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C’est enfin officiel : l’arrêté permettant la levée de l’interdiction des soins funéraires pour les personnes séropositives au VIH ou à une hépatite virale a été signé le 12 juillet par la ministre Agnès Buzyn, et publié cette nuit au Journal officiel[1]. Cette levée sera effective au 1er janvier 2018, 32 ans après son instauration, et six ans après les premières promesses de l’État. Si nos associations saluent bien sûr cette avancée historique, sa lenteur nous laisse un goût amer.

Cela fait des années, que nous, associations luttant contre le VIH/sida ou les hépatites virales, nous battons pour lever l’interdiction de pratiquer des soins funéraires de conservation des personnes séropositives au VIH ou à une hépatite virale, confortés par les avis du Conseil national du sida et des hépatites virales (CNS), du Défenseur des droits, de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et du Haut conseil à la santé publique (HCSP).

Bien qu’aucun cas de transmission du VIH dans le cadre de soins funéraires n’ait été rapporté, cette interdiction prévaut depuis 1986. Trente-deux ans de sentiment de fausse sécurité pour les thanatopracteurs, alors que l’application de précautions universelles pour tous les corps aurait dû être la norme[2]. Trente-deux ans d’une discrimination qui complique voire entrave l’accès au corps après le décès pour les proches des défunts, quitte à ce qu’ils voient un cadavre présentant des traces de décomposition, contribuant à empêcher leur processus de deuil.

Cette promesse de levée de l’interdiction nous avait été faite par le ministre Xavier Bertrand en 2011, sans aboutir. En 2012, nous obtenions la promesse formelle du candidat puis Président François Hollande. En 2015, cette levée d’interdiction aurait dû être rendue possible par la loi de modernisation du système de santé portée par Marisol Touraine. Il en a été autrement : les représentations les plus datées sur le VIH et ses modes de contamination l’ont emporté à l’Assemblée nationale. Depuis 2016, le gouvernement s’est engagé pour une levée de l’interdiction par voie réglementaire. Un processus long, en concertation avec les associations et les représentants-es de la profession, qui s’achèvera donc le 1er janvier 2018.

Nos associations feront désormais preuve d’une grande vigilance pour que cette nouvelle réglementation soit appliquée sur l’ensemble du territoire. Aucun « droit de retrait » ne saurait servir de prétexte à la perpétuation d’une discrimination sérophobe et à la diffusion d’informations mensongères et stigmatisantes sur le VIH et les hépatites virales.

Enfin, nos associations entendent poursuivre leur combat contre l’ensemble des discriminations et stigmatisations envers les personnes séropositives au VIH ou à une hépatite virale. Ce combat passe par une lente et minutieuse liquidation de l’héritage juridique sérophobe des années 1980 et 1990.

Signataires : Actions Traitements, Act UP-Paris, Act Up Sudouest, AIDES, CHV (Collectif Hépatites Virales), ELCS (Elus Locaux Contre le SIDA), Fédération LGBT, Sidaction, SIS Animation, SOS Hépatites, SOS Homophobie, TRT-5

Contacts presse :

AIDES : Antoine Henry, 06 10 41 23 86, ahenry@aides.org

Act UP-Paris : Mikaël Zenouda, 06 13 50 89 80, presidence@actupparis.org

Sidaction : Marine Charlier, 01 53 26 45 36, m.charlier@sidaction.org

SOS Hépatites : Yann Mazens, 06 74 86 44 48, direction@soshepatites.org

Fédération LGBT : Antonin Le Mée, 06 88 76 82 01, contact@federation-lgbt.org

SOS homophobie : Joël Deumier, 06 28 32 02 50, joel.deumier@sos-homophobie.org

[1] Arrêté du 12 juillet 2017 fixant les listes des infections transmissibles prescrivant ou portant interdiction de certaines opérations funéraires mentionnées à l’article R. 2213-2-1 du code général des collectivités territoriales : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000035243624&dateTexte=&categorieLien=id

[2] On estime à 30 000 le nombre de personnes vivent avec le VIH sans le savoir en France. Ce chiffre grimpe à 75 000 personnes pour l’hépatite C et 150 000 pour l’hépatite B (Source : Santé publique France). Le risque potentiel rencontré par les professionnels repose donc principalement sur la méconnaissance du statut sérologique des personnes.

Les antirétroviraux ont révolutionné l’approche du Sida, qui ne tue plus les personnes qui sont sous traitement. Mais la recherche se poursuit pour simplifier les médications.

