Source : SciencesEtAvenir.fr
Des revers dans la recherche médicale contre le sida et le VIH annoncés pendant la Conférence internationale d’Amsterdam prouvent que la route reste longue avant de trouver des traitements universellement efficaces.
Les cas du dolutégravir
La 22e Conférence internationale sur le sida a été l’occasion, mardi, de confirmer les inquiétudes sur les dangers pour l’embryon d’un médicament par ailleurs prometteur, le dolutégravir.
Ces malformations peuvent provoquer des difformités graves du cerveau ou des vertèbres, aboutissant fréquemment à ce que l’enfant soit mort-né.
Cela revient à des malformations dans une grossesse sur 100, dix fois plus que la normale, a expliqué Rebecca Zash, une chercheuse en santé publique à la Harvard TH Chan School.
Depuis mai, il n’y a pas eu de nouveau drame de ce type signalé, ce qui fait que l’on a au total dénombré quatre cas sur 596 grossesses. Mais cela reste « sept fois plus élevé que les autres groupes [de femmes enceintes] et statistiquement significatif », a estimé le Dr Zash.
Le dolutégravir est un traitement anti-HIV relativement nouveau, avec moins d’effets secondaires que d’autres, et dont les promoteurs pensent qu’il générera moins de résistance à long terme.
Les pays aidés par le fonds américain PEPFAR AIDS étaient sur le point d’en faire leur principal traitement antirétroviral, a souligné la présidente de la Société internationale sur le sida (IAS), Linda-Gail Bekker.
Preuves des attentes placées en lui, l’ONG Médecins sans frontières (MSF) a réclamé mardi un meilleur accès au dolutégravir dans sa version pédiatrique pour les enfants contaminés par le VIH.
L’épidémie de VIH dans le monde (AFP – Cecilia SANCHEZ)
En attendant des résultats plus définitifs, les organisations sanitaires publiques recommanderont que les séropositives ayant des projets de grossesse privilégient d’autres traitements. « C’est dur mais je pense que nous devons attendre », a commenté le Dr Zash.
Un Défi très compliqué pour la science
Un essai clinique pour extraire le VIH des cellules humaines et l’éliminer a par ailleurs donné des résultats décevants.
Les chercheurs ont testé différents traitements, en plus des antirétroviraux qui doivent éviter aux séropositifs d’être malades du sida, chez 60 hommes.
Ces volontaires ont reçu des vaccins qui devaient apprendre au système immunitaire à reconnaître le VIH et des médicaments pour forcer les réservoirs dissimulant le virus à se révéler, dans l’espoir qu’ils soient attaqués.
Mais l’état de santé de ces hommes n’a pas évolué différemment de celui des autres ne prenant que le traitement classique, a raconté une chercheuse de l’Imperial College de Londres, Sarah Fidler.
« Bien évidemment, l’effet global n’ait pas été celui que nous espérions », a-t-elle dit aux journalistes. « Tous les résultats font avancer la connaissance même s’ils sont quelque peu décevants ».
Pour les chercheurs, guérir les personnes atteintes par le VIH signifiera réduire ce virus responsable du sida à un état où il ne nuira plus à la santé des porteurs, qui se passeront ainsi de traitement, et où il ne pourra plus être transmis.
« Guérir reste une des grandes priorités scientifiques », a rappelé Sharon Lewin, une immunologue de l’université de Melbourne (Australie). « Ce qu’on a appris au cours de la dernière décennie, c’est que ça va être un défi très compliqué pour la science ».
Inquiétude et bonne nouvelle
Autre source d’inquiétude : une étude en Thaïlande a conclu qu’une hormone pour féminiser après une opération de changement de sexe semblait abaisser la concentration dans le sang d’un antirétroviral, le ténofovir.
Des investigations plus poussées devront déterminer si cette hormone rend moins efficace ce traitement pour les séronégatifs qui le prennent en prévention, a précisé un médecin du centre de recherche sur le sida de la Croix-Rouge thaïlandaise, Akarin Hiransuthikul.
Une bonne nouvelle est en revanche venue de France, avec la confirmation de l’efficacité totale dans la prévention du VIH de la prophylaxie pré-exposition (PrEP). Sur les 1.435 volontaires recrutés entre mai 2017 et mai 2018 en région parisienne pour prendre le Truvada (emtricitabine/ténofovir), aucun n’a été contaminé.