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Source : Libération

La recherche-développement dans le biomédical dépend beaucoup d’investissements publics ou caritatifs, attribués notamment à des entreprises privées. La pandémie nous offre l’occasion de revoir ce système opaque.

Tribune. Les annonces de financements publics destinés à la recherche et au développement pour endiguer l’épidémie de Covid-19 se multiplient depuis le début de la crise. Sans conditions claires et sans transparence, ces investissements ne peuvent pourtant pas tenir les promesses d’accessibilité qui les accompagnent.

Lundi 8 mai, la conférence des donateurs organisée par la présidente de la Commission européenne et plusieurs dirigeants·es européens·nes a récolté 7,4 milliards d’euros de fonds pour la recherche et le développement de médicaments, vaccins et outils de diagnostics contre le Covid-19. Nombre de chef·fe·s d’Etat participant à la conférence ont, à cette occasion, rappelé la nécessité d’une réponse mondiale et coordonnée à la crise sanitaire, mais également de garantir l’accès universel à de futurs produits de santé sûrs et efficaces.

Emmanuel Macron, coprésident de la conférence, y a notamment annoncé une contribution française de 500 millions d’euros et s’est engagé à faire du futur vaccin «un bien public mondial». Cette initiative n’est pas une première dans le cadre de la pandémie : la Coalition pour les innovations et la préparation des épidémies (Cepi) a reçu 690 millions d’euros de fonds publics mondiaux destinés à financer des projets de vaccins, dont celui de l’Institut Pasteur en lien avec l’entreprise Themis et l’université de Pittsburgh.

L’ampleur de ces mobilisations illustre un constat déjà éprouvé par nombre de chercheur·euse·s et d’associations de patient·e·s : une part importante de la recherche et du développement dans le domaine biomédical repose sur des investissements publics ou caritatifs. Or pour assurer des outils médicaux accessibles universellement et à un coût abordable comme l’appellent de leurs vœux de nombreux dirigeants mondiaux, les investissements dont ils sont issus doivent plus que jamais être conditionnés et répondre à un impératif de transparence. Ce second constat, a priori trivial, est pourtant loin de correspondre à un usage courant en France ou en Europe.

Des investissements publics opaques

Depuis le début de la crise sanitaire, le gouvernement a annoncé débloquer 58 millions d’euros de fonds destinés à la recherche et au développement pour endiguer l’épidémie de Covid-19. En l’état, les informations rendues publiques ne permettent pas de déterminer si ces investissements profiteront plutôt aux acteurs publics ou privés impliqués dans le domaine de l’innovation biomédicale. Or sans conditions claires, les résultats d’une recherche fondamentale menée par des établissements publics et financée par l’Etat pourraient bénéficier sans contrepartie aux firmes pharmaceutiques qui souvent en rachètent les droits, développent le candidat et le commercialisent le cas échéant.

Par ailleurs, le secteur privé bénéficie déjà d’abondantes aides publiques à la recherche et au développement, à l’emploi et à la politique industrielle dans le domaine de la santé. Qu’il s’agisse de financements directs ou d’exonérations d’impôts et de cotisations, ces aides françaises et européennes parfois cumulatives sont accessibles aux entreprises sans restriction de taille et sans mécanismes de transparence. En 2017, on estime que près de 500 millions d’euros ont bénéficié à l’industrie pharmaceutique au titre du seul crédit d’impôt recherche.

Il n’existe encore aucune quantification du montant total des investissements publics alloués chaque année en France à la recherche et au développement dans le domaine biomédical. Aucune traçabilité des investissements sur les politiques industrielles pharmaceutiques n’est disponible. Ces aides sont pourtant pleinement assimilées par des firmes financiarisées, qui les intègrent dans leurs modèles économiques comme une ressource disponible. Enfin, les produits finis issus de ces investissements publics sont souvent vendus à l’Etat au prix fort, sans garantie que ce dernier soit soutenable pour la solidarité nationale et les patients.

Le contexte appelle donc à repenser la doctrine économique et industrielle de la France concernant l’innovation médicale, l’accès et la disponibilité des produits de santé. Des initiatives ont déjà été engagées, comme celle d’Olivier Véran et Frédérique Vidal demandant l’accès libre et public aux publications et données issues de la recherche en lien avec l’épidémie de Covid-19 en France, mais elles demandent à être renforcées.

