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EXPOSITION ÉPIDÉMIES

De la peste au VIH-Sida, comment les peuples font face aux pandémies

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Source : Sciences et Avenir

Aux Archives Nationales à Paris, l’exposition « Face aux épidémies » présente documents officiels et tableaux, parchemins et publicités pour témoigner de la réponse sociale à l’irruption de fléaux sanitaires nouveaux. Nombre d’éléments entrent en résonance avec la crise du Covid-19.

L’immense dessin d’un squelette, tenant un baluchon dans une main, soulevant son chapeau de l’autre, s’étire sur toute la volée de marches menant au premier étage des Archives Nationales, à Paris. Cette illustration accompagnait à l’origine la chanson de 1884 « V’là l’choléra qu’arrive » d’Aristide Bruant, qui évoquait avec humour noir l’imminence d’une épidémie de choléra (« V’là l’choléra qu’arrive/ D’une rive à l’autre/ Tout le monde en crèv’ra« ).

La maladie ne se montra finalement pas mais l’illustration est une impressionnante entrée en matière à l’exposition « Face aux épidémies, de la peste noire à nos jours » dont Sciences et Avenir est partenaire, et qui ouvre ce 12 octobre pour quatre mois.

Réponse sociale, individuelle ou collective

Le sujet est traité non pas sous l’angle de la recherche médicale ou de l’histoire des épidémies. De la peste noire qui ravagea l’Europe au milieu du 14e siècle au Sida dans les années 1980, en passant par la variole, la fièvre jaune, le choléra ou la grippe espagnole, le parcours met en avant la réponse sociale, individuelle ou collective, face à l’irruption d’un mal nouveau et inconnu, contre lequel il n’existe, par définition, aucune parade sur le moment. « Comment on s’en sort, comment on combat en fonction des savoirs de chaque époque et de la manière dont on perçoit la chose, et à chaque époque, quels sont les moyens et la manière dont on parvient à se sortir d’un épisode douloureux », résume Lucile Douchin, chargée d’études documentaires au département de l’éducation, de la culture et des affaires sociales aux Archives nationales, et l’une des trois commissaires de l’exposition.

C’est donc une exposition d’archives, où se succèdent, selon les moments, tableaux, chants sacrés, fresques, placards préfectoraux, photographies, anciennes publicités, documents administratifs, courriers… « Tous les supports sont concernés, cela va du parchemin, pour les périodes plus anciennes, jusqu’aux films de cinéma, continue la commissaire. Mais nous avons aussi des objets provenant de musées, relevant de l’histoire de l’art, de la littérature, et quelques objets scientifiques issus essentiellement du musée Pasteur. »

La polémique du « cancer gay »

Sous une vitrine, un registre de notaire de 1606 est présenté ouvert pour montrer une note manuscrite indiquant qu’il s’apprête à fermer son étude pour fuir la peste. Plus loin, le journal intime d’un instituteur de la Marne raconte l’épidémie de grippe espagnole de 1918-1919. En fin d’exposition, une « Une » polémique du quotidien Libération en mars 1983 titre « L’épidémie de cancer gay » à propos du Sida.

Dans son habillage de noir et de vert, la scénographie se veut uniforme pour éviter toute hiérarchie entre ces différentes époques, tout jugement d’une période par une autre où les connaissances scientifiques seraient plus avancées. « Le visiteur est positionné au même niveau de connaissance qu’à l’endroit où il est dans l’exposition », insiste Lucile Douchin.

Le contexte de la peste noire est ainsi marqué par l’omniprésence du religieux et du rôle d’une transcendance, dans les discours, dans les représentations, dans les interprétations relatives au fléau. « Aux 18e, 19e siècles, au moment de la variole et du choléra, on voit l’action des hygiénistes, note Anne Rasmussen, historienne de la santé publique et de la médecine à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales. Les maladies ne sont plus seulement considérées comme des fléaux divins mais aussi comme le fruit d’un environnement délétère : les miasmes, les lieux insalubres, sans que l’on parle encore de causalité microbienne. »

Des liens avec les années Covid

Le projet de cette exposition a été initié en 2018. Mais l’irruption de la crise sanitaire actuelle et sa série de mesures (confinement, pass sanitaire, fermeture de lieux publics…) a orienté le travail de manière à établir des liens entre le passé et les années Covid. « Au fur et à mesure de notre dépouillement des archives, on s’est rendu compte que si les sociétés et les perceptions sont différentes, des réactions se retrouvent à toutes les périodes. S’enfuir devant la peste nous a beaucoup parlé en 2020, quand les Parisiens sont partis dans des maisons en province », se souvient Vanessa Szollosi, conservatrice au département de l’Éducation, de la culture et des affaires sociales aux Archives nationales.

Découvrez la fin de l'article sur le site : Sciences et Avenir
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