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Source : NéonMag.fr

C’est à 17 ans que Théo* a appris qu’il avait contracté le virus du VIH. Il a fait le choix de le cacher, à sa famille et à son entourage. Pour NEON, il a accepté de nous expliquer son choix, 6 ans plus tard.

« J’étais au lycée, en terminale, quand je suis me suis rendu dans un centre AIDES pour faire un test. J’avais 17 ans, ma prof de français m’a accompagné car j’avais une relation privilégiée avec elle. » Théo se souvient de tout. L’intervenant de l’association qui lui pique le doigt avec une petite aiguille, dépose la goutte de sang dans la solution et lui demande. Les quelques minutes d’attente. Le résultat. Positif. Théo est bien porteur du VIH. Même si le jeune homme est dans une période d’exploration où il mène, de son propre aveu, «une sexualité débridée » et enchaine les coups d’un soir, il ne s’y attend pas. « Je me protégeais une fois sur deux à cette époque. Pour moi le VIH c’était un mirage. Je ne pensais pas que ça pouvait m’arriver. »

« J’ai demandé à ma prof de ne rien dire à mes parents, elle a respecté mon choix »

Les larmes ne montent pas immédiatement à l’annonce du résultat. « Tout simplement parce que je ne me rendais pas compte de ce qu’il m’arrivait. » Théo part directement à l’hôpital pour un bilan sanguin complet, il se retrouve nez-à-nez avec une affiche de prévention contre le SIDA. C’est à ce moment là qu’il craque. « Je réalise que je ne suis pas la personne qui regarde l’affiche, mais celle qui la vit. Il y a une différence. »

En sortant, sa professeur l’invite à boire un verre « J’ai pris un coca, elle un Martini. Elle hésitait, se demandait si je devais  dormir chez elle ou pas, si elle devait appeler mes parents (…) Je lui ai demandé de ne rien leur dire et elle a fini par accepter. Elle a respecté mon choix. » En rentrant chez lui ce soir là, Théo n’en parle pas. « Ils ne se sont rendus compte de rien. Mais je me disais que ça ne servait plus à rien de vivre, je pensais que j’allais crever jeune. »

« Un traitement, ce n’est pas anodin, il y a un temps d’adaptation pour le corps »

Le lycéen qu’il était fait alors le choix de ne pas se traiter immédiatement. Rattaché à la couverture sociale de ses parents, ils auraient vu qu’il était pris en charge pour une ALD (Affection Longue Durée). Et il y a toutes les responsabilités qu’il ne se sent pas prêt à assumer sur le moment. Trop jeune pour porter un tel poids sur ses épaules, se dit-il. « Un traitement, ce n’est pas anodin, il y a un temps d’adaptation pour le corps. Ce n’était pas possible de le commencer à ce moment là. » Il trouve néanmoins le courage d’aller en cours et de poursuivre ses études. « Je ne voulais pas rester dans mon lit à pleurer, c’était hors de question. J’ai continué à faire ma vie, dans le déni de la maladie, j’avais déjà mes problèmes de jeune lycéen à gérer. »

Même son médecin lui conseille d’attendre quelques mois avant de commencer son traitement, le temps de passer son baccalauréat. En attendant, le lycéen va même jusqu’à acheter une caisse métallique pour mettre ses analyses médicales et autres documents sensibles sous clef. Et s’assurer que ses parents ne puissent pas tomber dessus. À 20 ans, son bac en poche, Théo prend son indépendance. Il quitte le domicile familial et poursuit ses études dans une autre ville. Désormais majeur, il n’est plus rattaché à la sécurité sociale de ses parents et peut commencer ses soins sans que cela n’apparaisse sur leur relevé de prestation. « Déménager m’a permis de ne plus avoir à me cacher en permanence, mais ça n’a pas changé ma vie. » Un premier soulagement.

« Pour eux ce serait comme si on leur tirait une balle dans la tête de leur dire que leur seul enfant est homo et séropositif »

Aujourd’hui, Théo est âgé 24 ans. Après avoir essayé deux traitements qui n’étaient pas assez efficaces pour lui, il en a trouvé un qui lui convient malgré quelques effets secondaires. Mais il n’a toujours pas dit à sa famille qu’il est porteur du VIH. Il s’est fait la promesse de ne jamais leur avouer « C’est hors de question. Ça les briserait de le savoir. » Issu d’une famille conservatrice où l’homosexualité est considérée comme une « maladie », l’étudiant estime qu’aucun dialogue n’est possible. « Étant fils unique et ayant une famille qui a à cœur de construire un héritage familial, pour eux, ce serait comme si on leur tirait une balle dans la tête de leur dire que leur seul enfant est homo et séropositif. »

Mais si Théo tient à protéger ses parents de ce qu’il vit, il considère néanmoins qu’ils ont une part de responsabilité dans ce qui lui arrive aujourd’hui: « Comme je ne pouvais pas parler de sexualité avec eux parce que j’étais gay, je n’étais pas assez prévenu des risques du VIH. Tout découle de ça. » Le rejet de son homosexualité ? « Une erreur de parents. » Aux lourdes conséquences.

