Le groupe américain de biotechnologies Gilead Sciences a autorisé lundi pour 91 pays en développement une version générique de son traitement contre l’hépatite C, très efficace mais si onéreux que seule une infime minorité de patients y a actuellement accès.
Le Sovaldi de Gilead est vendu aux États-Unis 1 000 dollars par pilule, ce qui porte le coût total du traitement de douze semaines – efficace dans plus de neuf cas sur dix – à 84 000 dollars (65 000 euros). « Cette annonce change la donne », a estimé Greg Alton, vice-président exécutif de Gilead, auprès de l’AFP à New Delhi. « Le grand changement, c’est que nous mettons ce traitement à disposition de millions de gens dans le monde », a-t-il ajouté.
Le génériqueur Mylan a annoncé dans un communiqué qu’il avait obtenu de Gilead les droits non exclusifs de fabrication et de distribution du principe actif de ce traitement, le sofosbuvir. Sept fabricants de génériques – tous basés en Inde – bénéficient d’une autorisation similaire (Cadila Healthcare, Cipla, Hetero Labas, Ranbaxy, Sequent Scientific et Strides Arcolab).
Ces fabricants ont indiqué qu’il était trop tôt pour savoir à quel prix ils commercialiseraient le traitement. Gilead estime que le Sovaldi sera accessible en Inde pour 300 dollars par mois, un niveau de prix qui servira de « référence » pour les autres pays.
L’autorisation est valable pour 91 pays en développement où vivent plus de 100 millions de personnes contaminées par le virus de l’hépatite C (soit 54 % des personnes touchées dans le monde). Les modalités financières de l’accord n’ont pas été rendues publiques.
En France, les associations veulent aussi une baisse des prix
En France, les associations estiment que la décision de Gilead ne résout pas le problème de millions de patients de pays aux revenus plus élevés qui n’auront pas accès au traitement. « Nous saluons la volonté des fabricants de génériques de renforcer la production de ces nouveaux antiviraux à action directe », a déclaré Rohit Malpani, de Médecins Sans Frontières. Mais cet accord « prive des millions de malades de l’hépatite C de tarifs abordables, ce qui n’est pas acceptable », a-t-il ajouté.
La commercialisation du sofosbuvir a été autorisée en décembre 2013 par les autorités sanitaires américaines et en janvier 2014 par leurs homologues européennes. En juillet, quatorze pays européens, dont la France, se sont alliés pour négocier une baisse de prix du traitement de Gilead. La ministre française de la Santé Marisol Touraine avait annoncé que les négociations se feraient pays par pays mais que les 14 pays échangeraient leurs informations pour obtenir une baisse de prix de ce traitement qui, sinon, coûterait des « milliards » d’euros à la sécurité sociale.
Un collectif associatif* estime que « pour pouvoir traiter les 128 000 personnes qui ont un besoin urgent en France, il faudrait débourser l’équivalent de l’intégralité du budget 2014 de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) soit 7 milliards d’euros ». Il demande aux autorités de « soumettre le Sovaldi au régime de la licence d’office, qui permettrait d’en produire une version générique à un moindre coût ». Ce dispositif prévu dans le cadre des flexibilités de l’accord international sur les droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) est également possible dans le code de la propriété intellectuelle français.
Dr Lydia Archimède (avec AFP)
* Actions Traitements, Act Up Paris, Act Up Sud-Ouest, Aides, Arcat, ASUD CHV, CISS, Comede, Médecins du Monde, Dessine-moi un Mouton, Nova Dona, SIS association, Sol En Si, SOS Hépatites Fédération, TRT-5