On ne guérit pas du VIH. Les avancées réalisées depuis plus de 20 ans du côté des traitements poussent parfois à l’oublier. Ils fonctionnent bien, permettent de stabiliser les patients et font baisser la charge virale. Si bien que leur découverte et leur démocratisation sont en grande partie responsables de la baisse de 45 % du nombre de décès liés à l’infection depuis 2005.

Mais l’arrêt des traitements antirétroviraux signifie toujours le retour du virus. En attendant l’arrivée d’un vaccin réellement efficace, ils sont encore le seul rempart médical, et doivent être pris à vie, tous les jours. Peut-être plus pour très longtemps.

Des prises espacées

Des adaptations de la galénique – la forme sous laquelle sont pris les médicaments – sont à l’étude, pour alléger le poids de la prise des traitements. « Moins de médicaments, moins de contraintes », résume pour Pourquoidocteur le Pr Pierre-Marie Girard, chef du service des maladies infectieuses et tropicales de l’hôpital Saint-Antoine, et spécialiste du VIH. De dizaines de médicaments à avaler par jour, les traitements se sont déjà simplifiés pour se limiter à une pilule quotidienne. Mais les laboratoires continuent d’innover. « Nous voyons se profiler des traitements à très longue durée, y compris sous forme injectable, précise le Pr Girard La prévention et le traitement pourraient reposer sur des injections trimestrielles, voire semestrielles. Cela pourrait représenter une petite révolution. »

Pour bientôt

Par différentes méthodes, notamment l’utilisation de nanotechnologies, les molécules seront délivrées en continu, ajoute le Pr Girard. Et ce n’est pas de la science-fiction. « Des essais cliniques sont en cours pour valider ces nouveaux traitements, poursuit-il. De petits implants, qui pourraient être portés pendant un an, sont également en développement. » Leur arrivée sur le marché ne devrait pas se faire attendre trop longtemps. Les essais sont dans leurs phases finales, et le médecin estime qu’ils pourraient faire leur apparition d’ici deux ans. Un pas de plus pour favoriser la qualité de vie des patients.

Vers la rémission

Mais le graal thérapeutique, ce que les chercheurs tentent d’atteindre depuis de nombreuses années, c’est un traitement curatif. Et, de ce côté, il faudra encore attendre. « Nous cherchons tous azimuts, mais nous n’y parvenons pas », regrette le Pr Girard. Le but, pour l’instant, serait de trouver des traitements qui ne mènent pas forcément à la guérison, mais au moins à la rémission. Après une phase de traitement, la charge virale serait nulle ou indétectable, à long terme, sans avoir besoin de continuer les médicaments. Comme pour le cancer, quand maladie est en recul, un suivi spécifique serait néanmoins nécessaire, afin de surveiller une éventuelle rechute.

Une réussite scientifique globale

Les traitements actuels sont déjà une réelle chance. L’émergence soudaine et spectaculaire du Sida dans les années 1980 a mobilisé les chercheurs du monde entier, qui se sont mis en quête de solutions. Et, après à peine plus de 10 ans de recherche, les premiers antirétroviraux, certes moins efficaces que les traitements actuels et comportant plus d’effets secondaires, ont vu le jour en 1995. Ce qui représente un record pour la prise en charge de ce type de maladie.L’espérance de vie des personnes séropositives est aujourd’hui équivalente à celle du reste de la population. Leur qualité de vie est, elle aussi, presque similaire. Les transformations morphologiques observées avec les premiers antirétroviraux, notamment au niveau du visage, semblent oubliées. « Je le dis encore prudemment, mais c’est de l’histoire ancienne », d’après le Pr Girard.Les problèmes digestifs en début de traitement, les risques vasculaires et métaboliques (diabète) sont bien connus, et anticipés. Grâce à la prévention, ils peuvent être gérés. En revanche, le risque accru de cancers est plus difficile à gérer. Les chercheurs se penchent aussi sur d’éventuelles atteintes neurologiques : dépressions et maladies d’Alzheimer précoces pourraient être attribuées aux traitements.Ces conséquences sont encore là pour rappeler que le VIH reste une infection dangereuse. De nombreux efforts doivent encore être consentis pour son éradication avant 2030, souhaitée par ONUSIDA, qui estime la tâche possible. Mais tout ne peut pas reposer sur les traitements.