La transformation des pratiques

La transparence, la traçabilité des investissements publics dans la recherche et le développement, la mise en place de conditionnalités liées à ces investissements publics, les licences non exclusives pour les découvertes issues de la recherche publique sont à ce titre des garanties nécessaires pour assurer l’accessibilité aux meilleurs soins et la pérennité de notre système de santé. Elles impliquent que soit audité le système de financement de la recherche biomédicale pour prendre la mesure des investissements publics qui y convergent.

En complément, l’Etat dispose d’outils permettant la production massive et à bas coûts des traitements vitaux dans la lutte contre l’épidémie. Les licences obligatoires et autres flexibilités présentes dans le droit de la propriété intellectuelle (importations parallèles, limites à la protection des données) doivent être considérées pour assurer l’approvisionnement en produits indispensables et éviter la constitution de monopoles menaçant l’accessibilité universelle.

Une transformation des pratiques est plus que jamais nécessaire pour que l’allocation d’aides publiques permette une politique ambitieuse et globale de lutte contre l’épidémie, en réponse aux besoins de la population et non à la recherche de profits.

Signataires : Act Up Sud-Ouest, Act Up-Paris, Action Santé Mondiale, Actions Traitements, AFTOC, Aides, Amalyste, APF France Handicap, Dessine-moi un mouton, France Assos Santé, La Ligue contre le cancer, Médecins du Monde, Renaloo, Sol en Si, UAEM France, UFC-Que Choisir, Unapecle, Théau Brigand (Médecins du Monde, Cermes3), Catherine Bourgain (Inserm), Maurice Cassier (IFRIS CNRS), Nathalie Coutinet (CEPN-UMR CNRS 7234), Pierre-André Juven (CNRS – Cermes3), Fabienne Orsi (LPED-IRD).

Source : ansm.sante.fr

Nous mettons en garde toute personne souhaitant acheter des produits vendus sur Internet présentés comme pouvant guérir ou prévenir l’infection à COVID-19. Nous avons par exemple constaté des messages portant sur l’Artemisia annua et ses supposées vertus thérapeutiques. Au-delà d’un risque d’inefficacité, le recours à ce type de produits en automédication peut présenter un danger pour la santé.

Nous rappelons que la mise en vente de produits de santé sur Internet est strictement réglementée. Seul le circuit des pharmacies d’officine et de leurs sites Internet autorisés pour la vente en ligne de médicaments, régulièrement contrôlés par les autorités sanitaires, apportent des garanties sur les médicaments achetés. La qualité et la sécurité des médicaments achetés sur un site non autorisé ne sont pas garanties, des médicaments falsifiés (faux médicaments, ou faussement étiquetés) ou contrefaits peuvent y être proposés. Ces produits sont présents en grand nombre sur Internet [1] .

Il ne faut jamais acheter de produits à visée thérapeutique sur des sites non autorisés, au risque de mettre en danger sa santé  : les sites autorisés pour la vente en ligne de médicaments sont disponibles sur le site du Conseil de l’Ordre National des Pharmaciens.

Cette mise en garde concerne entre autres les produits à base de plantes, notamment la plante Artemisia annua  ou Armoise annuelle, qui est présentée comme une solution thérapeutique ou préventive de l’infection, sous forme de plante sèche, décoction, tisane ou gélules. Ces allégations sont fausses et dangereuses : elles pourraient retarder une prise en charge médicale nécessaire en cas d’infection confirmée. En effet, les produits à base d’Artemisia annua n’ont jusqu’alors pas fait la preuve de quelconques vertus thérapeutiques. Nous rappelons que cette plante a auparavant fait l’objet du même type de message sur de prétendues vertus thérapeutiques contre le paludisme. Là encore, la preuve de son efficacité n’a pas été démontrée et des personnes en ayant pris ont développé des formes graves de paludisme lors d’un séjour à l’étranger. Nous avions dans ce cadre interdit à plusieurs opérateurs de commercialiser des produits contenant de l’Artemisia annua en 2015 et 2017 [2] .

  Si vous souhaitez vous protéger contre le COVID-19, respectez les gestes barrières.

  Si vous pensez avoir des symptômes de la maladie, contactez votre médecin. De manière générale, nous recommandons aux patients d’éviter l’automédication devant tout symptôme évocateur d’une infection COVID-19 (toux, associée à de la fièvre, difficultés respiratoires, douleurs musculaires, perte de goût et/ou d’odorat).

