Source : le parisien.fr
Environ 700 personnes sont prises en charge pour un traitement contre le VIH dans le département, un nombre stable depuis 15 ans. A Creil, secteur le plus touché, il n’y a plus de centre de dépistage gratuit permanent depuis 2016.
Dans l’Oise, 700 personnes ayant contracté le VIH (Virus de l’immunodéficience humaine*) sont suivies dans les hôpitaux de Compiègne, Beauvais mais aussi à Creil, secteur le plus touché, avec environ 350 patients. Des trois, c’est pourtant la seule ville qui ne propose pas de centre de dépistage gratuit permanent, même si des actions ont lieu, comme ce jeudi au CCAS (10 heures à 15 heures, en face de l’école Jean-Macé).
Pourtant, « le vrai problème, c’est le manque de dépistage », souligne le Dr Jean-Jacques Pik, spécialiste, passé par les hôpitaux de Senlis, Amiens, Creil et Clermont, détaché au Sato (service d’aide aux toxicomanes) et au centre pénitentiaire de Liancourt. « Si l’épidémie a beaucoup régressé dans les années 1990, cela ne baisse plus depuis 15 ans », précise-t-il.
Une situation anormale, alors que le traitement permet aux malades de ne transmettre le virus. Encore faut-il se savoir atteint. Le Dr Pik estime à 1 000 le nombre de porteurs dans le département, soit environ 300 personnes non suivies, susceptibles de propager le VIH. « Chaque année, nous avons 50 à 60 découvertes de séropositivité, une quinzaine seulement étant par contamination récente. »
A l’hôpital de Creil, le centre de dépistage permanent a disparu à l’occasion d’une restructuration administrative, en 2016. « Nous avions les compétences, mais pas les moyens humains et matériels nécessaires au nouveau cahier des charges », regrette Francesca Masson, infirmière d’éducation thérapeutique. C’est elle qui suit au quotidien les 350 patients creillois.
Le rôle essentiel des associations
La difficulté étant de toucher tous les publics. A Creil, « ce sont à 50 % des femmes, alors qu’ailleurs on a plutôt 70 % d’hommes, souligne le Dr Pik. Des patientes souvent d’origine africaine qui, contrairement aux idées reçues, ne sont pas venues en France pour se soigner, la moitié contracte le virus après leur arrivée. » En cause, notamment, les conditions de vie précaires réservées aux migrants.
D’où l’importance des réseaux associatifs. « Nous allons au contact des populations les plus touchées », détaille Virginie Winka, de l’association Aides, financée par l’Agence régionale de Santé (ARS) pour pallier le manque à Creil. « Beaucoup ne feront pas la démarche d’aller voir un médecin. » Jusque-là, cela se passait dans un véhicule, « mais nous sommes en discussion avec le Sato pour tenir une permanence une à deux fois par mois ».
« Accepter, ça prend du temps »
Selon le Dr Pik, si la lutte contre le VIH n’avance plus, « c’est peut-être parce que les gens pensent, à tort, que le combat est gagné ». Afin de sensibiliser, le médecin est à l’origine d’une exposition inaugurée lundi, en mairie d’Avrechy. Une série de portraits de personnes qui vivent avec le virus.
C’est le cas de Tania, une Creilloise de 35 ans arrivée d’Afrique il y a 6 ans. « J’ai appris que je l’avais quelques mois après, je ne m’y attendais pas, témoigne-t-elle. Ma vie s’est brisée, je me suis dit que j’étais foutue. » De longues discussions avec le personnel soignant l’ont rassurée. « Accepter, ça prend du temps. »
Tania : « Aujourd’hui, je suis heureuse »
Le plus dur a été le regard des autres. « Mon copain de l’époque n’a pas supporté. » Aujourd’hui, avec un cachet par jour, elle vit normalement. « Au début, le corps doit s’adapter, les symptômes peuvent être lourds. » Tania s’est battu et désormais, suivie une fois par mois, elle est en couple, en formation, fait du sport… « Je suis heureuse. »
*Le terme Sida étant employé pour une personne ayant développé la maladie, ce qui n’est pas le cas de tous les porteurs du VIH.