« Si j’avais pu m’épanouir dans ma sexualité et assumer mon homosexualité, je ne me serais pas autant négligé. »

Car c’est justement en voulant vivre ses premières expériences à l’abri du regard  de sa famille que Théo s’est mis en danger. Il était encore mineur. Des relations sexuelles avec des personnes qu’il venait à peine de rencontrer, « dans des lieux peu recommandables », à la va-vite. « Si j’avais pu m’épanouir dans ma sexualité et assumer mon homosexualité, je n’aurais pas eu à prendre autant de risques. Je ne me serais pas autant négligé. »

Avec le temps, Théo a finalement réussi à accepter de vivre avec la maladie et avoue « ne plus y penser tous les jours ». Mais ça n’a pas toujours été le cas : « Bien sûr, j’ai été énervé quand j’ai appris qu’on m’avait refilé le VIH. J’ai été en colère pendant plus d’un an et demi. » Désormais, il ne ressent plus de haine en pensant à la personne qui lui aurait transmis le virus, même s’il ne sait toujours pas de qui il s’agit. « J’étais consentant pour le faire sans préservatif, donc c’est aussi de ma faute. Nous étions deux à faire l’amour, nous sommes deux responsables. » Il estime aussi être « chanceux » car avec les progrès réalisés sur le virus du VIH il peut « vivre aussi longtemps qu’une personne séronégative. Mais avec un corps un peu plus fatigué que les autres. »

« Il y a des gens qui peuvent avoir peur de te faire la bise ou de boire dans le même verre que toi pensant qu’il vont chopper le sida »

Depuis, Théo se tait. Il y a la peur de briser sa famille, mais Théo redoute également le regard des gens. Le rejet. L’isolement social. « Il y a des gens qui peuvent avoir peur de te faire la bise ou de boire dans le même verre que toi en pensant qu’ils vont chopper le SIDA. Ça existe encore, des gens comme ça », se justifie-t-il. Même dans le milieu gay, pas question d’en parler. « Je n’ai pas envie qu’on parle dans mon dos. J’ai déjà entendu dans des soirées « Oh putain regarde y’a Sidaction qui arrive ! » à propos d’un séropositif. Moi, je ne veux pas vivre ça. » Alors il se tait. Quant à ses relations amoureuses, il tient à préciser : « J’ai toujours mis un point d’honneur à respecter mes partenaires, à ne jamais prendre de risque avec eux et à avoir une sexualité saine. »

Mais il reste catégorique: son choix de cacher sa séropositivité est définitif. Sa façon à lui de se protéger, tout en protégeant ceux qu’il aime.

*Le prénom a été modifié

Source : The Conversation

Le médicament est un bien, du point de vue juridique, et peut donc faire l’objet d’un droit de propriété. Dans certains cas, le droit de propriété des fabricants de médicaments entre en conflit avec le droit à l’accès aux traitements des malades.

C’est notamment le cas avec le VIH. Ce fléau affecte les couches les plus fragiles de la population, notamment dans les pays en développement. Actuellement, seul l’usage de médicaments antirétroviraux permet de traiter les personnes atteintes par le sida. Ce traitement s’effectue en général par le recours à une trithérapie, c’est-à-dire l’association de trois à quatre antirétroviraux.

La prise d’antirétroviraux diminue la charge virale et restaure l’immunité du patient. Le taux de mortalité recule considérablement, tout comme le risque de contamination d’autres individus par la personne malade. Dès que la prise du médicament est suspendue, la charge virale augmente à nouveau, avec pour corollaire celle des symptômes et des risques de contamination.

Le développement des antirétroviraux, l’un des plus rapides dans l’histoire de la médecine

Le développement des antirétroviraux a été l’un des plus rapides de l’histoire de la médecine. Leur mise sur le marché a permis de freiner la propagation du VIH et de transformer une maladie certainement mortelle en une maladie probablement chronique. Mais la recherche pharmaceutique se révèle en général longue, coûteuse et incertaine. Pour rentrer dans ses frais, l’entreprise ayant produit ces médicaments a donc recours aux droits de propriété intellectuelle pour protéger sa création. Le médicament est, en effet, une création intellectuelle et à ce titre, il est la propriété de celui qui l’a produit – généralement un laboratoire pharmaceutique.