  Si vous souhaitez acheter des médicaments en ligne en toute sécurité, consultez notre dossier [Vente en ligne de médicaments ].

 Pour en savoir plus sur les médicaments dans le contexte du COVID-19, consultez les réponses d’experts de la  Société française de pharmacologie et de thérapeutique

Lire aussi
  • Dossier COVID-19
  • [1] L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime qu’environ 50% des médicaments vendus sur Internet sont des médicaments falsifiés (médicaments contrefaits, médicaments non autorisés…).
  • [2] Décisions du  18/02/2015 ,  22/04/2015  et du  11/04/2017

Source : anrs.fr

Madame, Monsieur, Cher(e) collègue,

L’ANRS publie ce jour son rapport d’activité 2019 accessible dès à présent sur notre site web que je suis très heureux de pouvoir partager avec vous.

Aujourd’hui, nous mesurons combien la structuration en réseau de la recherche scientifique facilite la génération d’hypothèses, leur exploration et la production de nouvelles preuves, avec et pour les communautés. Ce principe fondateur de l’ANRS s’avère totalement d’actualité depuis que la pandémie de Covid19 balaye le monde et la France et il restera plus que jamais valable pour la recherche de l’après Covid19.

J’écrivais en février dernier, dans mon éditorial,  « La fin du sida » ne se décrète pas, et l’heure n’est donc pas à l’inventaire. D’abord parce que la fin de cette pandémie VIH/Sida nécessitera encore des efforts soutenus notamment en matière de recherche fondamentale et translationnelle… ». On pourrait bien sûr dire aujourd’hui la même chose du Covid-19.

Il y a trois mois, j’écrivais, toujours en ouverture de notre rapport d’activité 2019, « Les nombreuses problématiques de santé mondiale actuelles constituent un enjeu de recherche à part entière pour la France ». J’entrevoyais que l’expertise de l’agence était une force potentielle pour les nouvelles recherches qui s’avéreraient ainsi nécessaires tant en France que dans les pays à ressources limitées. Trois mois plus tard, je peux témoigner du plein engagement de nos équipes dans la phase de recherche particulièrement intense que nous vivons sur le Covid19, problématique de santé mondiale s’il en est.

Souhaitons que les mois à venir nous permettent de poser les bases d’une structuration plus marquée encore de la recherche française sur les pathologies émergentes, garantissant sa performance scientifique et son utilité pour la santé publique en toutes circonstances.

Pr François Dabis
Directeur de l’ANRS

Source : LeMonde.fr

Les structures de santé, aidées par des associations, ont pris des mesures pour assurer la continuité des soins, le dépistage du VIH et le soutien psychologique aux malades.

La boule au ventre, Marieme* s’est rendue au centre de traitement ambulatoire (CTA) de l’hôpital de Fann, à Dakar, pour récupérer trois mois de traitements antirétroviraux. « Je sais que les personnes vivant avec le VIH, comme moi, sont plus vulnérables au coronavirus », lâche la jeune mère de famille, élégantes boucles dorées aux oreilles. Depuis le premier cas de Covid-19 au Sénégal, le 2 mars, elle ne sort plus sans son masque, ses gants, son gel hydroalcoolique, et évite les transports collectifs. « Au début, j’avais même peur de rentrer à l’intérieur de l’hôpital », avoue celle qui craint « une deuxième infection ».

Marieme a été appelée par le personnel de santé du CTA, tout comme les 900 personnes qui avaient une consultation entre les mois de mars et de mai. « En plus de confirmer les rendez-vous, nous les avons surtout sensibilisés à ne pas rompre leurs traitements », explique la docteure Kiné Ndiaye, infectiologue au CTA. Les risques encourus sont l’augmentation de la charge virale et une immunodépression qui rend davantage vulnérable au Covid-19.

Au Sénégal, 42 000 personnes vivent avec le VIH, selon l’Onusida, mais seules la moitié d’entre elles connaissent leur statut sérologique. Le pays, qui compte 16 millions d’habitants, est régulièrement cité comme modèle pour sa lutte contre le sida : le nombre de nouvelles infections a baissé de 40 % entre 2010 et 2018. Mais l’irruption du Covid-19 fait planer une nouvelle menace. A la date du 15 mai, le Sénégal recensait 2 189 cas positifs au coronavirus, dont 23 décès.

