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Le confinement peut-il avoir une influence sur la dynamique de l’épidémie de VIH ?

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source : Komitid

La France, comme la plupart des pays riches, dispose aujourd’hui de tous les outils nécessaires pour mettre fin à l’épidémie de VIH.

Un accès facilité au dépistage, une mise sous traitement systématique des personnes diagnostiquées séropositives (TasP) afin de contrôler rapidement la charge virale et ainsi casser la chaine des transmissions. Et le déploiement de la PrEP, le traitement préventif pour les personnes séronégatives les plus exposées au VIH.

L’activité sexuelle diminue fortement

C’est dans ce contexte préventif que le Covid-19 vient bousculer la dynamique de la transmission. Confinement oblige, l’activité sexuelle, hors couple exclusif, diminue fortement. Or, on le sait, les transmissions du VIH sont principalement du fait de rapports sexuels avec des personnes qui ignorent leur séropositivité et qui, sans accès à un traitement, transmettent le virus à leurs partenaires sans le savoir. C’est ce qu’on appelle l’épidémie non diagnostiquée, estimée à 25 000 personnes en France, dont une importante proposition d’hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH).

Quelles conséquences pourraient avoir le Covid-19 sur l’épidémie du VIH ? Est-ce que, mathématiquement, moins d’activité sexuelle équivaudrait à moins de transmission ? Quid de l’après confinement ?

« Les transmissions VIH seront limitées pendant la période de confinement »

Komitid a interrogé France Lert, Présidente de l’association Vers Paris sans sida, chercheuse réputée en santé publique et engagée depuis plus de 30 ans dans la lutte contre le VIH/sida : « Il est fort probable que les transmissions VIH seront limitées pendant la période de confinement. Je ne vois pas comment il pourrait en être autrement. Une bonne moitié des HSH (hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes) ont un partenaire stable mais une autre partie est habituée à avoir des partenaires multiples avec qui ils ne partagent pas un habitat. Donc le nombre de rencontres sexuelles va forcément baisser ».

Cependant France Lert est inquiète pour la période post confinement : « Comme après toutes les crises avec une dimension humaine dramatique il va y avoir un désir de vie, un désir de sexe, un désir de fête. Toutes les préventions ne seront certainement pas au rendez-vous pour des raisons psychologiques et sociologiques. »

Selon France Lert, la lutte contre le VIH risque de reculer dans les préoccupations et dans les financements. « Ce que je redoute particulièrement dans les mois à venir, confie-t-elle, c’est le manque de moyens humains et financier alloués à la lutte contre le VIH. Le coronavirus est un virus infectieux qui mobilise déjà les infectiologues et la recherche en biologie et maladie infectieuse. De fait, cela déplace l’intérêt pour le VIH vers un nouveau virus dont on ne sait pas grand-chose à ce jour. On ignore si cette pandémie va durer dans le temps ou si elle sera récurrente. »

« Des chercheurs ont déjà commencé à demander s’ils pouvaient basculer une partie des fonds destinés au VIH sur le Covid-19. »

France Lert pense qu’il faut dès à présent anticiper ce manque de moyens : « Nous devons inventer les moyens de maintenir le dispositif de santé sexuelle car les IST (infections sexuellement transmissibles) sont une porte d’entrée pour le VIH. La lutte contre le VIH va reculer dans les préoccupations et dans les financements. Des chercheurs ont déjà commencé à demander s’ils pouvaient basculer une partie des fonds destinés au VIH sur le Covid-19. C’est inévitable et face à ça il ne faut pas être dans une réaction négative, il va falloir avancer et innover ».

Pour les associations, il n’est pas question de baisser la garde durant cette période de confinement. Les premières actions arrivent déjà. Ainsi le 30 mars, le COREVIH Paca-Est a annoncé un service gratuit d’envoi d’auto-tests VIH à domicile.

Pour France Lert, c’est ce genre d’initiative qu’il va falloir développer pour maintenir la fameuse et efficace stratégie du « test and treat » : dépister les personnes les plus exposées au VIH et les mettre rapidement sous traitement (TasP pour les séropositifs et PrEP pour les séronégatifs).

« À Paris sans sida, explique-t-elle, nous réfléchissons à des solutions modernes et innovantes. Pousser la télémédecine, les auto-prélèvements à domicile, les dépistages IST sans ordonnance, sur le modèle “ au labo sans ordo ” actuellement en phase test dans les départements de Paris et des Alpes-Maritimes. »

Mais rien ne se fera sans les personnes concernées : « Il faut motiver les communautés les plus exposées au VIH et principalement les HSH et les femmes nées à l’étranger, pour qu’elles continuent à s’approprier la PrEP, le préservatif et le dépistage répété. Et avoir en face un système de santé qui soit efficace. On va avoir un très gros enjeu pour maintenir cette offre en santé sexuelle avec moins de moyens pour obtenir les mêmes résultats. Sans cela on risque de repartir en arrière. »

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