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source : Komitid

Comment accompagner les usagers de drogues en contexte sexuel, ce qu’on appelle communément la pratique du « chemsex » dans ce contexte de confinement ? Komitid fait le point.

Komitid continue son état des lieux de la communauté LGBT+ face au Covid-19. Après avoir interrogé les établissements, les associations et les travailleuses du sexe, aujourd’hui focus sur ceux qui accompagnent les usagers de drogues en contexte sexuel, ce qu’on appelle communément la pratique du « chemsex ».

La crainte du sevrage forcé

Pour Fred Bladou, en charge de la réduction des risques liés au chemsex chez Aides, le constat est multiple : « La disponibilité des produits est encore là. D’un côté ça me rassure car, pour l’instant, aucun chemsexeur ne va se retrouver face à un sevrage forcé auquel il n’adhère pas et qui ne soit pas une démarche personnelle et éclairée. Les sevrages forcés, c’est une horreur ! C’est créateur d’un climat encore plus anxiogène et de syndrome dépressionnaires. Ma crainte c’est que des consommateurs réguliers se retrouvent du jour au lendemain sans produit. »

Un week-end pas comme les autres

Selon lui, les consignes officielles n’ont pas été suffisamment claires. « L’État n’a pas été clair les premiers jours et n’a pas communiqué au sujet des risques de transmission du Covid-19 liés à la sexualité. Personne n’a dit : “ à partir d’aujourd’hui arrêtez les rapports sexuels avec des partenaires occasionnels parce que vous ne connaissez rien d’eux ”. Donc, le premier week-end (14/15 mars), les mecs ont continué à faire du chemsex. Puis, comme tout le monde, ils ont compris la gravité de la situation et sont rentrés en confinement. Le vendredi, pour la majorité des consommateurs, marque le début de l’activité chemsex. Ils se sont bien rendus compte à partir du vendredi d’après (le 20 mars) que leur week-end n’allait pas être comme les autres. C’est à ce moment-là que l’angoisse et le craving (état de manque) ont commencé à survenir. »

Un contexte traumatique majeur

D’après Fred Bladou, certains ont commencé à changer leurs pratiques. « Certains consommateurs se sont dit : “ Génial, j’en avais marre du chemsex et je voulais arrêter donc j’en profite ”. Sauf que ça génère une angoisse. On arrête pas une consommation de stimulants qui est très active du jour au lendemain. Il faut se faire accompagner. Pour certains il faudrait un traitement médical avec des anxiolytiques pour gérer le stress et craving. »

Au moment de notre entretien (jeudi 26 mars), Fred Bladou n’a pas encore été informé de cas grave mais il est inquiet pour les jours ou semaines à venir : « On est dans un contexte traumatique majeur. Personne n’a jamais été contraint à rester enfermé chez lui sans aller travailler et sans pouvoir avoir une vie sociale et sexuelle. Je peux aisément supposer que cette situation va provoquer des crises d’angoisses et des dépressions chez ceux qui pratiquent le chemsex. »

« La majeure partie des chemsexeurs se retrouvent dans leur vie professionnelle au chômage technique, sans activité régulatrice. »

Se fixer des cadres structurants dans la journée

La crainte, c’est aussi le fait que beaucoup de chemesexeurs se retrouve sans activité. « La majeure partie des chemsexeurs se retrouvent dans leur vie professionnelle au chômage technique, sans activité régulatrice. Un des éléments qui permet de maitriser la consommation de drogue c’est le fait d’avoir une activité sociale ou professionnelle. C’est un très bon réducteur de risque. Quand tu sais que tu dois aller bosser lundi matin, le dimanche tu t’arrêtes. Aujourd’hui les gens n’ont plus d’impératif pour se lever le matin. Nous, on leur conseille justement de continuer à mettre le réveil le matin, de se doucher, de faire une petite activité sportive, de manger à heure fixe, de faire le ménage etc. pour ne pas dérégler leur horloge biologique et se fixer des cadres structurants dans la journée. »

La peur de la sur consommation

Fred Bladou ne cache pas son inquiétude. « Entre le contexte anxiogène, l’inactivité et la disponibilité des produits, j’ai vraiment peur que certains ne maitrisent plus leur consommation. Un des gros facteurs de risques dans l’usage de drogue c’est justement le fait de consommer seul car, dans ce cas, personne ne voit si vous allez bien. Je pense à celui qui va acheter 1,5 litre de GBL sur internet et qui va en consommer beaucoup plus que d’habitude. S’il est seul, personne le ne verra faire un G-Hole (perte de connaissance pouvant aller jusqu’au coma/décès) ».

« On est en train de réinventer notre métier »

Depuis novembre 2016, le Spot Beaumarchais, un centre de santé sexuelle communautaire à Paris, organise tous les mardis soirs le « Chillout Chemsex »,un groupe de parole et d’auto support pour les hommes gays/bis qui pratiquent le chemsex.

Stephan Verhnes, responsable du Spot, raconte à Komitid comment le Spot a décidé d’adapter son activité au temps du confinement : « On s’est vite rendu compte qu’il allait falloir adapter notre offre d’accompagnement pour venir en soutien aux personnes. Au Spot, on a toujours travaillé de visu, en face à face. On est en train de réinventer notre métier pour basculer du réel au virtuel. C’est complètement nouveau pour nous et c’est vraiment intéressant. »

Une nouvelle forme de réunion se met donc en place. « On vient de lancer un groupe de parole virtuel sous forme de visioconférence où chacun peut participer de chez soi en se connectant à une plateforme sécurisée. Les personnes n’auront pas forcément besoin d’activer la visio et pourront utiliser un pseudo. L’idée est qu’elles se sentent le plus à l’aise possible. »

Stephan explique avoir identifié deux profils de « chemsexeurs » et a lancé deux groupes avec des problématiques différentes :

  • ceux qui avaient arrêté de consommer ou qui étaient en réflexion sur leur consommation avant le confinement (visioconférence tous les mardis et vendredis de 15h à 16h30).
  • ceux qui consommaient toujours des produits en contexte sexuel avant le confinement (visioconférence tous les mardis et vendredis de 17h à 18h30).

Discussions cryptées et respect de la confidentialité

Stephan explique l’organisation de ces discussions : « On va partir de notre file active d’usagers qui sont déjà venus au Spot mais on a également fait un post avec les liens de connexion sur un groupe Facebook privé Info Chemsex (by Aides). » Vous pouvez rejoindre ce groupe privé en cliquant ici ).

Stephan rappelle les règles : « La modération sera très stricte avec rappel du cadre et des valeurs du Spot (bienveillance, non jugement, respect de la parole, confidentialité, etc.) et interdiction formelle d’enregistrer les discussions qui seront cryptées. »

Une ligne d’écoute et de soutien Whatsapp

Pour ceux qui préfèrent rester plus discrets et échanger par écrit, l’association Aides a également mis en place une adresse mail dédiée (chemsex[at]aides.org), ainsi qu’un numéro Whatsapp (07 62 93 22 29) gérée par Stéphan et Vincent Leclercq, un autre militant de Aides très investi dans l’accompagnement chemsex.