Distribution de médicaments

A l’échelle de l’Afrique subsaharienne, le nombre de morts du sida risque de doubler à cause du coronavirus, selon l’ONU. Perturbation dans l’accès aux antirétroviraux, rupture d’accès aux soins, baisse de la prévention et de la fréquentation des centres de santé… Ces facteurs pourraient entraîner 500 000 décès supplémentaires sur une année.

Pourtant, les patients respectant leur traitement ne sont pas plus vulnérables au Covid-19 que le reste de la population, affirme Soukeyna Ndiaye, présidente du Réseau national des personnes vivant avec le VIH (RNP +). Fort de ce constat, le personnel hospitalier de Dakar s’est mis en ordre de marche, en collaboration avec des associations, dont l’Alliance nationale des communautés pour la santé (ANCS), leader dans la réponse contre le VIH au Sénégal.

La première mesure a été de donner automatiquement au moins trois mois d’antirétroviraux à tous les patients. La continuité des soins est ainsi assurée, sans nécessité de se déplacer. Et pour les patients de plus de 50 ans ou diabétiques, les 250 médiateurs de santé de l’ANCS sont allés distribuer en main propre les médicaments. « Les personnes fragiles doivent rester chez elles et éviter tout contact. C’est aussi mon rôle de les rassurer et d’assurer un accompagnement psychosocial », estime Zaccaria, un médiateur basé à l’hôpital de Fann.

A l’entrée des bâtiments bleu turquoise du CTA, un agent de sécurité prend la température des patients et leur demande d’utiliser le lave-mains mobile installé à l’ombre de grands arbres. « Nous avons tout de suite sécurisé les structures où nous suivons 1 412 patients, dont certains sont gravement immunodéprimés. Ils risquent de développer des formes graves du Covid-19 s’ils sont contaminés », s’inquiète la docteure Kiné Ndiaye.

Désormais, un maximum de dix consultations par jour a été fixé, contre une trentaine habituellement, pour éviter tout contact. « Nos partenaires nous ont donné des masques, du détergent et du gel hydroalcoolique. Les dotations du ministère de la santé n’étaient pas suffisantes », regrette l’infectiologue. Des mesures nécessaires alors que la structure de suivi des personnes vivant avec le VIH se trouve au milieu de l’hôpital, où sont hospitalisés des patients Covid-19.

Des centres de santé désertés

L’autre enjeu est de continuer de dépister, alors que les hôpitaux et centres de santé sont désertés, par crainte de contracter le coronavirus. Dans la salle d’attente pour le dépistage de l’hôpital de Fann, seules trois personnes sont assises sur les chaises en plastique.

« D’habitude, nous dépistons plus de 40 personnes par jour, contre une dizaine aujourd’hui, constate Kiné Ndiaye. C’est dangereux, car certains vont être diagnostiqués trop tard, une fois qu’ils consulteront leur médecin pour des symptômes sévères. » La situation inquiète aussi Soukeyna Ndiaye, du RNP + : « Certains ne connaissent pas leur statut sérologique et ne prennent pas de précautions supplémentaires face au coronavirus, alors qu’ils sont plus vulnérables sans le savoir. »

Ces carences risquent d’affecter les plus jeunes. Landry Tsague, spécialiste du VIH au bureau de l’Unicef pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale, rappelle qu’un quart des nouvelles infections dans la région sont déclarées chez les enfants. « Sept enfants sur dix n’ont pas accès aux antirétroviraux par manque de dépistage. La situation va empirer avec le Covid-19, faute de personnel et à cause des restrictions de déplacements et de rassemblements. Il va falloir rattraper le retard une fois sortis de la pandémie », anticipe le spécialiste.

L’autre défi, dit-il, est « le risque de dépression et de stress additionnel pour ceux qui n’ont plus de soutien psychosocial ». Au Sénégal, les activités communautaires de sensibilisation auprès des « populations clés » (professionnels du sexe, hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, usagers de drogue) sont à l’arrêt. Le seul appui reste le numéro vert de la ligne d’écoute téléphonique. « Elle est primordiale pour nos patients, assure Kiné Ndiaye. Mais nous recevons beaucoup d’appels concernant le coronavirus quand la ligne dédiée est saturée. »

Au niveau de l’ANCS, le soutien moral se fait par téléphone, mais aussi sur le terrain. « Nous avons distribué environs 400 kits contenant du riz, de l’huile et de l’eau de javel aux plus vulnérables », explique Massogui Thiandoum, volontaire de l’ANCS, pour qui la stabilité socio-économique permet une meilleure observance du traitement. « Nous mobilisons maintenant les fonds pour une deuxième distribution alimentaire », ajoute le militant.

