Source : huffingtonpost.fr
La PrEP, traitement majoritairement utilisé par les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, peut être prise par tout le monde.
SIDACTION – Il se prend comme la pilule contraceptive, à heure fixe, chaque jour. Ce petit cachet, le Truvada (ou un générique), constitue un traitement préventif anti-VIH très efficace mais encore trop peu connu. Celui-si s’appelle la PrEP. Alors que le Sidaction commence ce vendredi 5 avril et que le mot d’ordre est “en 2019, n’oublions pas que le virus du sida est toujours là”, Le HuffPost fait le point sur ce médicament qui pourrait changer la donne.
Entièrement remboursé par la Sécu
La PrEP, ou Prophylaxie pré-exposition, a été autorisée en 2012 par l’administration américaine des denrées alimentaires et des médicaments (FDA) et est accessible en France depuis janvier 2016. Elle est entièrement remboursée par la Sécu.
À l’origine, le Truvada est l’une des molécules composant la tri-thérapie, à destination des personnes séropositives. Dans le cadre de la PrEP, il s’agit d’un médicament utilisé préventivement, c’est-à-dire avant même de contracter l’infection au VIH (s’il y a un risque de la contracter).
Il est important de préciser d’ores et déjà que la PrEP est utilisée uniquement pour prévenir le virus du sida; elle ne permet donc pas d’empêcher d’autres infections sexuellement transmissibles (IST).
À qui s’adresse ce traitement ?
Si le traitement s’adresse théoriquement à toutes les personnes séronégatives, les populations visées sont avant tout celles qui sont les plus exposées au risque d’infection par le VIH. À savoir cinq groupes d’individus: “les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes (HSH), les migrants, les usagers de drogues, les personnes trans et les travailleurs du sexe”, liste Aurélien Beaucamp, président de l’association Aides, contacté par Le HuffPost
En très grande majorité en France, ce sont bel et bien les HSH qui sont les premiers usagers de la PrEP: 95% des 11.000 personnes environ sous traitement, selon Aurélien Beaucamp. Pourtant, “tout le monde peut prendre la PrEP, c’est à chacun de voir en fonction de son envie de prévention”, souligne-t-il. Une personne hétérosexuelle ayant de multiples partenaires et soucieuse de sa santé sexuelle malgré les précautions prises, par exemple, pourrait très bien prendre la PrEP au même titre qu’un HSH.
À ce titre, dès 2015, l’OMS recommandait non plus seulement aux HSH mais aussi ”à toute personne exposée à un risque ‘substantiel’ d’infection par le VIH” de suivre ce traitement.
Comment prendre la PrEP ?
Il existe deux manières de suivre la PrEP. Soit en prenant, chaque jour à heure fixe, un comprimé. Dans ce cas, l’efficacité est atteinte au bout de sept jours. Soit lorsqu’on pense que l’on va avoir un rapport sexuel, en prenant deux cachets deux heures avant, puis deux autres après 24 et 48 heures. Cette seconde méthode est réservée aux HSH car “l’intégration de la molécule chez les femmes est plus lente”, note Aurélien Beaucamp. Une femme doit donc forcément suivre la PrEP de manière continue.
Dans tous les cas, un suivi médical trimestriel est nécessaire. À la fois pour s’assurer que le traitement est pris correctement, mais aussi pour vérifier que la personne n’a pas d’autres IST que le VIH, et que le corps supporte bien le traitement. En effet, les effets secondaires existent même s’ils sont rares. Nausées, diarrhées, altérations de la fonction rénale et de la densité minérale osseuse sont possibles. D’où l’importance du suivi tous les trois mois. D’autant plus que, la PrEP n’étant testée que depuis 2012 aux États-Unis, on ne connaît pas encore ses effets sur le corps à long terme. Mais pour Aurélien Beaucamp, “le seul gros risque est celui, déjà connu, sur les reins”. Pour l’instant, seul un médecin spécialisé (du VIH et des hépatites, ou infectiologue) peut effectuer la première prescription de Prep. Le médecin généraliste peut ensuite suivre le patient mais il ne peut pas être le premier à lui faire l’ordonnance de Truvada. “L’enjeu pour rendre la PrEP plus simple d’accès est que les médecins généralistes puissent effectuer la première prescription”, indique à ce sujet le président d’Aides.
De manière plus générale, le fait de ne cibler que certaines populations pourrait avoir tendance à les stigmatiser, alors qu’une communication à niveau égal pour toute la population française permettrait justement à la PrEP d’être mieux connue et donc suivie par n’importe quelle personne dite à risque.
L’efficacité de la PrEP est-elle avérée ?
Une étude diffusée en juillet 2018, réalisée par l’Agence nationale de recherche sur le sida (ANRS) et l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) auprès de 1435 volontaires sous PrEP, montrait qu’aucun cas d’infection par le VIH n’était constaté. Aucun effet indésirable chez l’un de ces patients n’a été remarqué non plus. “La PrEP constitue un outil de prévention hautement efficace contre le VIH au niveau individuel -de l’ordre de 99 % lorsqu’elle est parfaitement prise”, écrivaient plusieurs acteurs du VIH dans une tribune publiée sur Le HuffPost le 12 mars.
À plus long terme, la PrEP a aussi montré son efficacité sur le nombre de nouveaux cas de VIH. À San Francisco, ce nombre “a chuté de 49% entre 2012 (année où la PrEP a été autorisée aux États-Unis) et 2016. Mais aussi en France, à Nice, où l’on constate en 2018 une baisse de 40 % des nouvelles contaminations au VIH enregistrées. Cette baisse inédite et historique dans l’histoire du VIH est concomitante à la mise en œuvre de la PrEP dans cette ville en 2016”, écrivent-ils.
Les derniers chiffres diffusés sur le VIH ne permettent pas encore d’évaluer l’efficacité de la PrEP au niveau national. Ceux-ci, stables (6424 nouveaux cas) ne le permettent pas car ils datent de 2017, soit seulement un an après l’introduction du traitement en France.