Stéphan a un dernier message à faire passer : « Chez Aides on est dans l’écoute et le non jugement. On accompagne toutes les personnes qui nous contactent, y compris celles qui continuent de consommer des produits et d’avoir des rapports sexuels. On n’est pas là pour les juger mais pour réfléchir avec elles sur la meilleure stratégie à avoir pour réduire les risques ».

source : Komitid

La France, comme la plupart des pays riches, dispose aujourd’hui de tous les outils nécessaires pour mettre fin à l’épidémie de VIH.

Un accès facilité au dépistage, une mise sous traitement systématique des personnes diagnostiquées séropositives (TasP) afin de contrôler rapidement la charge virale et ainsi casser la chaine des transmissions. Et le déploiement de la PrEP, le traitement préventif pour les personnes séronégatives les plus exposées au VIH.

L’activité sexuelle diminue fortement

C’est dans ce contexte préventif que le Covid-19 vient bousculer la dynamique de la transmission. Confinement oblige, l’activité sexuelle, hors couple exclusif, diminue fortement. Or, on le sait, les transmissions du VIH sont principalement du fait de rapports sexuels avec des personnes qui ignorent leur séropositivité et qui, sans accès à un traitement, transmettent le virus à leurs partenaires sans le savoir. C’est ce qu’on appelle l’épidémie non diagnostiquée, estimée à 25 000 personnes en France, dont une importante proposition d’hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH).

Quelles conséquences pourraient avoir le Covid-19 sur l’épidémie du VIH ? Est-ce que, mathématiquement, moins d’activité sexuelle équivaudrait à moins de transmission ? Quid de l’après confinement ?

« Les transmissions VIH seront limitées pendant la période de confinement »

Komitid a interrogé France Lert, Présidente de l’association Vers Paris sans sida, chercheuse réputée en santé publique et engagée depuis plus de 30 ans dans la lutte contre le VIH/sida : « Il est fort probable que les transmissions VIH seront limitées pendant la période de confinement. Je ne vois pas comment il pourrait en être autrement. Une bonne moitié des HSH (hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes) ont un partenaire stable mais une autre partie est habituée à avoir des partenaires multiples avec qui ils ne partagent pas un habitat. Donc le nombre de rencontres sexuelles va forcément baisser ».

Cependant France Lert est inquiète pour la période post confinement : « Comme après toutes les crises avec une dimension humaine dramatique il va y avoir un désir de vie, un désir de sexe, un désir de fête. Toutes les préventions ne seront certainement pas au rendez-vous pour des raisons psychologiques et sociologiques. »

Selon France Lert, la lutte contre le VIH risque de reculer dans les préoccupations et dans les financements. « Ce que je redoute particulièrement dans les mois à venir, confie-t-elle, c’est le manque de moyens humains et financier alloués à la lutte contre le VIH. Le coronavirus est un virus infectieux qui mobilise déjà les infectiologues et la recherche en biologie et maladie infectieuse. De fait, cela déplace l’intérêt pour le VIH vers un nouveau virus dont on ne sait pas grand-chose à ce jour. On ignore si cette pandémie va durer dans le temps ou si elle sera récurrente. »

« Des chercheurs ont déjà commencé à demander s’ils pouvaient basculer une partie des fonds destinés au VIH sur le Covid-19. »

France Lert pense qu’il faut dès à présent anticiper ce manque de moyens : « Nous devons inventer les moyens de maintenir le dispositif de santé sexuelle car les IST (infections sexuellement transmissibles) sont une porte d’entrée pour le VIH. La lutte contre le VIH va reculer dans les préoccupations et dans les financements. Des chercheurs ont déjà commencé à demander s’ils pouvaient basculer une partie des fonds destinés au VIH sur le Covid-19. C’est inévitable et face à ça il ne faut pas être dans une réaction négative, il va falloir avancer et innover ».

Pour les associations, il n’est pas question de baisser la garde durant cette période de confinement. Les premières actions arrivent déjà. Ainsi le 30 mars, le COREVIH Paca-Est a annoncé un service gratuit d’envoi d’auto-tests VIH à domicile.

Pour France Lert, c’est ce genre d’initiative qu’il va falloir développer pour maintenir la fameuse et efficace stratégie du « test and treat » : dépister les personnes les plus exposées au VIH et les mettre rapidement sous traitement (TasP pour les séropositifs et PrEP pour les séronégatifs).

« À Paris sans sida, explique-t-elle, nous réfléchissons à des solutions modernes et innovantes. Pousser la télémédecine, les auto-prélèvements à domicile, les dépistages IST sans ordonnance, sur le modèle “ au labo sans ordo ” actuellement en phase test dans les départements de Paris et des Alpes-Maritimes. »

Mais rien ne se fera sans les personnes concernées : « Il faut motiver les communautés les plus exposées au VIH et principalement les HSH et les femmes nées à l’étranger, pour qu’elles continuent à s’approprier la PrEP, le préservatif et le dépistage répété. Et avoir en face un système de santé qui soit efficace. On va avoir un très gros enjeu pour maintenir cette offre en santé sexuelle avec moins de moyens pour obtenir les mêmes résultats. Sans cela on risque de repartir en arrière. »

source : Legeneraliste.fr

Alors que depuis plusieurs jours, certains généralistes s’inquiètent de voir leurs cabinets désertés et appellent leurs patients à ne pas couper les ponts, la HAS encourage à aller au-devant des malades chroniques les plus vulnérables.

Saisie sur la question de la continuité des soins en période de Covid-19, l’institution vient de publier plusieurs fiches sur ce thème. Baptisées « réponses rapides », ces préconisations ont été conçues pour « apporter en urgence une réponse concrète, claire et scientifiquement étayée aux questions actuelles des professionnels de santé, des patients et de l’État ». Construites en collaboration avec les professionnels de santé et les associations de malades, « ces réponses rapides sont provisoires : elles seront actualisées dès que nécessaire et ne sont valables que durant l’épidémie de COVID-19 », précise la HAS.

L’une d’entre elles s’est penchée plus spécifiquement sur le suivi, pendant la période de confinement, des personnes non symptomatiques du COVID-19, atteintes de maladies chroniques somatiques.

Patients en ALD, personnes âgées à domicile, sujets polypathologiques, personnes atteintes de troubles psychopathologiques, ou encore patients ne suivant pas régulièrement leurs traitements : le document appelle à « repérer, contacter et renforcer la surveillance pour toutes les personnes dont la situation est plus à risque ». Ce repérage « se fait au sein de la patientèle, du cabinet médical, de la maison de santé ou même du territoire. Il peut être facilité par un travail en coordination avec les acteurs des collectivités territoriales (CCAS et mairies notamment) ».