L’industrie pharmaceutique est une actrice majeure du développement contemporain des droits de propriété intellectuelle (DPI). A l’occasion des négociations menées entre 1986 et 1994, ayant abouti à la création de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), les représentants de l’industrie pharmaceutique se sont plaints des pertes financières subies du fait de l’absence de protection des DPI dans certains pays. Ce lobby a fait pression – avec succès – pour que ces droits fassent partie des volets garantis par la nouvelle organisation.

L’adoption dans la foulée, en 1995, de l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) a permis d’universaliser cette protection. Il est désormais admis par la quasi-totalité des pays producteurs que les médicaments peuvent faire l’objet d’un ou plusieurs DPI, et notamment être protégés par des brevets, des marques ou autres.

L’industrie aura tendance à fixer un prix élevé

Si le médicament a vocation à soigner des malades, le laboratoire pharmaceutique reste une entreprise à but lucratif, et non une organisation caritative. La reconnaissance des DPI lui donne le droit exclusif d’exploiter le médicament. Il s’ensuit que, dans le but de tirer le plus grand profit de son invention, l’industrie aura tendance à en fixer un prix élevé.

Le prix des médicaments est au centre de la problématique de l’accès aux soins de santé. Plus les prix sont élevés, plus ils sont prohibitifs pour de nombreux malades. Il y a là un conflit potentiel entre le DPI des fabricants et le droit à l’accès aux médicaments des malades. La situation peut alors être gérée de deux manières différentes.

Le fabricant peut, en vertu de son DPI, prendre l’initiative d’améliorer l’accès en octroyant volontairement des droits à des tiers. Il leur confère le droit d’exploiter le brevet à des conditions souples en autorisant la fabrication, l’importation, la vente ou toute autre forme de cession des droits portant sur le médicament protégé. Ce mécanisme volontaire permet au fabricant de garder un certain contrôle sur l’exploitation de son invention.

Un accord de licence avec les laboratoires Gilead Sciences

Par exemple, l’organisation de santé publique Medicines Patent Pool (MPP), soutenue par les Nations unies, a annoncé en 2017 un accord de licence avec les laboratoires Gilead Sciencesportant sur un médicament, le bictégravir. Cet accord conclu dans le cadre d’un nouveau traitement du VIH à un seul comprimé à prise unique quotidienne pourrait offrir une nouvelle option pour les personnes vivant avec le VIH dans les pays à revenu faible et intermédiaire. La licence permet aux fabricants titulaires de sous-licences du MPP de produire, développer et vendre des versions génériques des médicaments contenant le bictégravir.

Dans d’autres cas, le producteur peut être contraint par un État à adopter des modalités particulières. C’est ce qui s’est passé dans l’affaire des antirétroviraux en Afrique du Sud. Une loi de 1997 y permettait notamment d’avoir recours à des licences obligatoires pour faciliter l’accès à ces traitements à un coût raisonnable pour la population. L’affaire fit grand bruit en raison d’une plainte déposée par des multinationales pharmaceutiques contre cette loi. Mais le procès n’alla pas à son terme en raison du retrait de la plainte.

La récurrence de problèmes de santé publique est un ferment pour les risques de conflit avec les producteurs de médicaments. Ainsi, dans le traitement de l’hépatite C, le gouvernement malaisien a autorisé en 2017 l’importation de versions génériques d’un médicament essentiel, le sofosbuvir, malgré les brevets détenus par le géant pharmaceutique Gilead Sciences. Cette décision est intervenue après plus d’une année de négociations avec le laboratoire, propriétaire du sofosbuvir. Il faut dire que le même médicament avait fait l’objet d’une autorisation de fabrication et de mise en vente de la version générique en 2015 au Maroc, où une protection par brevet n’avait pas été sollicitée.

Le rôle des génériques dans l’accès aux médicaments

Une autre modalité qui permet de résoudre le problème de l’accès au médicament est la mise sur le marché d’un médicament générique. Cela peut se produire alors que le brevet sur le médicament est encore en vigueur. Dans ce cas, les fabricants du générique ne peuvent pas utiliser la marque initiale de fabrique. Cependant, ils pourront faire des copies du médicament breveté qu’ils vendront sous le nom de l’ingrédient chimique ou sous une autre marque. Ce qui en fait des médicaments génériques du point de vue du droit des brevets. Il est constant que le recours aux licences obligatoires reste faible, pour des raisons aussi bien géostratégiques que juridiques. Analysant la situation dans le monde entre 1995 et 2011, les auteurs (Beall et Kuhn) d’un article publié en 2012 ont trouvé 24 annonces de licence obligatoire dans 17 pays.