* A sa demande, le prénom a été changé

Source : The Conversation France

« Je me suis dit que c’était une blague, je me suis demandé si c’était sérieux. » Un Nîmois de 38 ans témoigne dans le magazine Têtu le 14 avril 2020 suite au courrier homophobe (anonyme) qu’il a reçu, pointant que son homosexualité le rendait vulnérable au VIH et donc au coronavirus.

Les maladies infectieuses et la stigmatisation partagent une relation longue et problématique, en particulier lorsque les décès sont importants et le Covid-19 n’est pas une exception.

Cette attaque reflète le type de comportement discriminatoire et parfois criminel qui surgit en temps de crise à l’encontre des minorités, dans des périodes particulièrement anxiogènes. Or, la stigmatisation et les actes discriminatoires contre les minorités sexuelles (LGBTQ+), représentent aussi un obstacle à leurs suivis médicaux.

Violence et disparités dans l’accès aux soins

Souvent marginalisées et ostracisées, les minorités sexuelles subissent depuis de nombreuses années des discriminations liées, non seulement à leur sexualité mais aussi aux éventuelles pathologies qu’elles peuvent contracter, tel le VIH. Ces phénomènes engendrent des disparités dans l’accès, la qualité et la disponibilité des soins de santé.

La discrimination peut entraîner le refus pur et simple de fournir des soins, ou de subir des soins de mauvaise qualité et des traitements irrespectueux ou abusifs, entre autres. Plusieurs personnes LGBTQ+ ont déjà signalé, dans le cadre de la prise en charge médicale du VIH, avoir subi un refus de traitement et des violences verbales de la part du personnel soignant.

Les professionnels de santé peuvent aussi également avoir une mauvaise compréhension des besoins de santé spécifiques de ce groupe cible comme quoi par exemple ? comme les aptitudes et compétences médicales et culturelles spécifiques permettant l’amélioration de la sensibilité, de la réceptivité et de la prise en charge adaptée aux minorités sexuelles.

Les minorités sexuelles ont précédemment été accusées de plusieurs catastrophes, qu’elles soient d’origine humaine ou naturelle. Au début de l’épidémie de VIH, dans de nombreux pays, les homosexuels étaient fréquemment victimes d’abus, car ils étaient considérés comme responsables de la transmission du VIH.

Aussi, dans le contexte actuel de la pandémie de Covid-19 plusieurs rapports, évoqués par le Programme commun des Nations unies sur le VIH/sida, suggèrent que les personnes LGBTQ+ sont tenues pour responsables de ce fléau et qu’elles subissent une augmentation des actes discriminatoires.

De plus, en raison des restrictions de mouvements et des mesures de distanciation sociale en vigueur, les minorités sexuelles sont aussi confinées dans des environnements familiaux et communautaires parfois hostiles pouvant augmenter leur exposition à la violence et à la maltraitance. Elles peuvent également être victimes de violence y compris de la part de leurs partenaires sans pouvoir procéder à des suites légales par crainte de répercussions, exacerbant ainsi leurs problèmes de santé physique et mentale préexistants.

Les discriminations et la haine exacerbées

Il n’y a actuellement aucune preuve que les personnes vivant avec le VIH courent un risque accru d’acquérir le Covid-19 en raison de leur statut sérologique.

Mais, les fausses accusations et l’augmentation des actes de discrimination et de violence fondées sur l’orientation sexuelle peuvent augmenter les risques liés, non seulement au VIH, mais également au Covid-19 chez les minorités sexuelles. Le Covid-19 est pernicieux et est à la base de risques complexes, et bien que le virus ne fasse pas de discrimination, il est évident qu’il frappe les communautés marginalisées de nos sociétés de manière disproportionnée.

La crise actuelle risque d’être utilisée comme une nouvelle occasion par certains chefs religieux, politiciens et gouvernements hostiles, pour blâmer les minorités sexuelles, augmentant encore la haine populaire.

