Source : Le Monde
On compte aujourd’hui 237 projets de vaccins contre la Covid-19 dans le monde, développés selon des techniques très différentes. Voici comment ils agissent.
Au bout de dix mois de développement accéléré, la compétition entre laboratoires pour la vaccination contre le nouveau coronavirus a pris un tournant très médiatique ces dernières semaines avec la multiplication des annonces de résultats. Pfizer-BioNTech, Moderna, AstraZeneca ou l’institut russe Gamaleïa ont été parmi les premières équipes à dévoiler les résultats de leurs recherches.
Les espoirs d’obtenir un vaccin efficace et sûr reposent en partie sur la grande variété des techniques utilisées dans les multiples projets lancés. A la fin de novembre, on comptait 237 projets de vaccins contre le Covid-19 partout dans le monde, selon le recensement du Milken Institute, un groupe de réflexion américain.
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Le principe du vaccin :
Les méthodes diffèrent, mais tous les vaccins ont le même but : apprendre au système immunitaire de l’organisme à reconnaître et à fabriquer ses défenses – les anticorps – spécifiquement contre le Sars-CoV-2. Ces défenses pourront ainsi neutraliser rapidement le virus lorsqu’elles le croiseront. Les explications ci-dessous se concentrent sur ce mécanisme, même s’il existe, en parallèle des anticorps, un autre type de défense immunitaire porté par certaines cellules spécialisées, les lymphocytes T.
Le bénéfice d’un vaccin repose sur le fait que l’on immunise la personne sans l’infecter avec la maladie ciblée, qui peut être dangereuse. Il faut faire croire à l’organisme qu’il est agressé par le coronavirus alors qu’il ne l’est pas vraiment pour obtenir une réponse immunitaire contre le contenu du vaccin.
Pour le tromper, l’astuce consiste à présenter la « carte d’identité » du virus, soit la partie du virus que les défenses de l’organisme reconnaîtront comme la signature d’un intrus : son antigène. Cet antigène, chez le Sars-CoV-2, est la molécule qui tapisse sa surface et lui donne sa forme de couronne, autrement appelée sa protéine de spicule (ou Spike protein en anglais).
Il existe plusieurs méthodes pour présenter cette protéine-carte d’identité à l’organisme. Certaines sont anciennes et bien connues, d’autres sont plus novatrices. Toutes possèdent des inconvénients et des avantages en matière de coût, de sécurité ou de difficulté de mise en œuvre.
Les vaccins à virus
Les vaccins à virus atténué
Il s’agit ici d’injecter à la personne une version affaiblie du virus qui provoque la maladie. Ce virus atténué est bien « vivant », mais n’a plus de pouvoir pathogène. La plupart du temps, le virus peut continuer à se répliquer, mais pas suffisamment pour être une menace et rendre malade l’organisme.
Un virus vivant atténué possède l’avantage de provoquer une réponse immunitaire complète et robuste ainsi qu’une immunité durable, sans besoin d’adjuvants (des produits stimulant les défenses de l’organisme). C’est aussi une méthode peu coûteuse. Cependant, elle peut présenter des risques pour les personnes dont le système immunitaire est fragile et moins apte à lutter contre un virus, même affaibli : elle n’est donc pas recommandée pour des publics à risque. Ce type de vaccin présente également le risque d’aggraver l’infection au Sars-CoV-2 au lieu d’aider l’organisme à la combattre. Ce phénomène, connu sous le nom d’Antibody-dependant enhancement (ADE) a été à l’origine du fiasco du vaccin contre la dengue conçu par Sanofi-Pasteur, lequel avait causé la mort de plusieurs enfants entre 2016 et 2017 aux Philippines. Les vaccins à virus atténué demandent en outre à être réfrigérés et protégés de la lumière, ce qui peut compliquer leur transport et leur conservation.
Exemples : les vaccins ROR (rougeole-oreillons-rubéole) et ceux contre la varicelle
Les vaccins à virus inactivé
Le virus injecté a été tué (par chaleur, radiations ou exposition à des agents chimiques) et a perdu sa capacité à se répliquer dans l’organisme. Mais il a gardé suffisamment de son intégrité physique pour être reconnu par le système immunitaire.
Si cette méthode est plus sûre que celle des virus atténués – surtout pour des publics fragiles – la protection immunitaire qu’elle confère est moins durable et moins complète, car le traitement physique des virus peut endommager une ou plusieurs de ses protéines antigènes. Il faut donc à la fois des adjuvants ainsi que plusieurs doses pour créer une protection efficace.
Qu’est-ce qu’un adjuvant ?
Les vaccins à vecteur viral
Les vaccins à vecteur viral répliquant
Ils utilisent des virus capables de se répliquer dans le corps humain, mais que l’on a affaiblis pour leur ôter tout pouvoir pathogène, ou choisis parce qu’ils n’en ont pas ou peu.
Ces virus sont porteurs d’un code génétique modifié pour fabriquer les antigènes du coronavirus. Ainsi, une fois que le virus « véhicule » pénètre dans une cellule humaine, son matériel génétique (modifié pour coder la protéine de spicule) y est libéré puis « lu », afin de produire à la fois la protéine de spicule du coronavirus et des copies de lui-même qui iront infecter de nouvelles cellules.
Cette technique permet d’obtenir une forte réaction immunitaire (ce qui est positif), ainsi qu’une protection durable. Mais elle est coûteuse et complexe, et son efficacité peut être compromise si la personne a déjà été en contact avec le virus choisi pour livrer l’antigène. Ce dernier ne doit pas déclencher la réaction des anticorps contre sa version « originale », au risque de se faire éliminer avant d’avoir réussi à provoquer une réaction immunitaire contre l’antigène dont il est porteur.
Exemples : le vaccin développé contre Ebola (2016)
Les vaccins à vecteur viral non répliquant
Le fonctionnement de ces vaccins est similaire à ceux qui utilisent des vecteurs viraux répliquants, à la différence que, une fois entré dans la cellule, le virus ne fabriquera que l’antigène choisi et non des copies de lui-même.
Cette technique, utilisée en thérapie génique depuis longtemps, est considérée comme très sûre, mais longue à développer. Contre le Covid-19, les adénovirus sont particulièrement utilisés par les chercheurs. Cette famille de virus, connue pour provoquer surtout des infections respiratoires banales, offre une bonne stabilité, une grande sûreté et une simplicité de manipulation avantageuse.