (CCNE), membre du Collectif inter-hôpitaux ; Karim Khelfaoui, médecin généraliste ; Franck Ehooman, anesthésiste-réanimateur ; Michel Heisert, gynécologue-obstétricien ; Laurent Mauduit, journaliste, cofondateur de Mediapart ; Bernard Fallery, professeur émérite, Université de Montpellier ; Antoine Deltour, lanceur d’alerte Luxleaks ; Christiane Féral-Schuhl, présidente du Conseil national des barreaux (CNB) ; Sophie Ferry Bouillon, membre du Conseil national des barreaux (CNB) ; Nathalie Martial-Braz, professeure de droit privé, université Paris-Descartes ; Sabrina Calvo, autrice, collectif Zanzibar ; Stuart Calvo, éditrice, collectif Zanzibar ; Alain Damasio, auteur, collectif Zanzibar.

InterHop est une association d’ingénieurs en informatique, médecins et juristes. Elle entend développer des communs numériques en santé, c’est-à-dire des outils alternatifs, libres et sécurisés en e-santé.

Source : Mayotte Hebdo

Aujourd’hui âgée d’une cinquantaine d’années, Asma*, mère de trois enfants, a découvert sa séropositivité alors qu’elle n’avait pas 25 ans. Elle est devenue, de fait, l’un des premiers patients atteints du VIH à Mayotte. Pour elle, la maladie était réservée aux personnes aux mœurs que nombreux désigneraient comme légères. Mais sa première prise de risque a été celle de trop. Elle raconte. 

De son histoire, Asma* n’en livrera que les grandes lignes. Cette mère de famille a été dépistée séropositive 25 ans plus tôt et pourtant, aujourd’hui encore, elle tait sa maladie à la plupart de ses proches. “Pour moi, le VIH, ça n’arrivait qu’aux gens qui faisaient des bêtises”, souffle-t-elle. “J’étais vierge avant de rencontrer mon mari et je ne me suis jamais droguée. Ça ne pouvait pas tomber sur moi, je n’avais même pas eu le temps de goûter tout ce que la vie avait à me donner…”

À l’aube de sa vingtaine et au lendemain de son mariage et de son premier accouchement, un médecin conseille vivement à Asma de se faire dépister du VIH. En cause : son mari, malade, et évacué à La Réunion pour y suivre une batterie de tests sérologiques, vient de découvrir sa séropositivité. Pourtant, l’examen de la jeune mère, lui, s’avère être négatif. “On m’a conseillé de me refaire dépister quelques mois plus tard”, se souvient-elle. Finalement, la réponse tombe comme un couperet : elle n’a pas 25 ans, et Asma découvre qu’elle est porteuse du VIH. 

S’habituer à vivre avec le VIH

“J’étais tellement choquée d’apprendre la nouvelle que les mois qui ont suivi, j’ai refait plusieurs tests en changeant mon prénom pour vérifier les résultats. Je n’arrivais pas à l’accepter.” Pourtant, sa prise en charge médicale s’organise immédiatement. “J’ai été suivie par un médecin du CHM de Mamoudzou dès le début, j’ai été bien accompagnée”, reconnaît la désormais quinquagénaire.

Les premiers mois sont, pour elle, les plus difficiles à passer. Plusieurs traitements successifs lui sont prescrits, afin de déterminer celui qui se révèle être le plus efficace sur son organisme. “J’ai dû prendre beaucoup de comprimés par jour, parfois jusqu’à six ou huit avant de me coucher.” Asma perd le sommeil, l’appétit. Mais si elle ne s’alimente pas correctement, son médecin peut lui demander d’interrompre son traitement. Alors pas question d’abandonner. Et ses efforts payent. “Aujourd’hui, on a trouvé ce qui fonctionne sur moi, je n’ai plus de symptômes et j’ai même l’impression de vivre normalement”, sourit-elle. 

Petit à petit, la vie d’Asma reprend son cours. Elle et son conjoint décident même d’avoir un deuxième enfant, puis un troisième. “Mes grossesses ont été très suivies, mes enfants ont été dépistés et nous savons qu’ils vont bien, ils n’ont pas le VIH.” Aujourd’hui, une prise en charge dès la grossesse permet de réduire considérablement le risque de transmission de la mère à l’enfant : en France, moins de 1% des enfants nés de parents séropositifs sont porteurs du virus. À condition que celui-ci soit dépisté à temps chez celui et celle qui lui donneront la vie. “Mais depuis, je n’ai pas eu d’autres enfants, parce que la peur est toujours là”, reprend Asma, dont la charge virale n’est, à ce jour, pas devenue indétectable. “J’ai espoir qu’un jour ça soit le cas, ça peut toujours arriver. Mais moi, je ne me sens plus malade.”

