INQUIÉTUDE ET COLÈRE !
Nous ne pouvons pas laisser l’Assemblée Nationale confier la co-présidence d’un groupe d’études sur le sida à un parti d’extrême droite sérophobe.
Madame la Présidente de l’Assemblée Nationale,
Depuis hier soir (mercredi 9 novembre 2022) l’association Actions Traitements est inquiète et en colère, à l’instar des acteurs et actrices de la lutte contre le VIH-sida. Dans une liste d’attribution des groupes d’études de l’Assemblée Nationale, circulant sur les réseaux sociaux, il apparaît que le parti d’extrême droite Rassemblement National (anciennement Front National) briguerait, entre autres, la présidence du groupe d’études sur le sida de l’institution que vous présidez.
Actions Traitements est une association de patients agréée, créée en 1991, par et pour des personnes vivant avec le VIH et/ou une hépatite virale. À ce titre, elle informe, accompagne, soutient et défend les droits des personnes concernées ainsi que les personnes exposées à ces virus. L’association mène également des actions de terrain et de plaidoyer afin de lutter contre les discriminations. Elle s’adresse à des personnes vulnérables en raison de leur statut sérologique (VIH ou hépatite), ainsi qu’aux personnes les plus exposées, qui cumulent d’autres facteurs de vulnérabilité comme l’orientation sexuelle (personne LGBTQI+), leur genre, leur origine, leur statut social, leur activité (travail du sexe) ou leurs pratiques (usage de drogues).
En tant qu’association historique de la lutte contre le VIH, les hépatites et les pathologies associées, Actions Traitements souhaite alerter la présidence de l’Assemblée Nationale quant à la gravité que représenterait l’accession d’un ou d’une élu.e du RN à la présidence du groupe d’études sur le sida, si cette éventualité venait à être confirmée par le Bureau de l’assemblée lors de la réunion d’attribution des co-présidences prévue, d’après nos informations, pendant la semaine du 14 novembre 2022.
Le Front National (FN), devenu récemment Rassemblement National (RN), s’est toujours illustré comme un parti foncièrement sérophobe, opposé aux droits des minorités et prompt à stigmatiser les personnes vivant avec le VIH, ainsi que celles exposées au risque de contracter ce virus. C’est d’autant plus vrai quand ces personnes sont d’origine étrangère, LGBTQI+, usagers.ères de drogues, travailleurs.euses du sexe, etc.
De nombreux éléments confirment la sérophobie du RN / FN par le passé :
- Les propos immondes de l’ancien président et fondateur du FN (devenu RN), prononcés en 1987 sur le plateau de l’émission L’heure de vérité : « le sidaïque est une espèce de lépreux… ».
- Dans une de ses affiches de campagne datant de 1990, le FN comparait le Parti Socialiste au SIDA à travers l’acronyme : « Socialisme, Immigration, Drogues, Affairisme ».
- Dans un tract de campagne en 1993, Marine Lepen, ancienne présidente du RN, rendait les socialistes responsables des « 500 000 séropositifs en France », chiffre faux puisqu’il n’y en a jamais eu plus de 200 000 d’après les estimations les plus hautes.
- Encore en 2016, des cadres du FN critiquaient une campagne de prévention de Santé publique France ciblant les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, qui restent particulièrement exposés au VIH encore aujourd’hui.
Nous avons bien pris note du communiqué que vous avez publié Mercredi 9 novembre concernant la procédure d’attribution de la présidence du groupe sur l’antisémitisme. Nous attendons de votre part la même vigilance quant à celle du groupe d’études sur le sida. Le simple fait que cette possibilité existe, même si ce n’est qu’une énième provocation du RN, suffit à nous inquiéter au plus haut point. Car c’est un véritable coup porté à celles et ceux qui se battent contre le VIH-sida ou à la mémoire des 38 millions de personnes mort-e-s des suites du sida à travers le monde, depuis le début de l’épidémie.
Alors que les victoires obtenues en quarante ans de lutte ont été mises à mal par la crise sanitaire liée à la Covid-19 ces trois dernières années, nous voulons croire que le groupe d’études sur le sida de l’Assemblée Nationale a un rôle à jouer, avec les acteurs et actrices de cette lutte, dans la mise en place de solutions qui permettront d’envisager la fin de l’épidémie d’ici à l’horizon 2030, tel que fixé par l’OMS et ONUsida. Tous les acteurs, y compris ce groupe d’études, doivent travailler de concert afin de poursuivre l’effort de recherche, déployer de nouvelles actions, favoriser l’accès aux soins et à la prévention pour les personnes qui en ont besoin.
Nous sommes convaincu.e.s que vous avez bien conscience que la présidence de ce groupe d’études sur le sida exige un engagement sincère et une cohérence entre les valeurs incarnées par les personnes et le respect envers celles et ceux qui sont concernées ou exposées.
À ce titre, nous ferons preuve de la plus grande vigilance quant aux décisions qui doivent être prises dans les prochains jours ou prochaines semaines.
Nous restons à votre disposition pour vous rencontrer et évoquer ces sujets, si cela vous semble opportun et nous nous joindrons à toute initiative menée par d’autres associations de la lutte contre le VIH, en lien avec le sujet qui nous anime aujourd’hui.
Bien respectueusement
Franck Desbordes,
Président d’Actions Traitements