Source : Le Parisien
40 ans de sida : «Je suis vivant, mais une partie de moi est morte», témoigne Maxime, rescapé de l’épidémie
Il y a 40 ans, le 5 juin 1981, les autorités médical
es américaines alertaient sur une maladie qui allait devenir le sida. Maxime Journiac a contracté le virus un an plus tard. Il a accepté de nous raconter quatre décennies de combat.
Ce Parisien a contracté le VIH « entre 1981 et 1983, aux Etats-Unis », dans la vingtaine, lorsqu’il fuyait un chagrin d’amour et découvrait la vie new-yorkaise en travaillant dans des restaurants friands de main-d’œuvre Frenchie. « À cette époque, on ne savait pas, les mots n’étaient pas dits, se souvient-il. C’était la mode du disco, on passait la nuit dans des clubs fabuleux et on terminait en after. C’était la fête, la fête, la fête. Je dormais peu. Je prenais de la drogue, mais jamais d’injections. Ça baisait à tire-larigot. On entendait des rumeurs, il y avait une maladie appelée le Grid (Gay related immune deficiency, immunodéficience liée à l’homosexualité). On en rigolait, en se disant qu’ils n’avaient rien trouvé de mieux que nous mettre une maladie sur le dos. »
Déjà, le 5 juin 1981, l’organisme américain de surveillance et prévention des maladies (CDC) a alerté dans l’anonymat sur une mystérieuse pneumonie qui frappe de jeunes homosexuels, puis dans les mois suivants les « 4H » : les héroïnomanes, les homosexuels, les Haïtiens et les hémophiles.
Des malades stigmatisés
Les années qui suivent sont « l’horreur », comme le répète le retraité aux cheveux courts, à la barbe soignée et aux lunettes à la mode. Ses trois amants ou amours américains successifs meurent entre 1986 et 1987. Trois âmes au milieu d’un océan de victimes ayant contracté les germes de la maladie « à une époque où on ne savait pas ».
« À la fin de mon séjour aux Etats-Unis, en 1992, j’ai parcouru mon carnet d’adresses et j’ai rayé 112 noms, livre-t-il. Des gens entre 25 et 35 ans. On était très beaux, joyeux, gais. Les gens mourraient dans la solitude. Les corps étaient récupérés par des familles dont ils étaient souvent coupés, avec l’interdiction pour les amants ou amis de venir aux obsèques. On était privés de deuil. »