Source: univadis.fr
Réduire l’infection chronique par le VHC chez les usagers de drogues ne sera possible qu’en basculant largement les patients vers l’abandon des anciens traitements et la prescription élargie des nouveaux antiviraux d’action directe (AAD).
Mais si l’élargissement de cet accès au traitement est une étape indispensable, il ne sera pas suffisant pour maîtriser la propagation du virus à l’échelle d’une population : selon une étude parue dans le Journal of Hepatology et modélisant l’évolution de la prévalence de l’hépatite C chronique dans différents sites européens, basculer vers les AAD, sans en augmenter leur fréquence de prescription parmi cette population, offrira moins de 5% de réduction de la prévalence à l’horizon 2026 (3-4% en France).
Dans cette étude, le recours aux traitements de substitution et aux programmes de réduction des risques (matériel d’injection) améliorerait clairement la dynamique : selon les chiffres initiaux avancés par les différents sites participants, augmenter de 80% leur utilisation permetrait de réduire la prévalence de 20 à plus de 50%, voire même 75% dans certains pays (République tchèque, Slovénie notamment, dans lesquels leur diffusion est initialement faible). En France, le chiffre serait intermédiaire, aux environs de 30%. Le bénéfice de ces deux approches préventive apparaissait différent selon leur diffusion actuelle dans les pratiques.
De fortes disparités géographiques, la France bonne élève
Enfin, les chercheurs ont évalué l’efficacité à 10 ans du doublement du nombre de patients traités par AAD : pour les pays à prévalence initiale élevée (>55%) et taux de traitement annuel faible (<1% des infections chroniques), cette attitude n’apporterait qu’une amélioration à la marge sur les chiffres de prévalence en 2026 (inférieure à 5%, comme en Suède ou en Finlande). En France, en revanche, où la prévalence chronique du VHC est plus faible (47,3%) et le taux de traitement annuel déjà élevé parmi cette population (4,5%), le doublement des traitements par AAD résulterait en une diminution de la prévalence chronique de 36,4%. Enfin, augmenter le taux de traitement des usagers de drogues infectés à 50 pour 1.000, en association à la réduction des risques et les traitements de substitution réduirait la prévalence d’environ 47%, jusqu’à un chiffre d’environ 25% en France, où le taux de traitement prescrits est déjà élevé dans cette population. Cette attitude se traduirait par des baisses de la prévalence bien plus larges, de l’ordre de 70%, dans d’autres pays où l’accès au traitement est moins large.
Ce travail est le fruit d’une l’équipe internationale qui a développé un modèle mathématique intégrant les spécificités de la population d’usagers de drogues de chacun des 11 sites participants : prévalence de l’usage de drogue, prévalence et incidence de l’infection par le VHC et de sa chronicisation, proportion d’usagers de drogues traités par les anciens traitements et par les nouveaux antiviraux d’action directe, taux de guérison, risque de réinfection… Un modèle qui pouvait présenter quelques limites : incertitudes statistiques, données initiales parfois incertaines … Néanmoins, il prenait en compte l’ensemble du processus d’infection, de chronicisation, de guérison et de réinfection potentielle et se rapprochait, de fait, de l’histoire naturelle de l’infection. Ce travail, qui permet d’asseoir l’idée du traitement comme outil de prévention, insiste aussi sur l’importance des autres piliers de la prévention et sur la nécessité de disposer d’outils de surveillance efficaces et, finalement, peu coûteux au regard du coût des traitements proprement dits.