Source : AIDES
Par Fred Lebreton
Donner la parole aux personnes concernées par le VIH et les hépatites virales est une des clefs de la visibilité comme de la lutte contre la sérophobie. Les témoignages à visages découverts contribuent grandement à modifier le regard que la société, dans son ensemble, porte sur le VIH, les hépatites virales et les personnes qui vivent avec. Sélection d’actus récentes sur ces figures qui franchissent le pas de la visibilité par la rédaction de Remaides.
Personnes nées avec le VIH : « Nous sommes des survivants à vie »
Dans son numéro de janvier/février 2024, le magazine américain Poz donne la parole à trois personnes nées avec le VIH. En une, Porchia Dees, activiste dans la lutte contre le VIH et paire éducatrice en santé, revient sur son enfance : « J’avais toujours entendu le mot VIH, mais je ne savais tout simplement pas ce que cela voulait dire ». Quand elle était enfant, Porchia Dees et sa famille conduisaient une heure depuis leur domicile à San Bernardino, en Californie, jusqu’à l’Hôpital pour enfants de Los Angeles, chaque mois. Ces visites étaient une routine pour Porchia, qui était toujours malade et prenait des médicaments. Elle avait une équipe de médecins et de travailleurs-ses sociaux-les qu’elle voyait fréquemment. Elle savait qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas, mais elle ne pouvait pas comprendre quoi. Un jour, elle a enfin appris la vérité. Lorsque Porchia avait environ 11 ou 12 ans, une travailleuse sociale lui a donné un cours sur le VIH. La petite fille a appris les différentes façons dont le virus pouvait se transmettre. Une fois la leçon terminée, la travailleuse sociale lui a annoncé la nouvelle. « Elle m’a finalement dit que j’avais le VIH, puis m’a demandé si j’avais des questions », se souvient Porchia, aujourd’hui âgée de 37 ans. « Je ne savais pas vraiment quoi dire. J’étais un peu figée. Je me souviens juste d’avoir ressenti que c’était beaucoup à assimiler ». C’est le jour où Porchia a appris qu’elle était née avec le VIH et que sa mère lui avait transmis à la naissance. Porchia avait toujours su que sa mère luttait contre des addictions et était malade.
Atteindre l’adolescence était une grande victoire, car la petite fille n’était pas censée vivre au-delà de l’âge de cinq ans. Année après année, elle surprenait ses médecins. Avant l’arrivée des trithérapies en 1996 et au plus fort de l’épidémie de sida, les enfants nés-es avec le VIH n’étaient pas censés survivre. Un diagnostic était considéré comme une condamnation à mort. Cependant, certains-es ont bravé les statistiques et ont grandi. Malgré cette victoire, la militante raconte son sentiment d’isolement en grandissant : « Comparé à l’ensemble de la population aux États-Unis, il n’y a pas beaucoup de personnes vivant avec le VIH et peu de personnes connaissent quelqu’un vivant avec le VIH. Mais même au sein de notre propre communauté, peu de personnes vivant avec le VIH connaissent quelqu’un qui est né avec. Nous nous sentons isolés au sein même de notre communauté ».
Désormais, ces adultes nés avec le VIH veulent être visibles et reconnus. Ils-elles ne veulent plus être associés-es aux statistiques de transmission périnatale ou verticale. Au contraire, ils-elles préfèrent être connus-es en tant que « survivants-es à vie » ou « dandelions » (pissenlits), en hommage au poème du même nom écrit par Mary Bowman (née avec le VIH, Mary Bowman était une poétesse, auteure, chanteuse et activiste, elle est décédée en mai 2019). En septembre 2023, le plus grand groupe de survivants-es à vie du VIH s’est réuni lors de la Conférence annuelle sur le VIH/sida aux États-Unis (USCHA) qui s’est tenue à Washington, DC. Au cours du premier jour de l’USCHA, ils-elles ont manifesté sur scène et se sont présentés à la communauté du VIH en tant que « survivants à vie ». « Nous avons donné des statistiques sur notre prévalence aux États-Unis et dans le monde, combien d’entre nous meurent chaque année et pourquoi nous continuons à être négligés », explique Porchia Dees. « Puis, nous avons rendu hommage à nos mères », dit-elle, faisant référence au moment où les survivants-es ont prononcé les noms de leurs mères décédées. « C’était puissant ».
Etre noir, queer et vivre avec le VIH…
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