Continuité du suivi

La HAS invite à rappeler aux patients « la nécessité de poursuivre la prise en charge de leur maladie », en soulignant notamment l’importance de ne pas interrompre un traitement de fond sans avis médical et d’assister aux consultations médicales nécessaires (en privilégiant la téléconsultation lorsque cela est possible) et le suivi paramédical le cas échéant.

La nécessité d’un renforcement du suivi, médical, infirmier ou par un autre professionnel (masseur-kinésithérapeute, psychologue, etc.) doit être évaluée.

Les patients doivent aussi être avertis du « risque plus élevé de forme grave du Covid-19 en cas de maladie chronique » et informés de la nécessité « d’alerter son médecin traitant en cas de symptômes inhabituels ».

La HAS appelle également à « s’assurer que le patient dispose des moyens de protections vis-à-vis du virus, de moyens de communication suffisants, des coordonnées des contacts médicaux et paramédicaux, des médicaments nécessaires » et à « encourager le maintien d’une bonne hygiène de vie et d’une activité physique a minima ».

Quatre autres « réponses rapides » portant sur la grossesse et le suivi post-natal des femmes et de leurs enfants ; la prise en charge des patients souffrant de pathologies psychiatriques en situation de confinement et la téléconsultation et le télésoin sont également disponibles sur le site de la HAS.

source : seronet

Alors que l’idée d’une fragilité supérieure des personnes vivant avec le VIH face au Covid-19 s’immisce dans l’opinion, une autre rumeur tente de faire son trou : les antirétroviraux protègeraient du coronavirus les personnes séropositives sous traitement. Sans fondement scientifique, elle ne doit pas se diffuser et faire renoncer aux seules certitudes actuelles : se confiner et se protéger via les gestes barrières.

On pouvait le craindre, mais le tâtonnement (logique) des scientifiques quant à un traitement efficace contre le Covid-19, laisse la place à certaines rumeurs sur des médicaments qui pourraient « protéger » du coronavirus. Parmi elles, l’idée que les trithérapies, antirétroviraux efficaces pour contrôler le VIH, seraient à même de prémunir d’une éventuelle contamination au Covid-19. Si la question de l’éventuelle vulnérabilité supérieure des personnes vivant avec le VIH peut encore être discutée, faute de recul médical suffisant dans cette épidémie, il faut être très clair quant à une prétendue protection des antirétroviraux : c’est non ! Les personnes séropositives sous traitement anti-VIH ne bénéficient pas d’un « bouclier viral » grâce à leur traitement, qui permet simplement de contrôler la charge virale et de maintenir les défenses immunitaires.

Mais pourquoi alors ? Bruno Spire, chercheur à l’Inserm et ancien président de AIDES, l’explique : « Les traitements anti-VIH ciblent spécifiquement certaines enzymes virales du VIH, pour une grande efficacité et ne pas provoquer des effets indésirables. À partir de là, sans aucune expérimentation, il est très peu probable d’affirmer qu’on est protégé contre le Covid-19. Il n’y a aucune raison de le supposer en l’absence de données ».

Kaletra la (seule) piste hypothétique

Seul le médicament anti-VIH Kaletra (ritonavir + lopinavir) est aujourd’hui à l’étude et pourrait avoir un effet. Cet inhibiteur de protéase pourrait avoir des similitudes dans son action contre certains composés du VIH et du Covid-19, qui le rendraient intéressant à investiguer. Mais à l’heure actuelle, c’est « de l’ordre du peut-être », alerte Bruno Spire. Le chercheur veut être catégorique, à l’aune des connaissances actuelles : « Ce n’est pas parce qu’il y a une piste sur le lopinavir/ritonavir que tous les antirétroviraux sont potentiellement protecteurs ou curatifs de l’infection de ce coronavirus ».

En attendant d’avoir plus d’éléments sur une fragilité des personnes vivant avec le VIH (cette réponse donnée par le journal Le Parisien est très claire) ou une hépatite virale, les mesures sanitaires et le confinement s’appliquent de la même façon aux personnes séropositives qu’à la population générale. « Les données sur les interactions entre VIH et Covid-19 sont quasi-inexistantes, les seules recommandations sont celles du grand public. On en saura plus à l’avenir, mais d’ici là, on applique la règle générale ».

Et Bruno Spire de résumer d’une phrase : « Il va falloir observer puis comparer les chiffres d’hospitalisation et de mortalité entre personnes séronégatives et séropositives sous traitement ».

source : seronet

En ces temps troublés, les parallèles avec l’histoire demeurent des prismes plus ou moins valables d’observation du présent. Revoir la pandémie du sida des années 80 et 90 a ses limites, mais elle permet malgré tout de mettre en relief des réflexes et des postures actuelles face au Covid-19 qui font écho au VIH. Pour Gabriel Girard, chercheur en sociologie et militant contre le sida en France et au Québec, l’histoire se répète (un peu)…

« Le Covid-19 qui affecte tous les continents et frappe tous les pays européens est la plus grave crise sanitaire qu’ait connue la France depuis un siècle. » La phrase d’Emmanuel Macron, prononcée le 12 mars dernier, a suscité de nombreux remous parmi les militants-es de la lutte contre le VIH/sida. L’affirmation est plus que maladroite, car elle semble établir une hiérarchie des pandémies et de leurs victimes. Elle traduit en tous les cas la rapidité avec laquelle la mémoire des épidémies s’efface. Outre le sida, plusieurs voix se sont d’ailleurs faites entendre pour rappeler des précédents pas si lointains, mais totalement occultés, comme la grippe de « Hong-Kong » à la fin des années 1960.

La pandémie du Covid-19 est singulière par de nombreux aspects. Elle est spectaculaire par son ampleur mondiale, par sa médiatisation, mais aussi par la somme d’incertitudes qu’elle véhicule. Si le manque de recul incite à la modestie et à la prudence dans les analyses « à chaud », on peut imaginer sans peine que ses conséquences sociales et politiques seront majeures. Mais pour singulière qu’elle apparaisse, cette épidémie n’échappe pas au travail de comparaison et de mise en perspective, opérations indispensables pour tenter d’en prendre la mesure.

Dans ce cadre, et malgré des limites évidentes — tant le mode de transmission, l’ampleur de la diffusion ou le profil des populations gravement atteintes diffèrent très largement — les comparaisons avec la pandémie de VIH/sida sont fréquentes. Elles sont tentantes tant les stratégies de santé publique mises en œuvre (ou envisagées) et leur vocabulaire se ressemblent : mesures de prévention et de précaution, dépistage, traitement, réduction de la charge virale, etc. Ces comparaisons trouvent d’autant plus d’écho que certains des acteurs-rices de premier plan de la lutte contre le coronavirus sont directement issus du monde du VIH. Citons notamment Jean-François Delfraissy, Yazdan Yazdanpanah et Laetitia Atlani-Duault (au sein du « comité scientifique »), ou encore Françoise Barré-Sinoussi (présidente du « Comité analyse recherche expertise »), sans oublier les responsables et les personnels des services de maladies infectieuses des hôpitaux, en première ligne dans la prise en charge des patients-es (entre autres Gilles Pialoux, Eric Caumes ou Karine Lacombe). Mais ces transferts de savoir-faire de la lutte contre le sida sont aussi visibles à, travers les discours critiques de la gestion de l’épidémie, à l’image de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament, animé par d’anciens activistes d’Act Up-Paris (1). L’expérience de la mobilisation face à une autre épidémie de grande ampleur est d’ailleurs régulièrement mise en avant par ces différents acteurs.

