Source : liberation.fr
L’exemple de Chrismar Landáez, femme trans séropositive qui peine à suivre un traitement médical depuis six mois, reflète à la fois la déliquescence du système de santé vénézuélien, l’abandon de malades du sida et la faible reconnaissance des droits des LGBTQI.
Au Venezuela, la communauté LGBTQI, qui vit avec le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) est en danger imminent à cause de l’absence d’antirétroviraux, indispensables au traitement de la maladie. L’urgence humanitaire s’est considérablement accentuée. Plus de 77 000 personnes vivant avec le VIH sont abandonnées à leur sort.
Chrismar Landáez est l’une des milliers de victimes d’une tragédie plus qu’annoncée. Elle doit faire face à deux défis. En tant que femme trans, elle doit lutter pour être reconnue et respectée dans un pays où les droits des personnes LGBTQI ne sont pas garantis. Par ailleurs, face à l’impossibilité de trouver les médicaments dont elle a besoin pour contrôler le virus, elle n’a jamais autant craint pour sa vie qu’aujourd’hui.
Elle peut désormais mourir du sida
Diagnostiquée séropositive il y a vingt-trois ans, elle pouvait mener une vie normale, son traitement antirétroviral étant garanti à l’époque. Depuis plus de six mois, la situation a changé. En en raison du manque d’accès continu au traitement du VIH, Chrismar doit affronter de hauts niveaux de stress et de désespoir car elle sait qu’elle peut désormais mourir du sida, ou de toute autre maladie opportuniste qui se développerait. Elle ne cesse de répéter que les personnes séropositives LGBTQI ont le sentiment que le gouvernement vénézuélien joue à la roulette russe avec leur vie.
L’Efavirenz a disparu, tout comme le Viraday. Le premier est un médicament antirétroviral qu’elle a pris pendant seize ans sans interruption ; le deuxième lui a été prescrit lorsque le premier a commencé à manquer par intermittence dans les pharmacies gérées par la sécurité sociale.
Entre 90% et 100% de la demande de médicaments ne peuvent pas être satisfaits. La moitié des hôpitaux sont fermés et le personnel médical des centres publics, qui fournissent 90% des services de santé, a été réduit de 50%. Cependant, le gouvernement s’obstine à nier l’existence d’une crise sanitaire et rejette toutes les offres d’aide et de coopération de la communauté internationale.
Une situation extrêmement dangereuse pour les personnes porteuses du VIH
Comme tant d’autres personnes dans son état, Chrismar se lance depuis dans une recherche désespérée de son traitement dans les centres de santé, qui se termine souvent sur un lapidaire «On n’en a plus» de la part des rares équipes médicales présentes. Confrontée à ces réponses négatives, ne sachant comment rester en vie, elle est habitée par la peur. Atteinte de dépression, elle est perturbée émotionnellement, ce qui diminue ses défenses, une situation extrêmement dangereuse pour les personnes porteuses du VIH.
Il y a dix ans, elle travaillait dans un hôpital où étaient traités des patients séropositifs, et elle se souvient que peu d’entre eux mouraient. Aujourd’hui, nombre de ses amis sont morts en raison du manque de médicaments, et cette situation l’angoisse. Elle craint de mourir à tout moment.
Le gouvernement vénézuélien n’a plus commandé de traitement depuis avril 2017. Or, une fois la demande passée, la livraison des antirétroviraux peut prendre jusqu’à six mois, ce qui implique que les malades sont privés de traitement continu pendant au moins un an. Chaque jour qui passe rallonge le délai, augmente leur angoisse et les risques.
Urgence humanitaire
Au Venezuela, les droits à la vie, à la santé et à la non-discrimination ne sont plus garantis. Les morts s’accumulent et les défenseurs du droit à la santé, les personnes atteintes de maladies chroniques et leurs proches dénoncent encore et toujours cette situation, mais l’absence de réponses gouvernementales et de mesures efficaces les condamne à mort.
Comme une grande partie de la population la plus vulnérable du pays, Chrismar n’a plus accès à des traitements, à une alimentation équilibrée et aux soins médicaux adaptés.
Il est urgent que les autorités acceptent la coopération internationale. Qu’elles mettent immédiatement sur pied une stratégie coordonnée pour faire face à l’urgence humanitaire : assurer le diagnostic du VIH/sida, fournir des médicaments et du matériel médical, et le traitement aux personnes qui en ont besoin.