Source: JIM.fr
L’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) est associée à une augmentation du risque de maladie cardiovasculaire (MCV), et les addictions diverses n’arrangent rien. Le tabagisme et la consommation excessive d’alcool sont deux exemples éloquents dans un tel contexte. Les épisodes itératifs de beuveries intempestives qui s’apparentent ou correspondent stricto sensu au « binge drinking» ne sont pas recommandables, quel que soit le contexte, mais encore moins chez les patients infectés par le VIH.
Près de 13 000 sujets infectés par le VIH
Le risque de maladie thrombo-embolique veineuse (MTEV) semble dépendre de l’addition de comportements à haut risque : c’est du moins ce que suggèrent les résultats d’une étude transversale dans laquelle ont été inclus 12 957 patients atteints d’une telle infection, recrutés au sein du réseau étatsunien CNICS (AIDS Research Network of Integrated Clinical Systems) entre janvier 2009 et décembre 2018.
C’est le modèle des risques proportionnels de Cox qui a été choisi pour traiter les données et évaluer des associations entre le risque de MTEV et la consommation d’alcool en intensité comme en fréquence d’une part, et le tabagisme chronique exprimé en nombre de paquets-années (NPA) d’autre part. Un ajustement statistique a pris en compte les variables démographiques et cliniques pertinentes.
Un risque accru quand on cumule les comportements à risque
Au terme d’un suivi médian de 3,6 années, 213 cas de MTEV ont été dénombrés. Dans un tiers des cas, une consommation excessive d’alcool était avérée et, dans 40 % des cas, il existait un tabagisme actif. Chez les fumeurs actifs ou anciens, le risque de MTEV était majoré de 44 % comparativement aux non-fumeurs, le hazard ratio (HR) étant estimé à 1,44 (respectivement IC 95% : 1,02-2,03 et 0,99-2,07).
Par ailleurs le NPA total était associé au risque de MTEV de manière dose-dépendante, le HR étant estimé à 1,10 pour 5 paquets-années (IC 95 % : 1,03-1,18). Il en a été de même pour la fréquence de consommation excessive d’alcool, et c’est là que peuvent intervenir les séances cumulées de binge drinking : chaque semaine d’alcoolisation excessive a majoré le risque thrombotique de 30 %, de manière tout aussi dose-dépendante (HR: 1,30 pour 7 jours/mois, IC 95 % : 1,11-1,52). La fréquence et la sévérité de la consommation d’alcool n’ont pas en revanche influé sur ce risque.
Ainsi, en cas d’infection par le VIH, le tabagisme chronique augmente le risque de MTEV de manière dose-dépendante et il en va de même pour l’alcoolisation excessive, le nombre de journées (ou de soirées) consacrées à cette addiction pesant lourd dans la balance. Il aurait été intéressant de mesurer le risque associé à la combinaison de ces facteurs, mais il n’est pas interdit d’évoquer une synergie d’action particulièrement délétère.
Dr Philippe Tellier
Référence
Luu B, Ruderman S, Nance R, et al. Tobacco smoking and binge alcohol use are associated with incident venous thromboembolism in an HIV cohort. HIV Med. 2022 Nov;23(10):1051-1060. doi: 10.1111/hiv.13309. Epub 2022 Mar 28. PMID: 35343038; PMCID: PMC9515244.