La lutte contre le sida est par ailleurs porteuse d’enseignements utiles, comme l’a bien souligné Françoise Barré-Sinoussi dans son interview au Monde du 24 mars. Dressant un parallèle avec les années 1980, elle pointe avec justesse la répétition des mêmes phénomènes de fausses nouvelles et d’emballements médiatiques, en particulier autour de l’attente d’une solution thérapeutique ou d’un vaccin, sur fond d’impuissance médicale. D’autres traits communs se dessinent. On pense, par exemple, à la nécessité pour nos sociétés de penser brutalement et collectivement le deuil et à la perte des êtres chers et d’inventer des rituels nouveaux par temps de crise sanitaire. On pense également à la bataille de la publicisation des chiffres, le décompte des diagnostics positifs et des morts devenant l’un des marqueurs clé de l’efficacité ou de l’échec des politiques de santé publique. Enfin, pour le Covid-19 comme pour le VIH, l’épidémie agit comme un révélateur puissant des inégalités sociales systémiques ou de l’absence de scrupules de l’industrie pharmaceutique.

Les dernières semaines soulignent trois autres leçons politiques des années sida, peut-être moins évidentes a priori.

Un risque venu « d’ailleurs »

La première concerne un enjeu pourtant central depuis le mois de janvier : la désignation de boucs-émissaires. Rien de surprenant à cela, on peut même parler là d’une réaction sociale très banale face à l’incertitude et au danger. Ce processus se manifeste de différentes manières. Par l’attribution de la responsabilité de la diffusion du virus à certaines populations d’abord : on l’a vu, les premiers échos de l’épidémie de Covid-19 en Chine ont servi de prétexte à de multiples réactions de racisme anti-asiatiques. La persévérance de Donald Trump à parler de « virus chinois » en demeure une expression flagrante (et affligeante). Des réactions souvent accompagnées d’un mépris culturel, stigmatisant, par exemple, la promiscuité homme/animal sur les marchés chinois. Renvoyer le virus à une menace venue d’ailleurs, ou à des pratiques perçues comme déviantes, est un classique des temps d’épidémie. Dans les premières années du sida, cet « ailleurs » a été géographique et moral : la maladie était vue comme venant des États-Unis et plus généralement des grandes villes, aux mœurs présumées « dissolues ». Mais ce processus a aussi consisté à désigner des catégories de la population accusées de propager le VIH dans la société, entrainant la stigmatisation de plusieurs communautés. Constater ces mécanismes de mise à l’index ne revient pas à les valider. Il s’agit surtout de les comprendre pour mieux y répondre. L’expérience du sida nous enseigne ainsi que ces réactions d’attribution de la responsabilité constituent des freins à l’adoption de mesures de précaution : puisque c’est le « virus des autres », à quoi bon s’en protéger ?

Une logique des « bons » et des « mauvais » comportements

La recherche de boucs-émissaires prend d’autres formes lorsque l’épidémie est là. Début mars, les mesures de précaution ont commencé à être publicisées en France. La « distanciation sociale » est apparue dans notre vie quotidienne sous la forme de recommandations simples : ne plus se faire la bise, ne plus se serrer la main, se laver les mains régulièrement, puis progressivement limiter les contacts — le confinement en étant l’expression la plus radicale. Très vite, des personnes et des groupes de personnes ont été accusés de ne pas appliquer correctement ou de transgresser ces recommandations. Un exemple parmi d’autres : durant la première semaine de confinement, les adeptes de la course à pied sont ainsi devenus les cibles de tous les reproches. Avec des arguments souvent moins sanitaires que moraux : pratiqué seul, le jogging présente en effet moins de risque pour le COVID-19 que d’aller faire ses courses au supermarché ! Mais en quelques jours, ces individus se sont retrouvés sous les feux de la critique, tour à tour dévalorisés (« sportifs du dimanche »), traités d’« irresponsables » ou d’« inconscients ». Au fond, à l’heure de la mobilisation générale contre le Covid-19, les joggeurs sont devenus l’archétype des « jouisseurs » individualistes, indifférents à la mobilisation collective face à la crise sanitaire.

La désignation d’individus ou de comportements « irresponsables » constitue une figure classique de la construction collective des discours de prévention. Ce mécanisme permet de tracer une frontière entre « bonnes » et « mauvaises » pratiques face au risque d’infection. Ce faisant, au-delà de l’enjeu sanitaire, s’y affirment des manières de faire société dans un contexte d’incertitude. Face au risque de transmission du VIH, les discours de prévention et de promotion du préservatif se sont largement appuyés sur ce procédé. Avec un écueil majeur, régulièrement fois pointé par les sciences sociales : la focalisation sur les pratiques individuelles occulte les conditions sociales de la prévention. Or l’expérience démontre que des pratiques considérées comme « inadaptées » du point de vue de la santé publique sont souvent parfaitement explicables si l’on prend en compte le contexte dans lequel elles interviennent.

Dans le cas du Covid-19, les contempteurs-rices du jogging se sont rarement interrogés sur les raisons qui poussent certains à courir : le besoin d’échapper à un logement exigu, la compensation d’une pratique sportive habituelle ou encore le besoin physiologique et psychologique de se dépenser. Ces différentes dimensions du rapport à l’espace et au corps sont socialement déterminées, et mériteraient d’être mieux comprises plutôt que traitées avec mépris. On pourrait évidemment poursuivre le raisonnement avec le traitement médiatique de la présupposée « mauvaise » application du confinement dans certains quartiers populaires. Dans ce cadre, mieux comprendre les réalités vécues permettrait d’adapter les mesures et de réduire les risques sanitaires avec (et non pas contre) les premiers concernés. Une voie qui s’oppose radicalement à la logique punitive, qu’elle prenne la forme d’amende ou d’incarcération. La lutte contre le sida a amplement démontré que la criminalisation des comportements est nuisible à la santé publique.