De telles déclarations, accusant une minorité d’une responsabilité dans cette pandémie, peuvent provoquer un sursaut de haine.

À titre d’exemple, un journal chrétien de la Corée du Sud, Kookmin Ilbo, a rapporté que les lieux visités par un homme nouvellement infecté par le coronavirus à Itaewon comprenaient un club gay. Le reportage a notamment reproché à l’homme et à ceux du club de mettre en danger la lutte du pays contre la pandémie et a déclenché un flot d’insultes homophobes sur les réseaux sociaux.

Impact sur les services VIH

Cette discrimination envers les minorités sexuelles se ressent également dans les services de santé VIH.

Ainsi, les programmes de prévention, axés sur les activités associatives tant en Haïti qu’en Belgique, destinés spécifiquement aux minorités sexuelles et tenant compte des relations potentiellement complexes entre la stigmatisation et les comportements sexuels à risque, ont été suspendus. Ces activités associatives et institutionnelles comprennent la sensibilisation, le conseil et le dépistage éventuel.

Dans certains pays où les discriminations à caractère homophobe sont courantes, les professionnels de soins de santé ne traitent pas les patients atteints du VIH de façon équitable stigmatisant les homosexuels. Les entretiens que j’ai menés il y a trois semaines avec des personnes LGBTQ+ en Haïti pour mes recherches doctorales ont montré notamment une exacerbation de ces comportements pendant la pandémie du Covid-19.

La confidentialité et la peur du dépistage et de recevoir un résultat positif restent et demeurent des préoccupations majeures. Ce qui contribue à un accès aux traitements plus incohérent et interrompu.

Ces minorités font également face à des défis économiques qui représentent une des conséquences de l’ostracisme, d’un soutien social limité, d’une éducation souvent interrompue et d’une réduction de leur capacité à gagner dignement leur vie. Le manque de soutien structurel est considéré comme un obstacle majeur à l’amélioration de l’accès aux soins.

Par ailleurs, les responsables de programmes VIH pour les homosexuels en Haïti que j’ai interviewé craignent que l’attention des chercheurs, des bailleurs de fonds et des programmes de financement se détournent de la lutte contre le VIH afin de prioriser la réponse mondiale pour soutenir la pandémie de Covid-19.

Cela aurait pour conséquence un retard dans les chaînes d’approvisionnement des produits destinés à la lutte contre le VIH, y compris la logistique et l’expédition.

Développer de meilleurs outils pour les minorités en temps de Covid-19

Les dirigeants politiques et religieux ont un rôle particulièrement influent pour assurer une réponse appropriée à la crise actuelle. Les restrictions des droits à la liberté personnelle et à la sécurité ne peuvent être imposées que dans des situations limitées, et doivent répondre à des directives claires et strictes dans le respect des normes internationales relatives aux droits humains. Mettre l’accent sur la non-discrimination dans le maintien de l’ordre des mesures d’urgence est primordial.

Par ailleurs, il paraît urgent de développer des réponses innovantes au sein du système de santé pour que les minorités sexuelles, marginalisées et donc particulièrement vulnérables y aient accès au même titre que l’ensemble de la population. Par exemple, en favorisant les technologies pour recourir au soutien psychosocial, mieux suivre et retrouver les « perdus de vue » (ceux qui ratent leurs rendez-vous médicaux) et renforcer l’observance des traitements.

Comme l’a déclaré Winnie Byanyima, Directrice exécutive de l’ONUSIDA :

« Le VIH nous a appris que la violence, l’intimidation et la discrimination ne servent qu’à marginaliser davantage les plus vulnérables. Toute personne, indépendamment de son orientation sexuelle, de son identité de genre ou de son expression, a droit à la santé, à la sûreté et à la sécurité, sans exception. Le respect et la dignité sont plus que jamais nécessaires. »

Les pays doivent désormais trouver un équilibre entre la réponse directe à la pandémie de Covid-19 et le maintien des services de santé essentiels aux niveaux national, régional et local.

Source : lenouvelliste.com

Promoteurs Objectif Zéro SIDA (POZ), institution qui œuvre dans la lutte contre le VIH/SIDA, commémore un quart de siècle en pleine crise de coronavirus. Retour sur le parcours de cette institution qui a su sauver des vies et décontaminer des esprits pour faire comprendre la réalité multiforme de la maladie et l’inutilité de la stigmatisation.