À quelques exceptions près. Les premières années qui ont suivies son dépistage, la jeune femme garde le silence. Parce que nombreux, encore, sont les clichés qui entourent le VIH et les personnes qui vivent avec. Au bout de dix ans, elle “craque”, lorsque son père, gravement malade, menace de mourir. “J’ai porté ce fardeau pendant trop longtemps, je n’arrivais plus à le porter.” Elle le met dans la confidence, puis en parle à sa sœur. Et les premières réactions ne se font pas attendre. “On m’a dit que je mentais, on m’a demandé de montrer des tests, des ordonnances à mon nom pour prouver que c’était vrai. Personne ne comprenait que ça puisse tomber sur moi.” Finalement, la nouvelle fait son chemin dans l’entourage d’Asma. Bien que nombre de ses amis et membres de sa famille ignorent encore qu’elle est l’un des premiers cas de séropositivité à travers l’île.

* Le prénom a été modifié

Retrouvez gratuitement l’intégralité de notre dossier sur le Sida dans le dernier numéro de Mayotte Hebdo, disponible sur notre site. 

Des dépistages rapides, gratuits et anonymes 

Des dépistages de toutes les infections sexuellement transmissibles gratuits et anonymes – donc ouverts à tous les publics – sont proposés au CHM. Nariké M’sada propose également des dépistages rapides, également gratuits et anonymes, du VIH uniquement, dans ses locaux à Cavani. Ils peuvent être réalisés sans rendez-vous les lundis et mercredis (de 14h à 17h) et les samedis de 9h à 12h. Il est également possible de prendre rendez-vous en dehors de ces créneaux au 0269 62 69 73. Enfin, il est toujours possible de se faire dépister au laboratoire privé, avec une ordonnance. 

Un bus de dépistages bientôt sur les routes 

« Un programme de santé publique au service de la population de Mayotte ». D’ici avril 2021, Nariké M’Sada et ses partenaires, dont les laboratoires et le CHM, devraient mettre en service le « Bus prévention santé ». Ce centre de dépistage mobile tout équipé sillonnera toute l’île et permettra ainsi de faire reculer les inégalités liées aux déplacements et à l’éloignement des structures compétentes, le plus souvent situées à Mamoudzou. Le personnel médical à bord mènera ainsi des opérations de prévention et sensibilisation auprès d’un public le plus large possible. « Les dépistages proposés seront gratuits, anonymes et ouverts à tous, il n’y aura aucun profil prioritaire », commente Moncef Mouhoudhoire, directeur de Nariké M’Sada. Par souci de discrétion et de lutte contre la stigmatisation, le bus ne sera pas floqué aux couleurs de la lutte contre le Sida. Il sera possible d’y réaliser d’autres dépistages, comme celui du diabète ou du cancer infantile

Solène Peillard

Source : INFO VIH

Les bithérapies sont aujourd’hui proposées chez les patients bien contrôlés sur le plan virologique pour réduire la toxicité des traitements antirétroviraux sur le long terme. Plusieurs de ces bithérapies ont démontré la non-infériorité sur le plan de l’efficacité virologique.

Néanmoins, des questions se posent toujours sur l’activation immunitaire, l’échappement virologique dans certains compartiments comme celui du SNC et conduire à plus de troubles cognitifs. Cette étude rétrospective réalisée dans une cohorte neuro-sida italienne s’intéresse aux patients symptomatiques sur le plan neurologique ou neurocognitif justifiant la ponction lombaire, avec une charge virale contrôlée sous bithérapie (n= 19) ou trithérapie (n= 78) (<200 cp/ml depuis plus de 6 mois). Ces 2 groupes de traitement ont été comparés sur le contrôle virologique et les biomarqueurs de l’inflammation dans le LCR ainsi que sur les performances neurocognitives. Globalement, les caractéristiques étaient les suivantes : 75,3 % d’hommes, âge de 51 ans (46-58 ans), taux de  CD4 de 545 cellules/mm3 (349-735), durée médiane sous le traitement actuel de 18 mois (8-29), avec une durée de contrôle virologique  de 32 mois (14-94). Les deux groupes ne différaient pas en termes de diagnostics neurologiques associés au VIH, de caractéristiques démographiques et viro-immunologiques.

Les bithérapies étaient les suivantes: INI + IP/r (63,2%), INI + INNTI (15,8%), IP/r + INNTI (10,5%) et IP/r + INTI (10,5%). A l’inclusion, 10 patients (52,6%) avaient une CV plasmatique <20 cp / ml, et une CV plasmatique médiane à 33 cp / ml (22-690) pour les patients avec une CV au-dessus du seuil. La  durée médiane de la bithérapie était de 20 (12-60) mois, et de 27 mois (16-44) pour le traitement précédent. Les patients sous bithérapie présentaient un peu plus de virémie faible que les patients sous trithérapie (15,8% versus 3,8%) et une tendance à une proportion plus faible de CV < 20 cp/ml (78,9% vs 92,3%). Le score de pénétration-efficacité du SNC adapté de S Letendre était significativement plus faible sous bithérapie : 6 (5-6) que sous trithérapie : 7 (6-8) p= 0,02.

