Source : egora.fr
En France aujourd’hui, on estime que 75 000 personnes de 18 à 80 ans sont infectées par le VHC (Virus de l’Hépatite C) sans en avoir connaissance. Et dans au moins un cas sur dix, le diagnostic est effectué à un stade avancé de la maladie.
Selon les préconisations de la Haute Autorité de Santé (HAS), le dépistage de l’hépatite C repose actuellement sur la détection des personnes à risque. Cependant de nombreux spécialistes, et en particulier ceux de l’Association française pour l’étude du foie (Afef), se sont exprimés pour un élargissement de ce dépistage. Ainsi, à l’occasion de la présentation de ses dernières recommandations (mars 2018), le Pr Christophe Bureau (CHU de Toulouse), secrétaire général de l’Afef affirmait : « On est arrivé au bout du dépistage pour les patients ayant des facteurs de risque. Il faut un dépistage universel, et tous les acteurs de santé doivent y participer ». L’Afef recommande donc la réalisation d’au moins un dépistage (VHC, VHB et VIH) au cours de la vie adulte et le remboursement à 100 % de tous les tests, Trod (test rapide à orientation diagnostique) compris. A l’occasion de la journée nationale contre les hépatites (15 mai), l’association SOS Hépatites est aussi allée dans le même sens : « le dépistage ciblé auprès des populations dites à risques (transfusés, injecteurs et anciens injecteurs de drogues, etc.) ne suffira pas. Ce dépistage est certes utile, mais il a montré ses limites ».
Le dépistage universel de l’hépatite C se révèle coût-efficace
Dans ce contexte, des chercheurs de l’Inserm ont mis au point un modèle informatique destiné à comparer les différentes stratégies de dépistages sur le plan de leur efficacité, mais aussi sur celui de leur rapport cout/efficacité. Pour cela, les auteurs se sont basés sur des données de l’enquête de séroprévalence menée en 2004 par l’Institut de veille sanitaire (InVS), qu’ils ont appliquées à la population générale en excluant les personnes atteintes d’une infection chronique par le VHC et déjà diagnostiquées. Les différentes stratégies de dépistage évaluées ciblaient : uniquement la population à risque, tous les hommes entre 18 et 59 ans, tous les individus entre 40 et 59 ans, tous les individus entre 40 et 80 ans, et enfin tous les individus entre 18 et 80 ans (dépistage universel).
Les auteurs ont alors pu montrer que c’est le dépistage universel qui est associé à la meilleure espérance de vie ajustée sur la qualité de vie, comparée aux autres stratégies. De plus, ce dépistage universel se révèle coût-efficace si les patients dépistés pour l’infection par le VHC sont pris en charge et traités rapidement après le diagnostic. Cette étude plaide donc en faveur d’un dépistage universel du VHC en France, suivi d’une prise en charge et d’un traitement immédiat des personnes diagnostiquées. Pour Sylvie Deuffic-Burban (Inserm – Université Paris Diderot – Université Paris 13), premier auteur de cette étude, « le dépistage permet, à titre individuel, une prise en charge rapide ce qui évite le développement de complications graves. Dans une perspective collective, il contribue à l’élimination, à terme, de l’hépatite C dans une population qui aurait été dépistée sans restriction ». Elle conclut que ce modèle ne permet pas de tester le dépistage universel, mais que « les caractéristiques épidémiologiques qui rapprochent le VHC, le VIH et le VHB permettent de penser qu’un dépistage universel et combiné de ces trois virus pourrait être particulièrement intéressant ».
Journal of Hepatology, 1er juillet 2018. Inserm/Anrs/Université Paris Descartes/Université Paris 13, 1er juillet 2018
https://www.journal-of-hepatology.eu/article/S0168-8278(18)32112-3/fulltext