L’épopée de POZ commence avec l’histoire de la lutte contre le SIDA en Haïti, à en croire Sabine Lustin, l’actuelle directrice exécutive. Celle-ci rejoint l’aventure en 2004 après avoir découvert la réalité des gens infectés par le sida à Fort-Liberté où elle évoluait en tant que pédiatre.  En effet, le Dr Eddy Génécé, qui nous a quittés à la suite des complications d’une maladie cardiovasculaire, est le père fondateur de l’institution dont l’objectif premier était de réduire l’impact du VIH dans la société haïtienne.  L’homme, dont l’immense portrait domine l’un des murs du bureau de la directrice, a été témoin du caractère sombre de la lutte contre le sida au début des années 90. À l’époque, les médicaments qui soulagent et augmentent l’espérance de vie n’étaient pas encore trouvés. Les scientifiques les plus chevronnés étaient attelés à la tâche, les résultats tardaient.  « L’accent était mis sur le support psychosocial, les soins palliatifs, les traitements pour les maladies opportunistes. On faisait du mieux que possible, mais on était conscient que cela ne suffisait pas pour détruire le virus », raconte Dr Lustin. Dr Marie Mercy Jean-Louis Zevallos, spécialiste en maladies infectieuses, monte dans la barque de POZ en 2002 d’abord en tant que responsable de projets pour aujourd’hui travailler comme directrice du Centre Espoir de POZ (CEPOZ) de Port-au-Prince.

Prendre les traitements à vie

Pour elle, l’an 2020 lui rappelle par bien des aspects les années 80-90 de la lutte.  On disait à l’époque en Haïti : « Se yon mò SIDA yo voye sou li. » Aujourd’hui, certains affirment « Kowonaviris pa tonbe sou moun nwa », déplore-t-elle. Un autre témoin des années où le sida n’était pas bien vécu est Lucson Brivard. Il arrive en tant que volontaire en 2008 pour devenir aujourd’hui le superviseur des pairs éducateurs, c’est-à-dire des sensibilisateurs qui sont engagés à accompagner des gens de leurs communautés respectives pour travailler personnellement dans le combat contre le VIH. « Moi, étant membre d’une des communautés clés frappées par le VIH, j’ai voulu pouvoir moi-même porter ma contribution, car à l’époque, la maladie était abordée avec fatalisme », témoigne l’homme qui est danseur, coach de zumba et maquilleur. Les ARV (anti-rétroviraux), les médicaments vont arriver au milieu des années 90. D’abord ils étaient à la portée que de ceux qui avaient beaucoup de moyens financiers. Quand on a commencé à les proposer autour de 2005 en Haïti, il fallait un suivi méticuleux des patients pour s’assurer qu’ils les prennent régulièrement et suivent la posologie astreignante. Le Dr Lustin regrette aujourd’hui que la prescription de ces médicaments ne s’était pas faite avec plus de rigueur et d’explications. « Les gens, quand ils constatent que ça a l’air d’aller mieux, abandonnent carrément le traitement ou prennent des libertés avec la prise des médicaments. Beaucoup de patients ne comprennent qu’ils doivent prendre les traitements à vie », souligne-t-elle. Depuis sa création en 1995, POZ n’a eu de cesse de dynamiser ses efforts pour améliorer la lutte contre ce qu’on désignait comme le mal du siècle dernier. En 1996, il a institué le Téléphone Bleu, c’était une hotline où les gens pouvaient librement se renseigner sur le sida. À l’époque, les appels se passaient surtout la nuit, selon la directrice.  En 1998, les groupes de support prennent naissance. On y retrouvait aussi bien des gens vivant avec le VIH que leurs proches, mais aussi des psychologues pour assurer la relation d’aide.  En 99, un réseau de journalistes haïtiens devant produire du contenu sur la maladie a vu le jour et c’est l’ancêtre de ce qui allait devenir par la suite CECOSIDA (Centre de Communication sur le Sida. En 2002, les églises, les directeurs de conscience sont conviés à rejoindre la lutte pour conjurer la croyance qui associait le sida à une punition divine.