La CV dans le LCR inférieure au seuil  ne différait pas entre les groupes : 14 sous bithérapie (73,7 %) et 61 sous trithérapie (78,2 %). Pour les patients avec une CV détectable dans le LCR, le niveau était de 120 (45-182) vs 54 cp/ml (43-77). La prévalence de l’échec virologique dans le LCR était similaire entre les 2 groupes : 4 cas en bithérapie (21,1%) et 15 cas en trithérapie (19.2%). Les tests neurocognitifs réalisés chez 63 patients (64,9 %) n’étaient pas différents, comme pour les biomarqueurs permettant d’analyser la réponse humorale intrathécale, l’inflammation, l’activation des monocytes/macrophages (cellularité, protéinorachie, néopterine), l’intégrité de la barrière hémato-encéphalique, l’astrocytose, les lésions neuronales et les plaques d’amylose. Bien que la différence n’ait pas été statistiquement significative, les résultats sur l’altération de l’intégrité de la barrière hémato-encéphalique (5,6% vs 21,9%) posent la question d’une toxicité antirétrovirale.

Ces données montrent que chez des patients contrôlés, présentant des troubles neurologiques, la bithérapie est aussi efficace et sans plus de risque que la trithérapie. L’efficacité virologique durable observée dans le sang pourrait restaurer le système immunitaire et préserver des possibles altérations du SNC. L’interprétation doit cependant rester prudente avant de généraliser car les bithérapies utilisées dans cette étude comprennent en majorité des IP.

Dr Laurence Morand-Joubert

Références

  • Dual antiretroviral therapies are effective and safe regimens in the central nervous system of neurologically symptomatic people living with HIV | AIDS . 2020 Nov 1;34(13):1899-1906.

Source : Le Monde

Pour lire la suite de l’article, se rendre sur : Le Monde

Source : LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN

Tirer les enseignements de la crise et pérenniser ses effets positifs. Comme pour exorciser le mal-être ambiant, c’est l’exercice auquel se plient les acteurs de la santé depuis quelques semaines. Le forum du bon usage des médicaments, qui s’est tenu le 26 novembre, n’y a pas échappé, en particulier lors de la table ronde « Garantir l’accès à un traitement en situation de pénurie ».

Premier constat d’Éric Baseilhac, vice-président de l’Association bon usage du médicament (ABUM) et directeur accès, économie et export au LEEM : malgré les fortes craintes, « nous avons évité la pénurie grâce à la mobilisation de tous les acteurs, via des actions préventives et palliatives ».

Mais la crise a aussi révélé la situation de dépendance pharmaceutique de la France à des pays lointains. Sur le terrain, l’anxiété face aux tensions d’approvisionnement a atteint son apogée avec les produits utilisés en réanimation. Une situation finalement sous contrôle grâce « aux échanges productifs entre les professionnels de santé, à travers les sociétés savantes, et les autorités de tutelle », à la mise en place d’un « contingentement intelligent », à la recherche de solutions alternatives, et à l’adaptation à la situation de crise, énumère Pierre Albaladejo, vice-président de la Société française d’anesthésie et de réanimation (SFAR) Mais, prévient-il, il faut différencier ce qui est acceptable en temps de crise mais ne doit pas se poursuivre au-delà et ce qui peut être pérennisé ou amélioré.

Ce que confirme Pascal Paubel, pharmacien hospitalier et vice-président de l’Agence générale des équipements et produits de santé (AGEPS) de l’AP-HP. « Il reste dans nos pharmacies des médicaments étiquetés en chinois qui sont difficilement utilisables aujourd’hui. » Pour lui, la clé pour garantir l’accès aux traitements pendant la première vague repose sur la capacité d’adaptation des équipes hospitalières, des industriels et des autorités sanitaires. Il s’agit maintenant de répondre aux ruptures et tensions d’approvisionnement, « révélées par la crise mais qui existent depuis des années, en travaillant à la relocalisation de médicaments ».

