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Actions Traitements : "Il était important d'avoir un événement qui revisibilise la lutte contre le sida et surtout les personnes vivant avec le VIH"
Les États généraux des personnes vivant avec le VIH (EGPVVIH), les premiers depuis 20 ans, se sont déroulés du 25 au 27 mai 2024 à Paris. Après plus de 40 ans d’épidémie du VIH/sida, les EGPVVIH entendaient être un « espace de dialogue créé par et pour les personnes concernées ». Un an plus tard, la rédaction de Remaides donne la parole à celles et ceux qui ont participé à cet évènement. Rencontre avec Julia Charbonnier, directrice de l’association Actions Traitements et Jean-Marc Bithoun, membre du conseil d'administration de l’association, dont il est également président d’honneur.
Source : AIDES Remaides
Remaides : Pouvez-vous vous présenter ?
Jean-Marc Bithoun : J’ai 69 ans. Je suis séropositif depuis 1984, officiellement. Je suis engagé dans l'association depuis sa création, en 1991. À vrai dire, c'est la perte d'un ami qui m'a projeté vers les associations. Je ne savais pas ce qu’était une association de lutte contre le sida à l'époque. Aujourd’hui, je suis écoutant sur la ligne d'écoute d’Actions Traitements [voir en fin d’article, ndlr], je suis membre du conseil d'administration de l’association, dont je suis également président d’honneur. Je participe à différentes activités ainsi qu’à des ateliers thématiques, des opérations de sensibilisation dans des écoles concernant les discriminations. Cela fait beaucoup d’activités, mais il y a beaucoup à faire.
Julia Charbonnier : Je suis la directrice de l'association Actions Traitements. Nous sommes une association de patients, de personnes vivant avec le VIH, engagée depuis plus de trente ans dans l'accès à l'information thérapeutique, la défense des droits des personnes vivant avec le VIH et l'accompagnement de ces personnes. Nous sommes aussi de plus en plus tournés vers la prévention, notamment la prévention biomédicale [voir encart ci-dessous, ndlr] pour les personnes exposées aux virus. Nous nous intéressons également aux autres IST comme, par exemple, les papillomavirus humains, les hépatites virales, etc. Nos actions s'articulent autour de l'empowerment [on parle aussi d’enpouvoirement, ndlr] des personnes concernées, de la lutte contre les discriminations, et du partage des savoirs issus de l'expérience des personnes concernées.
Remaides : Il y a un an, ont eu lieu les États généraux des personnes vivant avec le VIH, qui ont donné lieu à une série de recommandations. Cela faisait 20 ans qu'un tel événement n'avait pas eu lieu. Qu’y avez-vous fait et qu’en retenez-vous ?
Jean-Marc Bithoun : À titre personnel, je n'ai pas participé à l'élaboration de l'événement. J’y suis venu comme participant. C’était une première pour moi, car je n’avais pas participé à l’édition 2004. Cela a vraiment été un moment très particulier. D'abord parce que j'y ai retrouvé beaucoup de gens que je connaissais, que j'avais déjà rencontrés dans des associations, ou des personnes qui sont comme moi séropositives, avec lesquelles j'avais déjà eu pas mal d'échanges. Cela a été un moment très fort sur le plan humain. Par ailleurs, nous avons pu aborder ensemble et en petits groupes, les problématiques que nous rencontrons dans notre quotidien ; à savoir tout ce qui est du domaine du parcours de soins et toutes les embuches qu’on peut rencontrer. À titre d’exemples : les difficultés à trouver un médecin traitant, le manque de coordination qu'il peut y avoir entre les différents médecins qui nous prennent en charge, qu’il s’agisse des spécialistes, des infectiologues, des généralistes. La question de la coordination entre les différents médecins a été largement abordée dans les groupes. Nous avons aussi beaucoup parlé des difficultés administratives que l’on peut rencontrer : cela va des titres de séjour à l’accès aux assurances, qui reste un gros problème, même si cela a évolué. Reste qu’emprunter n’est toujours pas simple. De la même façon, l’accès aux titres de séjour pour soins se complique. Nous avons beaucoup abordé cette question, d’autant qu’on sait que plus de 50 % des titres de séjour pour soins ne sont plus accordés. Et je ne sais pas quand et si la situation va s’arranger. Les questions de retraite ont aussi été abordées, parce que nous vieillissons avec le VIH, ce qui est une « chance ». Nous ne pensions d’ailleurs pas que nous allions vieillir. L'arrivée à la retraite comporte aussi son lot de problématiques, dont celle de la baisse des ressources ou celle du logement. Il faut parfois se reloger parce qu’on vit dans des appartements à des étages élevés qu’on ne peut plus monter. Nous avons également échangé sur la peur du vieillissement. Qu’allons-nous devenir ? Comment allons-nous être traité ? Serons-nous acceptés dans les EHPADs ? Peut-on imaginer ensemble d’autres alternatives ? Voici quelques-uns des sujets importants qui nous ont réunis.
Enfin, j’ajouterai que cet événement a vraiment mobilisé de nombreuses associations au niveau national, dans l’Hexagone comme dans les Drom-Tom. C'était très important pour moi que toutes ces associations aient été invitées, dont Actions Traitements, à préparer cet événement et à y contribuer.
Julia Charbonnier : Je n’ai pas assisté à ces États généraux, mais j'ai pu échanger avec de nombreuses personnes qui ont participé à ce week-end. Ce que j'ai retenu : c'est l'intensité des échanges ; le fait que cela ait permis un vrai espace de reconnaissance entre pairs, comme le souligne Jean-Marc. J'ai pu assister à la journée de restitution [organisée au ministère des Affaires sociales et de la Santé, ndlr]. Là, c'est la richesse des témoignages qui m'ont vraiment marquée, et la force de cette intelligence collective ; vraiment le fait que toutes les personnes aient travaillé ensemble pour construire en commun, et que ce travail n’ait pas seulement pointé des manques, mais qu’il ait proposé des recommandations, et ainsi créé une nouvelle mobilisation et un dynamisme collectif.
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