Le succès de POZ en Haïti dans la réduction des stigmatisations

Pour l’institution, ces 25 premières années ont été assez fructueuses : selon l’équipe, 150 000 personnes ont découvert leur séropositivité ; on meurt de moins en moins des suites d’une contamination ; les gens savent qu’il y a une façon d’augmenter leur espérance de vie. Le plus grand succès de POZ demeure cependant d’avoir réussi à réduire la stigmatisation compacte et d’amener beaucoup de gens vers le traitement. Tout n’est pas rose dans cette aventure d’un quart de siècle. En ce qui concerne la stigmatisation, l’institution souffrait grandement de l’image, d’un mouroir pour personnes infectées dont on l’affublait. Pour y remédier, POZ a ouvert une clinique externe où d’autres spécialités comme la santé des femmes enceintes et les maladies infantiles étaient prises en compte.  La baisse des subventions émanant des bailleurs a été l’autre coup dur. « On a été victime de notre succès. On nous disait : vous avez sensibilisé beaucoup de gens ; les morts diminuent du fait des ARV ; la lutte n’est plus prioritaire. Le hic dans tout ça, c’est qu’on nous a imposé la réduction de la sensibilisation (prévention), ce qui est bien dangereux.  Un autre problème, beaucoup de nos PVIH sont très pauvres et ne peuvent travailler à cause des discriminations de certaines institutions à leur encontre. Ils vivent pratiquement de notre soutien social qui dépend justement de ces subventions qui diminuent » explique Dr Lustin.   POZ compte une centaine d’employés répartis entre l’administration et l’équipe technique de CEPOZ. Les centres se retrouvent à Port-au-Prince, au Cap-Haïtien et à Montrouis. Celui de Port-au-Prince, autrefois, était logé à la rue Tertulien Guilbaud, pour ensuite être rapatrié au local du bureau central à Delmas. Dr Zevallos, la directrice de cette entité de POZ, est une infatigable meneuse de troupe qui ne ménage pas ses efforts. « Je commence mon travail à 7 h 30 du matin et je m’assure que les gens ne souffrent pas en attendant un médecin dans notre espace », témoigne-t-elle.  Lors du rendez-vous pour l’entretien avec Le Nouvelliste, elle était carrément au four et au moulin. Quand elle ne saisit pas les données sur son ordinateur, elle fait le va-et-vient pour parler aux patients sur les mesures à prendre contre la Covid-19. Elle parle d’ailleurs des efforts de POZ pour contribuer à la sensibilisation des personnes vivant avec le VIH qui figurent parmi les gens les plus à risque par rapport à cette pandémie.  À l’entrée de l’institution, on exige le port du masque pour y avoir accès ; la distanciation physique est visiblement respectée sur les bancs. Le Dr Lustin confie, pour sa part, que POZ est en train de réclamer un droit de regard sur le confinement des PVVIH en référence aux droits humains.

POZ continue de se battre pour une vie meilleure pour tous en Haïti

À 25 ans, l’institution se fixe une ambition un peu plus globale qui se formule en cette phrase qu’on retrouve sur l’une des portes de l’institution qui donne sur une cour remplie de bougainvilliers : « Contribuer à la santé des familles haïtiennes en général, la santé infantile, la santé sexuelle et reproductive, la lutte contre les IST/Sida, en particulier dans le cadre d’un partenariat public/privé ».  Lucson, le pair éducateur, tout en se réjouissant du fait que la communauté à laquelle il appartient a pu être prise en compte dans la lutte contre le VIH formule le vœu que ce combat pour la santé pour tous auquel tout le personnel en général de POZ souscrit, soit gagné. Pas de célébration ce 17 mai qui est aussi la journée internationale de la lutte contre l’Homophobie (IDAHOT) et également la journée Mémoriale Sida à la chandelle du VIH dont POZ et le PNLS sont en charge en Haïti.  Le souhait est de célébrer les 25 ans avant la fin de l’année quand le déconfinement sera total.  Un livre relatant cette histoire fascinante de combats et de réponses à la lutte contre le VIH/SIDA en Haïti est en phase de préparation pour marquer l’année de jubilé. En attendant, POZ continue de se battre pour une vie meilleure pour tous les Haïtiens et Haïtiennes, de se battre contre les stigmatisations et pour les traitements. La Covid-19 est un abcès sur un clou qu’il faut aussi contenir en cette année du vingt-cinquième anniversaire de Promoteurs Objectif Zéro SIDA (POZ).