Une opportunité de réinventer la santé communautaire

L’épidémie de Covid-19 met à nu de manière brutale l’état des systèmes de santé des pays développés, fragilisés par des décennies de « réformes » néolibérales. L’« après » crise impliquera des débats et des décisions autour des orientations fondamentales de nos sociétés et de la définition de la santé comme notre bien commun. Ce contexte offre l’opportunité de repenser la place des usagers dans notre système de santé. Outre la question fondamentale de l’investissement de fonds publics vers les soins, la crise actuelle met, en effet, en évidence la nécessité d’une approche bottom-up, plus attentive aux besoins des populations. Dans ce cadre, l’héritage de la lutte contre le sida peut là aussi être éclairant, autour de la notion de santé communautaire. Si le terme « communauté » a mauvaise presse en France, il part ici d’un constat d’un constat simple : on gagne à envisager l’ancrage local de la santé, au niveau du voisinage, du quartier, du lieu de travail ou d’un environnement social et culturel partagé. Cela peut se traduire très concrètement : au cours des dernières semaines, on a, par exemple, redécouvert collectivement la nécessité de parler à ses voisins ou à ses proches pour identifier leurs besoins d’aide, en termes d’isolement social, d’accès à l’alimentation, aux soins, aux médicaments, etc. On peut déployer le même modèle à l’échelle d’enjeux ou d’identités communes, la mobilisation des communautés LGBT+ le démontre. Cette attention au « proche », à ceux et celles qui partagent notre réalité quotidienne, est au fondement même de la santé communautaire. C’est un modèle d’intervention et d’action qui valorise la connaissance fine des environnements de vie, pour mieux élaborer des réponses de santé adaptées et proportionnées, sans se substituer aux compétences des professionnel-le-s de santé, ni perdre de vue les enjeux systémiques.

Re-financer massivement l’hôpital et le système de santé est une nécessité impérieuse, que cette crise sanitaire souligne cruellement. Mais cette revendication ne s’oppose pas à un examen critique des modèles dominants, souvent très médicalo-centrés. C’est au contraire la condition pour refonder une approche pragmatique, inclusive et démocratique de la prévention, du dépistage et des soins. Les acteurs et actrices de la lutte contre le sida auront assurément un rôle à y jouer !Au terme de ces trois « leçons », rapidement brossées ici, il est difficile de proposer une conclusion. Il s’agit plutôt d’une étape de réflexion, à poursuivre avec d’autres.

 

Source : Blogs Mediapart

Dans une tribune parue aujourd’hui à l’initiative de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament, 113 personnalités et 32 organisations relaient l’inquiétude des soignant-es quant à la pénurie de médicaments vitaux, tests et équipements et appellent le gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires pour y répondre.

Communiqué de presse, Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament

Mardi 7 avril 2020 

Dans une tribune parue aujourd’hui à l’initiative de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament (OTMeds), 113 personnalités et 32 organisations relaient l’inquiétude des soignant-es quant à la pénurie de médicaments vitaux, tests et équipements et appellent le gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires pour y répondre.

Parmi les signataires, on compte notamment la romancière Annie Ernaux, l’ancien footballeur Vikash Dhorasoo, les acteurs Virginie Efira et Niels Schneider, les réalisateurs Catherine CorsiniJustine TrietAmandine Gay, Océan et Bertrand Tavernier, les producteurs Hugues CharbonneauRémi Grellety, Marie-Ange Luciani, le compositeur Bertrand Burgalat, les chanteurs Mouss et Hakim du groupe Zebda, les philosophes Cynthia Fleury, Emilie Hache et Mathieu Potte-Bonneville, l’historienne Fanny Gallot ou encore la politologue Françoise Vergès, le président de l’association pour le droit de mourir dans la dignité Jean-Luc Roméro, la directrice générale de Sidaction Florence Thune, le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez, la porte-parole de l’Union Syndicale Solidaires Cécile Gondard Lalanne, entre autres.

S’y rajoutent diverses organisations comme Coronavictimes (l’Association Française des Victimes, malades et Impactés du Coronavirus Covid-19), Act Up-Paris, Aides, la CGT Sanofi ou encore de nombreuses associations de victimes de scandales sanitaires.

La diversité de ces signatures, venues du monde artistique, littéraire, philosophique, universitaire, syndical, associatif, témoigne que les pénuries de médicaments vitaux, tests et équipements de protection mobilise la société dans son ensemble. Le texte concède que « si l’ampleur de l’épidémie de COVID-19 a pu prendre les autorités de cours, les pénuries actuelles témoignent surtout de problèmes dénoncés de longue date ; la privatisation et la délocalisation de la production des biens de santé. » Les signataires demandent les mesures d’urgence nécessaires comme : « une programmation des besoins, l’identification de l’origine des matières premières des médicaments et réactifs, la réquisition des lignes de production, la réaffectation des productions non essentielles aux produits vitaux, l’importation en urgence de composants aux producteurs disponibles, une coordination européenne ».

Nous espérons que le gouvernement saura entendre cet appel en soutien à ce qu’affrontent les soignant-es et les patient-es dans les services de réanimation. 

L’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament remercie chaleureusement l’ensemble des signataires pour leur mobilisation et ouvre cette tribune à toutes les signatures sur la plateforme Change.

La tribune sur la pénurie de médicaments, tests et équipements

Nous relayons l’alerte lancée par les soignant-es et les associations concernant la pénurie de matériel, de dépistage et de médicaments vitaux.

Le manque de masques ou de blouses de protection mettent en danger patients fragiles et personnels, soignant-e, technicien-nes, ménage, etc.  Le manque de dépistage empêche de connaître les personnes asymptomatiques, contribue à de nouvelles contaminations au sein de l’hôpital et retarde la prise en charge. Les pénuries de sédatifs ou d’antibiotiques amènent déjà à des utilisations parcimonieuses et une baisse de la qualité des soins. Sans ces médicaments, les patients vont mourir en souffrant, d’étouffement par exemple. Toute dignité sera piétinée.

Si l’ampleur de l’épidémie de COVID-19 a pu prendre les autorités de cours, les pénuries actuelles témoignent surtout de problèmes dénoncés de longue date ;la privatisation et la délocalisation de la production des biens de santé. Le gouvernement n’a pas pris les mesures d’urgence qui s’imposent : une programmation des besoins, l’identification de l’origine des matières premières des médicaments et réactifs, la réquisition des lignes de production, la réaffectation des productions non essentielles aux produits vitaux, l’importation en urgence de composants aux producteurs disponibles, une coordination européenne. Chaque jour qui passe aggrave la situation et menace les victimes de la pandémie.

