Certaines pathologies chroniques somatiques sont associées à un risque plus élevé de suicide, même en l’absence de maladie mentale, d’après une étude menée aux États-Unis et parue dans l’« American Journal of Preventive Medicine ».
Constatant une augmentation du taux de suicide de 24 % entre 1999 et 2016 aux États-Unis, ce qui conduit à un chiffre de 13 suicides pour 100 000 personnes (contre 15,1 pour 100 000 en France entière en 2012), et plusieurs études associant certaines pathologies somatiques à une élévation du risque de suicide, les auteurs ont recherché cette association pour 19 pathologies différentes. Ils ont en particulier observé une multiplication du risque par 2 en cas de VIH/sida ou de troubles du sommeil, et par 9 en cas de lésion cérébrale traumatique.
Leur étude a inclus 2 674 personnes décédées suite à un suicide entre 2000 et 2013, et a comparé leurs caractéristiques en termes de maladies somatiques par rapport à celles de 267 400 individus contrôle. Les maladies somatiques prises en compte étaient les suivantes : asthme, douleur chronique du dos, lésion cérébrale traumatique, cancer, insuffisance cardiaque, BPCO, diabète, épilepsie, VIH/sida, maladies cardiaques, hypertension artérielle (HTA), migraine, sclérose en plaques (SEP), ostéoporose, maladie de Parkinson, douleur psychogène, trouble rénal, troubles du sommeil et l’AVC. Une fois les données ajustées pour l’âge et le sexe, ni la SEP ni l’ostéoporose n’étaient liées à une augmentation du risque de suicide. Et une fois ajustées en plus pour la santé mentale et l’usage de drogues, huit associations supplémentaires disparaissaient (asthme, diabète, maladie cardiaque, HTA, maladie de Parkinson, douleur psychogène, troubles rénaux et AVC).
La multimorbidité accroît le risque
Une association persistait donc dans le cas de neuf pathologies : insuffisance cardiaque congestive (mais de façon peu significative), mais surtout douleur chronique du dos, cancer, BPCO, épilepsie, migraine, VIH/sida, troubles du sommeil et lésion cérébrale traumatique. Dans le groupe « suicide », plus de 38 % des personnes présentaient plus d’une de ces pathologies (ce qui multipliait le risque par deux), contre moins de 16 % dans le groupe contrôle.
50 % avaient consulté dans les 4 semaines précédant l’acte
Par ailleurs, les auteurs soulignent que seulement 45 % des personnes du groupe « suicide » présentaient une pathologie mentale ou avaient consommé des drogues (d’après ce qui était consigné dans leur dossier médical) dans l’année précédant leur geste. En revanche, 62 % des personnes du groupe « suicide » présentaient l’une des pathologies somatiques précédemment décrite (par opposition au groupe contrôle où 64 % ne présentaient aucune de ces pathologies).
De plus, les auteurs signalent que 50 % des personnes ayant commis un suicide ont rendu visite à leur médecin dans les quatre semaines précédant leur acte. Du coup, les personnes souffrant de douleurs du dos (car celles-ci touchent largement la population et augmentent le risque de suicide de près de 40 %), de troubles du sommeil, de VIH/sida (qui touche peu de personnes dans la population générale mais multiplie le risque de suicide par deux) et surtout de lésion cérébrale traumatique devraient être des cibles prioritaires de prévention, soulignent les auteurs.