D’autres fois, le médicament a cessé d’être couvert par un DPI. Dans le cas du brevet par exemple, la durée de protection généralement accordée est de vingt ans. Il s’agit de la durée minimale prévue par l’accord sur les ADPIC. Au terme de ce délai, le brevet tombe dans le domaine public, offrant la possibilité à toute personne intéressée d’utiliser les données décrivant l’invention pour fabriquer et commercialiser le même médicament.

Le générique semble donc offrir plus de facilités d’accès aux médicaments. En effet, le DPI du producteur ne protège pas d’une baisse des prix, et le médicament original peut faire face à la concurrence légitime des médicaments génériques. Le prix de ces derniers est souvent inférieur de moitié au prix du médicament innovant, la réduction pouvant être de plus de 95 % dans certains cas.

Une baisse des prix de 10 000 à 100 dollars américains

Au Brésil, la production locale d’antirétroviraux a entraîné une baisse de 80 % des prix au début des années 2000. Surtout, l’Inde, premier producteur au monde de médicaments génériques contre le VIH, représente « la pharmacie des pays en développement ». La politique indienne en matière de brevets pharmaceutiques a permis la concurrence entre producteurs de génériques et entraîné la diminution de 99 % du prix des traitements de première ligne.

Ils sont ainsi passés de 10 000 dollars américains par personne et par an en 2000, à environ 100 dollars américains en 2016, selon la 18e édition du rapport de Médecins sans frontières (MSF) sur les prix des traitements contre le VIH.

Entre les fabricants de médicaments, producteurs souvent volontaristes, et les patients, consommateurs généralement obligés, il existe un lien complexe pour lequel l’arbitrage de l’autorité publique est nécessaire. Le but des règles de DPI mises en place par les autorités publiques (internationales et nationales) est entre autres de stimuler la créativité pour permettre le développement de solutions appropriées.

En même temps, il faut s’assurer que les destinataires des médicaments puissent effectivement en profiter, quel que soit leur statut social. C’est pourquoi il faut constamment rechercher un équilibre entre les droits des fabricants et ceux des patients.

Source : Le Quotidien du Médecin

À l’occasion la conférence internationale francophone sur le VIH/hépatites, l’AFRAVIH (Bordeaux du 4 au 7 avril 2018)

À l’occasion la conférence internationale francophone sur le VIH/hépatites, l’AFRAVIH, qui se tient à Bordeaux du 4 avril au 7 avril. Un collectif d’associations, parmi lesquelles, AIDES, Coalition plus, Médecins du monde, Sidaction ou Solthis, lancent un appel au président de la République pour le Fonds mondial.

Leur souhait : que la France accueille la 6e conférence de reconstitution du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme dans le cadre de la présidence du G7 en 2019. Cette conférence prévue l’année prochaine vise à réengager financièrement les différents donateurs existants et potentiels. L’objectif est d’encourager, augmenter et pérenniser le soutien international à la lutte contre les trois épidémies.

La France est le 2e contributeur du Fonds

La France est le 2e contributeur du Fonds et les associations saluent cet engagement historique contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Mais aussi pour la couverture sanitaire universelle, le renforcement des systèmes de santé, l’accès aux soins ainsi qu’aux traitements dans les pays à ressources limitées. Et enfin pour les droits des populations les plus exposées aux épidémies. « En investissant dans ce Fonds, la France a contribué à sauver 22 millions de vies depuis 2002 », indiquent-elles.

Le président Emmanuel Macron veut-il poursuivre le leadership de la France en santé mondiale

Toutefois, s’inquiète le collectif, ces dernières années sont plutôt marquées par le recul de cet engagement historique. « La réduction de son soutien à UNITAID, la vacance depuis plusieurs mois du poste d’Ambassadeur de la lutte contre le sida et les maladies transmissibles posent question. Le président Emmanuel Macron veut-il poursuivre le leadership de la France en santé mondiale porté par ses prédécesseurs ? », s’interroge-t-il. L’organisation de la réunion de restitution par la France « permettrait de garantir le succès politique et financier de cette conférence de reconstitution du Fonds mondial », estiment les associations.