Les personnalités signataires

  1. Aline Afanoukoé, journaliste et directrice artistique
  2. Amandine Gay, réalisatrice (« Ouvrir la voix »)
  3. Anne et Marine Rambach, scénaristes
  4. Annie Ernaux, écrivaine
  5. Artemisa Flores, docteure en sociologie, Cresppa-CNRS
  6. Arthur Harari, réalisateur
  7. Arthur Vuattoux, sociologue
  8. Aude Lalande, bibliothécaire, membre de la revue Vacarme
  9. Aurélie Olivier, directrice d’association culturelle
  10. Bertrand Burgalat, compositeur
  11. Bertrand Tavernier, réalisateur et producteur
  12. Blandine Destremeau, directrice de recherche CNRS, IRIS (UMR 8156), EHESS
  13. Callisto Mc Nulty, réalisatrice
  14. Carine Baxerres, anthropologue, chercheure à l’Institut de Recherche pour le Développement
  15. Caroline Mécary, avocate
  16. Catherine Corsini, réalisatrice (« La belle saison », « un amour impossible »)
  17. Cecil Lhuilier, activiste
  18. Cécile Gondard Lalanne, porte parole de l’Union syndicale Solidaires
  19. Céline Cantat, Sciences Po Paris
  20. Christian Andreo, directeur ADIXIO
  21. Christelle Dormoy-Rajramanan, maitresse de conférences en sociologie, Université de Lille (RECIFES/CRESPPA-CSU)
  22. Christophe Baticle, socio-anthropologue, UPJV Amiens
  23. Christophe Martet, journaliste, ancien président d’Act Up-Paris
  24. Cynthia Arra, directrice de casting, collaboratrice à la direction d’acteurs
  25. Cynthia Fleury, professeur au Conservatoire Nationales des Arts et Métiers (CNAM) et titulaire de la chaire humanité et santé
  26. Delphine Moreau, sociologue, enseignante chercheuse à l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique, Rennes
  27. Dimitry Dugeny, doctorant contractuel Cresppa-Labtop
  28. Elisa Rojas, Avocate
  29. Elisabeth Lebovici, historienne et critique d’art
  30. Elisabeth Perez, productrice (« La belle saison », « un amour impossible »)
  31. Emilie Hache, Maîtresse de conférences en philosophie, Université Paris Nanterre
  32. Emilie Notéris, autrice
  33. Emmanuelle Fillion, Sociologue à l’EHESP, membre du laboratoire ARENES (UMR 6051)
  34. Emmanuelle Huet-Mignaton, Présidente association AMAVEA
  35. Eric Labbé, DJ, activiste de la nuit
  36. Eve Plenel, directrice de Vers Paris Sans Sida
  37. Fabien Jobard, directeur de recherches au CNRS
  38. Fanny Chabrol, anthropologue
  39. Fanny Gallot, historienne, syndicaliste et militante féministe
  40. Florence Joshua, maîtresse de conférences en science politique à l’université Paris-Nanterre
  41. Florence Thune, directrice générale de Sidaction
  42. Florence Tissot, réalisatrice
  43. Francesco Correale, CNRS Ingénieur de recherche en analyses des sources historiques et culturelles UMR 7324 CITERES –TOURS
  44. Françoise Vergès, politologue militante
  45. Fred Bladou, activiste sida, administrateur de Gaïa
  46. Frédérique Aït-Touati, historienne et metteure en scène
  47. Gianfranco Rebucini, anthropologue, chargé de recherche au CNRS (EHESS, Paris)
  48. Guy Molinier, vice-président du COREVIH Occitanie
  49. Gwen Fauchois, activiste
  50. Hakim (Zebda, Motivés), chanteur
  51. Haud Guéguen, MCF en philosophie, Conservatoire National des Arts et Métiers (CNAM)
  52. Hourya Bentouhami, philosophe
  53. Hugues Charbonneau, producteur de films (« 120 battements par minute »)
  54. Ioana Popa, chercheur en sciences sociales, centre national de la recherche scientifique (CNRS)
  55. Isabelle Cambourakis, éditrice
  56. Isabelle Saint-Saëns, militante associative
  57. Isabelle Tillou, directrice de production
  58. Javiera Coussieu-Reyes, doctorante en sciences sociales, EHESS et Université Paris Nord
  59. Jean-Baptiste Soufron, avocat
  60. Jean-François Corty, médecin humanitaire
  61. Jean-Luc Gonneau, ancien conseiller de Paris, trésorier de France Terre d’Asile
  62. Jean-Luc Roméro-Michel, président de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité, Ambassadeur d’une « Ile-de-France sans sida »
  63. Jérôme Martin, co-fondateur de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament (OTMeds)
  64. Josselin Tricou, sociologue
  65. Justine Triet, réalisatrice (« Victoria », « Sibyl »)
  66. Odile Maurin, activiste anti-capacitisme, présidente d’Handi-social
  67. Laurence de Cock, historienne
  68. Lou Sirchis, chanteuse actrice compositrice de Toybloid
  69. Ludovic Chêne, infirmier, membre du COREVIH Ile-de-France
  70. Manon Ress, Union for Affordable Cancer Treatment (UACT)
  71. Marcela Fogaça Vieira, juriste spécialisée en propriété intellectuelle et chercheuse sur les politiques du médicament
  72. Marie Moncada, ATER à l’Université de Montpellier en science politique
  73. Marie-Ange Luciani, productrice de films (« 120 battements par minute »)
  74. Marie-Sohna Condé, comédienne
  75. Marine Martin, présidente de l’APESAC
  76. Martin Dust, Cabaret de Poussière
  77. Mata Gabin, comédienne
  78. Mathieu Potte-Bonneville, philosophe
  79. Mathieu Quet, chargé de recherche à l’IRD
  80. Maud’Amour
  81. Mélanie Gourarier, anthropologue
  82. Meoïn Hagège, Sociologue, Equipe CEpiA (Clinical Episdemiology and Ageing), IMRB,  U955 Inserm-Université Paris Est Créteil
  83. Mouss (Zebda, Motivés), chanteur
  84. Natasha Lehrer, écrivaine et traductrice littéraire
  85. Nicolas Terrail, Pharmacien Praticien Hospitalier
  86. Niels Schneider, acteur
  87. Océan, réalisateur et comédien
  88. Odile Fillot, chercheuse en études sociales des sciences biomédicales
  89. Olivia Campaignolle, designer graphique
  90. Pauline Londeix, co-fondatrice de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament
  91. Philippe Mangeot, ancien président d’Act Up-Paris
  92. Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT
  93. Philippe Pignarre, éditeur, ancien directeur de la communication dans l’industrie pharmaceutique
  94. Philippe Sopena, médecin généraliste
  95. Pierre Tévanian, philosophe
  96. Rachel Easterman-Ulmann, artiste
  97. Rémi Grellety, producteur de films (« I am not your negro »)
  98. Rose-Marie Lagrave, sociologue, directrice d’études EHESS, Paris
  99. Sabine Pakora, comédienne
  100. Sabrina Smati, Travailleuse sociale, Act Up Sud-Ouest
  101. Samira Guennif, économiste, CEPN, Université Sorbonne Paris Nord. Cdt. SG
  102. Sibylle Gollac, sociologue, chercheuse au CNRS
  103. Sophie Wahnich, historienne, directrice de recherche CNRS
  104. Sylvie Fainzang, anthropologue, Directrice de recherche à l’Inserm
  105. Sylvie Tissot, sociologue
  106. Thierry Bodin, CGT Sanofi
  107. Vanina Vignal, cinéaste
  108. Veronica Noseda, Militante de la lutte contre le sida
  109. Veronique Dimie, professeur ULB, BRuxelles, VD
  110. Vikash Dhorasoo, ancien footballeur
  111. Virginie Efira, actrice
  112. Yala Kisukidi, philosophe
  113. Yohan Bonnet, photographe

