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Liz Highleyman : "Je pense que la meilleure façon de combattre la stigmatisation est de diffuser une information précise et fiable"
Mardi 11 mars 2025 ; en pleine effervescence de la Croi 2025 (la plus grande conférence scientifique américaine sur le VIH, les hépatites et les infections opportunistes, qui s’est tenue à San Francisco du 9 au 12 mars), Liz Highleyman s’accorde une pause de 30 minutes pour répondre à mes questions. Journaliste spécialisée dans le VIH depuis près de 30 ans, elle se retrouve, cette fois, de l’autre côté du micro. D’abord un peu hésitante, Liz se prête vite au jeu de l’interview, laissant entrevoir une facette plus personnelle de son parcours et de son engagement. « C’était amusant », conclut la journaliste avec un sourire à la fin de notre échange.
Remaides : Avant de devenir journaliste spécialisée dans le VIH, vous étiez militante et membre d’Act Up Boston à la fin des années 1980. Comment s’est opérée la transition entre l’activisme et le journalisme sur le VIH ?
Liz Highleyman : En fait, à l’université, j’ai étudié l’informatique. Lorsque mes amis ont commencé à mourir du sida, cela m’a poussée à m’engager dans cette lutte. C’est aussi à ce moment-là que j’ai commencé à m’intéresser à la science. À l’époque, je travaillais au MIT [Massachusetts Institute of Technology, une université de recherche privée située à Cambridge, dans le Massachusetts, aux États-Unis, ndlr] et dans le cadre des avantages offerts aux employés, ils m’ont permis d’étudier à la Harvard School of Public Health en cours du soir. J’ai donc étudié la santé publique, tout en travaillant. Après cela, mon partenaire et moi avons déménagé à San Francisco en 1994, et j’ai décroché un poste à la San Francisco AIDS Foundation. J’ai rejoint l’équipe en charge de la publication sur les traitements du VIH qu’ils éditaient, appelée Beta, ou Bulletin of Experimental Treatments for AIDS. J’ai travaillé là-dessus pendant un certain temps. En fait, mon intérêt pour la science s’est développé à travers mon activisme, puis j’ai suivi une formation pour approfondir mes connaissances. Et j’ai énormément appris. Comme beaucoup d’entre nous dans les années 80, nous apprenions un peu sur le tas. Parfois, nous en savions même plus que certains professeurs, car le sujet était encore très nouveau.
Remaides : La stigmatisation et la désinformation restent des obstacles majeurs dans la lutte contre le VIH. Comment abordez-vous ces enjeux dans votre travail ? Et quel rôle les journalistes jouent-ils dans la lutte contre la stigmatisation ?
Je pense que la meilleure façon de combattre la stigmatisation, c’est de diffuser une information précise et fiable. Si les gens savent que le VIH peut être très efficacement prévenu grâce à la Prep, que les personnes vivant avec le VIH peuvent être traitées et atteindre une charge virale indétectable ― ce qui signifie qu’elles ne transmettent pas le virus à leurs partenaires ―, alors cela contribue à réduire la stigmatisation. Ces informations existent, mais elles ne sont pas toujours accessibles aux personnes qui en ont le plus besoin. C’est surprenant qu’après 40 ans d’épidémie, il y ait encore des gens qui ignorent l’existence de la Prep ou le fait que les personnes traitées rapidement peuvent avoir une espérance de vie normale. Beaucoup ne savent pas non plus que l’hépatite C se guérit aujourd’hui. Malgré tous nos efforts, il reste un énorme déficit de sensibilisation. Tout ce que nous pouvons faire, c’est continuer à diffuser l’information. En plus des publications auxquelles je contribue, je suis très active sur les réseaux sociaux pour relayer ces messages, car c’est là que se trouvent non seulement beaucoup de personnes peu informées, mais aussi de nombreuses sources de désinformation. Et aussi frustrant que cela puisse être, nous devons y répondre et rectifier les fausses informations dès que nous les voyons.
Remaides : Vous avez collaboré avec de nombreuses publications médicales et communautaires. Comment conciliez-vous l’exigence de rigueur scientifique avec la nécessité de rendre l’information accessible à un large public ?
C’est une excellente question. Parmi les différentes publications pour lesquelles j’ai écrit, certaines s’adressent davantage à la communauté, et dans ce cas, j’essaie de maintenir un niveau de lecture accessible en expliquant et vulgarisant les concepts scientifiques difficiles. D’autres sont destinées aux professionnels de santé, ce qui me permet d’entrer davantage dans les détails. Mais je pense que la plupart des notions, voire toutes, peuvent être expliquées de manière compréhensible si l’on prend le temps de les rendre accessibles et de les répéter. Bien sûr, certains domaines, comme la recherche sur la guérison ou les vaccins, sont intrinsèquement complexes, mais avec de la pédagogie et de la répétition, il est possible de les rendre plus intuitifs pour le public. Au fil du temps, j’ai développé une meilleure intuition pour identifier ce qui sera le plus facilement compris et comment le formuler de manière claire.
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