Agilité sanitaire

Plutôt que de parler de souveraineté sanitaire, Jacques Zagury, directeur exécutif santé publique, des politiques et de la communication de MSD, préfère évoquer « l’agilité sanitaire » et la recherche d’une indépendance non pas nationale mais européenne. « Cette indépendance ne peut concerner tous les médicaments, il faut définir ceux sur lesquels nous devons porter nos efforts. » Une définition réclamée de longue date par les industriels qui refusent de s’appuyer sur la liste des médicaments d’intérêt thérapeutique majeur (MITM), trop vaste (40 % de la pharmacopée), et proposent d’établir une liste de médicaments d’intérêt sanitaire et stratégique (MISS), c’est-à-dire ceux pour lesquels une pénurie entraîne un risque vital et immédiat pour des patients souffrant d’une pathologie grave et sans alternative thérapeutique (5 à 10 % de la pharmacopée). C’est l’un des points sur lesquels achoppent les discussions sur l’obligation de stockage de 4 mois, dans l’espace européen, des MITM. Mais pas seulement. « Nous avons notifié un texte à l’Europe sur la sécurisation de stocks de MITM qui connaît quelques difficultés, car entrent en contradiction la sécurité de l’approvisionnement et la liberté d’entreprise », remarque François Bruneaux, adjoint à la sous-direction de la politique des produits de santé et de la qualité des pratiques et des soins à la Direction générale de la santé (DGS).

Recherche et innovation

Outre la définition des médicaments à prioriser, Jacques Zagury appelle à l’aboutissement d’une cartographie des sources d’approvisionnement, à un conditionnement européen unique, à l’arrêt des notices pour les médicaments hospitaliers et au renforcement du dialogue entre toutes les parties prenantes face aux ruptures de stock. Ces propositions rencontrent l’assentiment de la cancérologue et députée européenne Véronique Trillet Lenoir (LREM), qui réfléchit aux moyens de l’Europe pour « attirer les industriels qui ont quitté le sol européen ». Elle imagine notamment la possibilité d’aides d’État autorisées par l’Union européenne, la promotion des incitations de la Commission européenne à travers les PIIEC ou projets importants d’intérêt européen commun et le déploiement d’un écosystème favorable à la recherche et à l’innovation. Car en matière de relocalisation, tout reste à faire.

Mélanie Mazière

 

Source : Medscape

France— La plus forte demande en vaccins contre la grippe cette année a généré des pénuries dans de nombreuses pharmacies. Pour y faire face, le gouvernement a constitué pour la première fois un stock d’État de plus de 2 millions de doses de vaccins importés. Ce stock a commencé à être distribué, dans un premier temps pour les EHPAD et les établissements de santé, puis pour les personnes en ville disposant d’un bon de vaccination

Une année particulière

Atteindre une bonne couverture vaccinale contre la grippe est particulièrement important cette année, afin de ne pas surcharger le système de santé déjà débordé par la pandémie liée au SARS-CoV-2 et d’éviter les co-infections grippe-COVID-19. Les Français ont compris cet enjeu et sont bien plus nombreux qu’habituellement à vouloir se faire vacciner. Afin de gérer les stocks de vaccins et d’assurer en priorité la vaccination des personnes les plus susceptibles de faire une forme grave de grippe ou de la transmettre à des personnes fragiles, les vaccins sont pour l’instant réservés aux :

  • Personnes ciblées par les recommandations vaccinales contre la grippe,
  • Professionnels de santé libéraux,
  • Professionnels des établissements de santé et du champ médico-social.

Après plus d’un mois de campagne de vaccination, on constate que la priorisation des populations cibles est bien respectée. Cependant, l’ensemble des doses pré-commandées, par les officines et par les établissements de santé ou médico-sociaux, ont été livrées et elles devaient être presque toutes dispensées à la fin du mois de novembre, a indiqué le gouvernement[1]. Pour sa part, l’Union syndicale des pharmaciens d’officine (USPO) alertait déjà d’une pénurie de vaccins contre la grippe dans les officines début novembre. Le stock constitué pour la première fois cette année par l’État, de plus de 2 millions de doses de vaccins, est donc plus que bienvenu.

À quoi sert un stock d’État ?

Les pharmaciens d’officine se fournissent directement en vaccins contre la grippe auprès des laboratoires, en passant commande au printemps pour l’hiver suivant. Face à la situation exceptionnelle que nous vivons, une plus forte demande était prévisible cette année. L’État a donc commandé son propre stock de vaccins afin de compenser les insuffisances du canal d’approvisionnement habituel des officines, indique un communiqué du ministère.

Quels vaccins ont été stockés ?

Les vaccins stockés par l’État proviennent de marchés étrangers :

  • Fluzone® HD : vaccin tétravalent hautement dosé indiqué chez les personnes âgées de 65 ans et plus. Importé des USA, il est conditionné en boîtes de 10 doses sans aiguille.
  • Vaxigrip® Tetra : vaccin quadrivalent à dose standard importé de Finland, conditionné en boîtes de 10 doses.
  • Influsplit® Tetra (équivalent du vaccin Fluarix® Tetra) : vaccin quadrivalent à dose standard initialement destiné au marché allemand, conditionné en boîtes de 10 doses.
  • Fluenz® Tetra : vaccin quadrivalent en suspension pour pulvérisation nasale réservé aux enfants de 2 à 17 ans ciblés par les recommandations vaccinales en vigueur.

Fanny Le Brun