Les associations signataires

  1. Acceptess-T
  2. Act Up SO
  3. Act Up-Paris
  4. Actions Traitements
  5. AFMT
  6. Aides
  7. APESAC
  8. ARPS (Association réunionaise pour la Prévention des risques liés à la sexualité)
  9. AV5FU
  10. AVEC
  11. Avfin (aide aux victimes du finasteride)
  12. Bi’Cause
  13. CGT Sanofi
  14. Collectif Les Irrécupérables
  15. Coronavictimes (Association Française des Victimes, malades et Impactés du Coronavirus Covid-19)
  16. Dessine moi un mouton
  17. Diabète et Méchant
  18. E3M
  19. Enipse
  20. France MCS
  21. Le collectif Anti Sanofric
  22. Les Soeurs de la Perpétuelle Indulgence, Couvent de Paname
  23. Manifeste Médicaments Bien commun
  24. Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament
  25. Réseau 34 Addictologie
  26. REVAV
  27. Saint-Denis Ville au Cœur
  28. Sol en si
  29. UPGCS
  30. Vivre sans Thyroïde
  31. Women’s March Paris

 

source: institutcochin

Une étude publiée dans la revue Science Translational Medicine montre que les plaquettes de patients infectés par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) hébergent le VIH infectieux, malgré une thérapie antivirale combinée efficace supprimant la charge virale dans le sang. Chez ces patients, la présence de VIH dans les plaquettes est fortement corrélée à l’échec de rétablissement de réponse immune T CD4+. Les chercheurs montrent in vitro que les plaquettes peuvent propager le virus infectieux aux macrophages, l’un des réservoirs tissulaires du virus, établissant une voie alternative de dissémination du VIH vers ce type de réservoir.

Le rôle des plaquettes dans l’hémostase est bien connu, mais récemment, d’autres fonctions leurs ont été attribuées. Ainsi, les plaquettes interagissent avec des pathogènes, bactériens ou viraux. Il avait été récemment montré in vitro que les plaquettes capturaient le VIH. Les chercheurs démontrent ici la présence de VIH infectieux dans les plaquettes isolées de patients infectés par le VIH, malgré une suppression virale réussie par la thérapie antirétrovirale combinée (cART).

Reconstructions 3D d’images de plaquettes contenant du VIH. La moitié de la plaquette est montrée et les pointillés jaunes détourent la limite du plan de section. La surface et les membranes internes des plaquettes sont en vert (marquage par des anticorps anti-CD41), le virus dans des compartiments intra-plaquettaires est en rouge (marquage par des anticorps anti-p24).

Parmi les patients ayant une cART efficace sur la diminution de la charge virale, 20 à 30% sont en échec immunologique ne parvenant pas à rétablir une réponse immune correcte c’est à dire un nombre de cellules CD4+ après au moins 12 mois de traitement (dits patients non répondeurs immunologiques). Les chercheurs ont comparé les statuts immunologiques des patients ayant ou non du virus dans leurs plaquettes et montré que la présence de VIH infectieux dans les plaquettes des patients est en forte corrélation avec l’échec immunologique.

Les plaquettes sont issues des mégacaryocytes de la moelle. Les chercheurs ont également observé que les mégacaryocytes de patients en échec immunologique étaient infectés par le VIH ce qui expliquerait que les plaquettes qui en dérivent contiennent du virus. D’autre part, les plaquettes finissant leur vie en étant phagocytées par des macrophages, la transmission du VIH infectieux des plaquettes aux macrophages tissulaires a été testée in vitro : les plaquettes qui contiennent du VIH peuvent propager l’infection in vitro aux macrophages selon un processus qui peut être inhibé par l’agent thérapeutique antiplaquettaire, Abciximab.

En conclusion, cette étude met en lumière la physiopathologie du VIH en décrivant une autre voie de dissémination virale : les plaquettes jouent le rôle de transporteurs transitoires de virus infectieux, contribuant à entretenir le réservoir viral au niveau des macrophages tissulaires des patients sous traitement antirétroviral. La présence de plaquettes contenant le VIH est liée à une récupération immunologique médiocre chez les patients infectés par le VIH traités par des antirétroviraux. Elle constitue une cible potentielle pour la conception de stratégies thérapeutiques plus efficaces contre l’échec immunologique qu’on ne sait pas traiter à ce jour et sur la prévention des rechutes de l’infection.

 

source : tetu

Commercialisé par ViiV Healthcare, Dovato peut désormais être prescrit aux patients porteurs du VIH qui démarrent un traitement, avec un seul comprimé par jour.

C’est une étape importante vers la simplification des traitements contre le VIH. Le site Internet du magazine Décision & Stratégie Santé relève, dans un article publié jeudi 26 mars, la mise sur le marché français d’un nouveau médicament, Dovato. Commercialisé par la société pharmaceutique ViiV Healthcare, il associe deux inhibiteurs, le dolutégravir et la lamivudine.

D’après Philippe Hème, fondateur du blog Vi(h)vant, il s’agirait de la « première bithérapie autorisée en France ». Cependant, la première bithérapie existait déjà sous le nom de Juluca, qui associe dolutégravir et rilpivirine. Comme le précise un arrêté du ministère de la Santé et des Solidarités daté du 11 mars, ce médicament est réservé aux patients atteints du VIH âgés de plus de 12 ans, « naïfs de traitement », c’est-à-dire qui débutent un traitement, ou « pré-traités ».

Publicités ciblées

« Avec l’autorisation de mise sur le marché de Dovato, les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) peuvent, pour la première fois, démarrer leur traitement par une bithérapie en un seul comprimé à prendre une fois par jour et savent que son efficacité ne sera pas inférieure à celle d’une trithérapie malgré la diminution du nombre d’antirétroviraux », avait déclaré en juillet 2019, au moment de l’autorisation de mise sur le marché par la Commission européenne, la PDG de ViiV Healthcare, Deborah Waterhouse.

La prise de Dovato se limite à un comprimé par jour, et il est remboursable à 100 % par la Sécurité sociale. Cependant, Philippe Hème remarque avec amertume, photo à l’appui, que depuis qu’il s’est renseigné sur ce nouveau médicament, ses pages web sont « inondées de publicités pour Dovato »…

 

 

source : Le Parisien

Prix Nobel de médecine en 2008, l’éminente virologue préside le nouveau comité scientifique qu’Emmanuel Macron a mis en place pour lutter contre le Covid-19.

Françoise Barré-Sinoussi, prix Nobel 2008 et présidente du Sidaction, se réjouit de pouvoir à nouveau mettre son expérience au service « des autres ». LP/Aurélie Ladet

Le 27 mars 2020 à 17h34

Elle jugeait déjà qu’elle vivait une retraite « hyperactive ». A 72 ans, Françoise Barré-Sinoussi n’a toutefois pas hésité quand Emmanuel Macron lui a proposé de prendre la présidence du tout nouveau Comité analyse recherche et expertise (Care). Une nouvelle instance qui réunit, depuis le 24 mars, 12 chercheurs et médecins pour conseiller le gouvernement sur les traitements et les tests contre le coronavirus.

Voilà donc cette virologue à l’Institut Pasteur engagée dans une mission comme elle en a mené tant dans sa vie. Elle qui a eu le Prix Nobel de médecine en 2008 avec le professeur Luc Montagnier pour la découverte du virus du sida en 1983, et qui préside l’association Sidaction depuis 2017. « Elle a toujours donné sans compter à la science », soulignait Élisabeth Menu, directrice de recherche à l’Inserm, qui a longtemps travaillé avec elle.

Celle que les jeunes chercheurs de son équipe à l’Institut Pasteur surnommaient, affectueusement, « mamie Nobel », repart donc au combat, comme elle l’a fait durant des années dans sa lutte contre le VIH. « La santé est la priorité numéro un, aime-t-elle à dire. Parce que sans la santé, il n’y a pas de vie. »

« À mon âge, l’expérience peut servir aux autres »

Surtout, elle se réjouit de pouvoir, malgré sa retraite, se montrer de nouveau utile à son pays. En 2015, elle confiait au magazine d’information sur le sida Transversal avoir refusé les propositions des États-Unis ou d’Australie à poursuivre son activité. Elle affirmait préférer rester en France « parce que même si j’ai ce côté recherche sans frontières, je reste attachée à mon pays, j’y ai ma vie, des amis, des relations… Je n’ai pas envie de me couper de tout ce qui m’entoure dans la dernière période de ma vie. Quand on arrive à un certain âge, comme moi, notre expérience peut servir aux autres. Il faut donc leur en faire bénéficier. »

Une belle trajectoire pour celle qui, née à Paris (XIXe), a développé sa passion pour les sciences en observant les animaux et les insectes pendant de longues journées de vacances en Auvergne. « Je pense que c’est à partir de ces observations de la nature que cette passion pour le vivant est née », racontait-elle lors d’entretiens sur France Culture.

Confrontée au défi du Covid-19, Françoise Barré-Sinoussi ne cache pas son inquiétude « face à cette épidémie qui me rappelle en bien des points beaucoup de choses douloureuses des débuts de l’épidémie de VIH sida », comme elle l’indiquait au Monde, le 24 mars. Dans cette interview, elle s’en prend directement aux « dérives » qu’elle a constatées sur le sujet.

« Ne pas donner de faux espoirs »

À commencer par l’emballement autour des travaux de l’infectiologue Didier Raoult et de son traitement à l’hydroxychloroquine. « Ne donnons pas de faux espoirs », lance-t-elle en pointant « un traitement dont l’efficacité n’a pas été prouvée de façon rigoureuse ». Avant d’ajouter, forte de son expérience face au VIH : « Faisons très attention aux effets d’annonce ».

Une chose est certaine, Françoise Barré-Sinoussi mettra tout en œuvre pour obtenir des avancées dans sa mission. Face à la difficulté pour un chercheur de réussir sa carrière, elle indiquait, en 2018, également sur France Culture : « Le parcours du combattant, je suis prête à le refaire. Le jeu en vaut la chandelle. Quoi de plus satisfaisant en fin de carrière de voir qu’on a contribué quelque part à améliorer la vie de personnes qui, en plus, nous en sont reconnaissantes ? »

source : ANSM

L’ANSM a été alertée de difficultés d’accès dans les pharmacies en ville aux traitements Plaquenil (hydroxychloroquine) et Kaletra et son générique (lopinavir/ritonavir) pour les malades chroniques à qui ces médicaments sont destinés (VIH, lupus, polyarthrite rhumatoïde…).

A ce jour ni le Plaquenil ni le Kaletra n’ont d’indication dans la prise en charge du COVID-19 en ville (avis du Haut conseil de santé publique du 24/03/2020 ). Il n’y a donc aucune justification à leur prescription dans cette indication.

Aussi, conformément au décret du 25 mars 2020   (pris en application de « la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie du COVID-19″ ), nous demandons aux pharmaciens d’officine de ne délivrer ces médicaments que sur prescription médicale dans leurs indications habituelles, ceci afin de sécuriser leur accès aux patients qui en bénéficient pour leur traitement chronique :

Concernant la dispensation de Plaquenil (hydroxychloroquine) :

  • Plaquenil est inscrit sur la liste II des substances vénéneuses par arrêté du 13 janvier 2020, suite à une harmonisation avec les médicaments de la même classe. Vous ne devez les dispenser que sur présentation d’une ordonnance, même si les boîtes dont vous disposez ou que vous recevez ne sont pas encore étiquetées « liste II » (cadre vert)..
  • Honorez uniquement les prescriptions initiales émanant des rhumatologues, internistes, dermatologues, néphrologues, neurologues et pédiatres et les renouvellements d’ordonnance émanant de tout médecin ;
  • Respectez les mêmes modalités de prescription et de dispensation pour les préparations magistrales contenant cette substance active.

Concernant la dispensation de Kaletra ou de son générique (lopinavir/ritonavir) :

  • Honorez uniquement les prescriptions initiales hospitalières et les renouvellements d’ordonnance émanant de tout médecin, comme habituellement.

Afin de faciliter l’accès à ces médicaments, nous avons demandé aux laboratoires Sanofi Aventis, Abbvie et Mylan de livrer dès que possible et en quantités suffisantes, les grossistes-répartiteurs et les pharmacies en Plaquenil, Kaletra et son générique. Nous nous assurons auprès des laboratoires que les livraisons en pharmacies soient effectuées à hauteur des commandes habituelles.

Nous restons particulièrement attentifs à tout signalement d’indisponibilité qui pourrait être remonté.

Plus globalement, afin de garantir l’accès aux traitements pour les patients dans le contexte COVID-19, nous suivons quotidiennement et de façon très rapprochée l’état des stocks et des approvisionnements en lien étroit avec les laboratoires pharmaceutiques.

Cette surveillance concerne :

  • les médicaments dits d’intérêt thérapeutique majeur utilisés par les patients au quotidien pour la prise en charge de leurs pathologies chroniques ou aiguës ;
  • l’ensemble des traitements utilisés dans la prise en charge des patients COVID-19

Nous appelons à la responsabilité de chaque acteur de la chaîne de soins afin de garantir l’approvisionnement des traitements permettant la prise en charge des patients qui en ont ou en auront besoin.